Pas de médicaments, pas de lits, pas de nourriture ni d’eau : à l’intérieur de l’hôpital principal de la ville de Gaza

Par Tareq S. Hajjaj

Alors que l’invasion israélienne de la ville de Gaza avance, l’hôpital al-Shifa est confronté à une grave pénurie de fournitures médicales essentielles, laissant les patients sans traitement et totalement vulnérables. Le personnel et les patients craignent une attaque israélienne imminente.

À Gaza, alors que l’armée israélienne multiplie les opérations pour atteindre et occuper le cœur de la ville, et que le nombre de victimes augmente, tous les regards se tournent à nouveau vers l’hôpital qui était autrefois le plus grand et le mieux équipé pour faire face à de telles situations : l’hôpital al-Shifa, situé dans la ville de Gaza.

Depuis octobre 2023, l’armée israélienne a pris d’assaut et détruit l’hôpital al-Shifa à plusieurs reprises. Malgré tout, le ministère de la Santé de Gaza a réussi à reconstruire certaines sections et à fournir des soins médicaux à la population dans l’un des endroits les plus touchés par les bombardements israéliens, la ville de Gaza.

Mais avec la récente avancée de l’armée israélienne dans la ville, la crainte d’une nouvelle invasion israélienne de l’hôpital refait surface. De plus, al-Shifa, comme tous les autres hôpitaux de Gaza, est confronté à une pénurie critique de fournitures médicales, de sang, de personnel, de lits et d’équipements médicaux essentiels.

« Ce sont des jours sanglants », a déclaré le Dr Hassan Alshaer, directeur médical de l’hôpital al-Shifa. Ces derniers jours, plus de 60 personnes ont été transportées à l’hôpital, mortes, et plus de 175 blessés arrivent chaque jour à l’hôpital, « la plupart dans un état critique et nécessitant des interventions chirurgicales et des soins intensifs. Nous ne disposons que de quatre salles d’opération dans l’hôpital ».

Le Dr Alshaer décrit huit vagues quotidiennes de victimes et de martyrs arrivant à l’hôpital, chacune comptant au moins 30 morts et blessés.

« Nous sommes en difficulté à cause du siège et de la guerre israéliens, mais à l’intérieur d’al-Shifa, notre mission est de prodiguer des soins médicaux, et nous le ferons jusqu’au dernier moment », a déclaré le Dr Alshaer.

L’hôpital Al-Shifa a eu du mal à se remettre complètement des précédentes attaques israéliennes contre l’établissement. Actuellement, l’hôpital ne dispose que de quatre salles d’opération et de 32 lits en soins intensifs, mais il accueille plus de 800 personnes par jour.

« Nous manquons cruellement de salles d’opération ; nous avons tellement d’opérations en attente, et l’unité de soins intensifs est toujours pleine, et il y a 20 prématurés dans l’unité de soins intensifs néonatals », a expliqué le Dr Alshaer.

Il exprime sa crainte pour le personnel médical, qui est également témoin du danger extrême.

« Nous avons peur pour notre sécurité. Hier, l’armée israélienne a assassiné quelqu’un aux portes de l’hôpital, ce qui atteste d’un danger critique pour nous tous qui travaillons à l’hôpital. Nous avons perdu 30 % de notre personnel à l’hôpital, certains ayant été tués, d’autres détenus ou blessés. Nous manquons également de personnel actif », a-t-il ajouté à Mondoweiss.

Selon le Dr al-Shaer, l’hôpital compte actuellement 562 patients, et plus de 50 personnes nécessitant des interventions chirurgicales urgentes attendent leur tour. Chaque jour, des dizaines de patients sont traités sur les 32 appareils de dialyse.

Alors que le traitement des patients et l’approvisionnement en fournitures médicales nécessaires constituent un combat quotidien, la principale préoccupation du Dr al-Shaer est désormais de savoir ce qui se passera si al-Shifa devient à nouveau la cible d’une attaque militaire israélienne sur la ville de Gaza.

« Si l’armée israélienne évacue l’hôpital, de nombreux patients, notamment ceux qui se trouvent en soins intensifs, en soins intensifs néonatals et ceux souffrant d’insuffisance rénale, mourront inévitablement », a-t-il déclaré.

« Nous sommes confrontés à l’invasion de la ville avec une pénurie d’eau et de nourriture pour les patients et les travailleurs de l’hôpital. »

Des patients dans l’angoisse, en attente d’un traitement

À l’intérieur de l’hôpital, où la plupart des lits sont dépourvus de couvertures, seuls les sols sont utilisés pour allonger les patients, et certains lits se trouvent dans une tente médicale installée à l’extérieur de l’hôpital pour accueillir les blessés.

Les patients vivent avec une pénurie de fournitures médicales. Ils sont directement touchés, car leurs blessures s’aggravent au lieu de guérir. Ils décrivent la situation comme désespérée, où même l’eau, qu’elle soit destinée à la consommation ou à la toilette, est indisponible.

« La situation est vraiment difficile, les patients sont allongés dans tous les coins, il n’y a pas de lits, pas de traitement, pas de médicaments, nous ne trouvons même pas de gaze pour nos blessures », a déclaré Muhammad Kafarana, un patient de l’hôpital, à Mondoweiss.

« Je suis blessé au dos, après avoir été touché par un explosif. Si j’avais été soigné à temps, je serais déjà guéri, mais pour l’instant, j’attends toujours d’être opéré. »

Kafarana explique que lui et d’autres patients souffrent à l’hôpital au lieu de recevoir les soins dont ils ont besoin. « Il n’y a ni médicaments, ni eau, ni nourriture. Les médecins viennent nous examiner et restent là, impuissants, car ils ne peuvent rien nous donner », a-t-il encore dit.

Il y a quelques jours, raconte Kafarna, un groupe de forces spéciales israéliennes s’est approché d’al-Shifa, semant la panique dans tout l’hôpital et provoquant la réouverture des blessures de certains patients dans la confusion. D’autres patients comme lui, actuellement incapables de marcher, étaient allongés là, incapables de bouger, « attendant la mort », dit-il.

Malgré les dangers imminents auxquels sont confrontés le personnel et les patients d’al-Shifa, l’hôpital reste debout et le personnel refuse de quitter son poste et d’évacuer les lieux.

Bien que l’hôpital n’ait pas encore reçu d’« ordre d’évacuation » officiel de la part de l’armée israélienne, le personnel affirme que ce n’est qu’une question de temps. « Nous avons déjà été assiégés à l’intérieur de cet hôpital et [à cette époque], l’armée israélienne nous a évacués de force, mais cette fois-ci, nous ne savons pas ce que les Israéliens ont prévu pour nous », a dit al-Shaer à Mondoweiss.

« Nous n’avons aucune idée de ce qui va se passer, mais nous sommes des équipes médicales et nous n’avons rien à voir avec les activités militaires. Nous sommes ici depuis le début de la guerre et nous resterons », a-t-il déclaré.

Auteur : Tareq S. Hajjaj

* Tareq S. Hajjaj est un auteur et un membre de l'Union des écrivains palestiniens. Il a étudié la littérature anglaise à l'université Al-Azhar de Gaza.
Il a débuté sa carrière dans le journalisme en 2015 en travaillant comme journaliste/traducteur au journal local Donia al-Watan, puis en écrivant en arabe et en anglais pour des organes internationaux tels que Elbadi, MEE et Al Monitor. Aujourd'hui, il écrit pour We Are Not Numbers et Mondoweiss.
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25 septembre 2025 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine