
20 août 2025 - Bara'a Abu Zaid, mère de quatre enfants, reçoit des soins à l'hôpital Al-Nasser de Khan Yunis, dans la bande de Gaza. Elle a été blessée le 7 août 2025 après que sa tente a été touchée par une frappe aérienne israélienne, tuant tous ses enfants alors que la famille célébrait son anniversaire. Trois de ses enfants ont été tués sur le coup. Bara'a a été gravement blessée au bras, qui risque désormais d'être amputé, ainsi qu'à la jambe et au visage. Son quatrième enfant, qui était en soins intensifs à l'hôpital Al-Nasser, est décédé des suites de ses blessures en raison du manque de soins nécessaires causé par le blocus israélien - Photo : Doaa Albaz / Activestills
Par Ramzy Baroud
Pour isoler économiquement Israël en raison du génocide qu’il commet à Gaza, le Fonds de pension mondial du gouvernement norvégien a pris la décision capitale de se désengager d’un nombre encore plus important d’entreprises israéliennes.
Le fonds souverain norvégien est le plus important fonds au monde, avec des investissements en Israël estimés à 1,9 milliard de dollars.
La décision de se désengager a été prise progressivement, mais elle s’inscrit dans la logique de la solidarité croissante du gouvernement norvégien avec la Palestine et de ses condamnations de plus en plus vives à l’égard d’Israël.
Jouant un rôle de premier plan aux côtés de l’Espagne, de l’Irlande et de la Slovénie, la Norvège a été l’un des principaux censeurs européens du génocide israélien et de la famine volontairement provoquée à Gaza.
Elle a activement contribué à l’enquête de la Cour internationale de justice sur le génocide et a officiellement reconnu l’État de Palestine en mai 2024.
Cette position diplomatique et juridique, associée à son désinvestissement financier, représente un effort cohérent et croissant pour obliger Israël à répondre de l’extermination des Palestiniens.
L’économie israélienne était déjà en chute libre avant même le génocide. Son effondrement était lié à la profonde instabilité politique du pays, qui résultait de la tentative du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et de son gouvernement fascisant de contrôler le système judiciaire, compromettant ainsi le semblant de « démocratie » qui subsistait dans ce pays.
Cela a entraîné une baisse significative de la confiance des investisseurs.
La guerre et le génocide, qui ont débuté le 7 octobre 2023, n’ont fait qu’accélérer la crise, poussant une économie déjà fragile au bord du gouffre. Selon les rapports du ministère israélien des Finances, les investissements directs étrangers en Israël ont chuté d’environ 28 % au cours du premier semestre 2024 par rapport à la même période en 2023.
Les soi-disant reprises des investissements étrangers dont on a parlé, étaient trompeuses. Elles n’étaient pas le résultat d’un mouvement mondial visant à sauver Israël, mais la conséquence d’un afflux massif de fonds américains destinés à soutenir à la fois l’économie d’Israël, son génocide à Gaza, et ses autres fronts de guerre.
Le produit intérieur brut d’Israël était estimé par la Banque mondiale à environ 540 milliards de dollars à la fin de 2024. La guerre contre Gaza a déjà considérablement entamé le PIB d’Israël.
Les estimations d’Israël lui-même sont compliquées, mais toutes les données indiquent que l’économie israélienne souffre et continuera de souffrir dans le futur proche.
Citant des rapports de la Banque d’Israël et du ministère des Finances, le journal économique israélien Calcalist a rapporté en janvier 2025 que le coût de la guerre israélienne contre Gaza avait déjà atteint plus de 67,5 milliards de dollars. Ce chiffre représentait le coût de la guerre jusqu’à la fin de 2024.
Compte tenu de l’augmentation exponentielle des coûts de la guerre en cours et de ses autres conséquences, notamment le désinvestissement du marché israélien par la Norvège et d’autres pays, les perspectives d’avenir de l’économie israélienne semblent très sombres. Le Bureau central des statistiques israélien a indiqué que l’économie israélienne déjà en constante contraction, a encore reculé de 3,5 % entre avril et juin 2025.
Cet effondrement devrait se poursuivre, malgré le soutien financier sans précédent des États-Unis à Tel-Aviv. En effet, sans l’aide des États-Unis, l’économie israélienne, déjà précaire, serait dans un état bien pire.
Bien que les États-Unis aient toujours soutenu Israël, avec près de 4 milliards de dollars d’aide par an, l’aide américaine à Israël au cours des deux dernières années a été la plus généreuse et la plus cruciale à ce jour.
Israël reçoit 3,8 milliards de dollars par an provenant des contribuables américains, selon le dernier protocole d’accord décennal signé en 2016. Tout aussi précieuses, sinon plus, que cette somme importante sont les garanties de prêt, qui permettent à Israël d’emprunter de l’argent à un taux d’intérêt beaucoup plus bas sur le marché mondial.
Le soutien des États-Unis a donc permis aux investisseurs de considérer le marché israélien comme un refuge sûr pour leurs fonds, garantissant souvent des rendements élevés. Cela vaut pour le fonds souverain norvégien comme pour de nombreuses autres entités et entreprises.
Comme Israël a désormais une très mauvaise image de marque et qu’il a perdu beaucoup d’investissements en raison du génocide à Gaza et de l’expansion croissante des colonies illégales en Cisjordanie, les États-Unis, en tant que principal bienfaiteur d’Israël, sont intervenus pour combler les pertes.
La loi américaine sur les crédits supplémentaires d’urgence d’avril 2024 a alloué un total de 26,4 milliards de dollars à Israël. Une grande partie de cette somme était destinée aux dépenses de défense, mais en réalité, la majeure partie sera réinjectée dans l’économie israélienne.
Ce montant, qui s’ajoute à l’aide militaire annuelle, permet au gouvernement israélien de réduire au minimum ses dépenses de défense et d’allouer davantage de fonds pour empêcher l’économie de se contracter à un rythme encore plus rapide.
De plus, cela permettra à l’industrie militaire israélienne de continuer à produire des technologies militaires sophistiquées qui garantiront la compétitivité d’Israël sur le marché des armes.
Le complexe militaro-industriel, qui représente une part importante de l’économie israélienne, est ainsi non seulement soutenu, mais également stimulé par l’aide américaine, ce qui garantit le fonctionnement continu de la machine de guerre avec un minimum de perturbations financières.
Tout cela ne doit pas minimiser la nécessité de cesser d’investir dans le système financier israélien.
Bien au contraire, il faut intensifier le plus possible les efforts de désinvestissement afin de contrebalancer ceux des États-Unis pour empêcher l’implosion de l’économie israélienne.
De plus, cela aidera les citoyens américains, qui s’opposent au rôle de leur gouvernement dans le génocide à Gaza, à prendre conscience de l’étendue de l’aide que Washington apporte à Israël pour sauver son économie, pendant que son armée extermine les Palestiniens.
Les flux financiers en provenance des États-Unis ne sont pas neutres, ils témoignent de la collaboration active des Etats-Unis au génocide israélien.
Il ne fait en effet aucun doute que, sans l’aide de Washington, les Israéliens ne pourraient pas continuer à exterminer impunément les Palestiniens de Gaza.
Auteur : Ramzy Baroud
* Dr Ramzy Baroud est journaliste, auteur et rédacteur en chef de Palestine Chronicle.
Il est l'auteur de six ouvrages. Son dernier livre, coédité avec Ilan Pappé, s'intitule « Our Vision for Liberation : Engaged Palestinian Leaders and Intellectuals Speak out » (version française). Parmi ses autres livres figurent « These Chains Will Be Broken: Palestinian Stories of Struggle and Defiance in Israeli Prisons », « My Father was a Freedom Fighter » (version française), « The Last Earth » et « The Second Palestinian Intifada » (version française) Son livre à venir, « Before the Flood », sera publié par Seven Stories Press.
Dr Ramzy Baroud est chercheur principal non résident au Centre for Islam and Global Affairs (CIGA). Son site web.
28 août 2025 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet
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