Ukraine : imaginer Israël incitant à la paix est une bouffonnerie sanglante

17 mars 2022 - Des Palestiniens participent aux funérailles de Nader Rayan, 17 ans, qui a été assassiné par les forces israéliennes ld'occupation ors d'un raid nocturne à proximité du camp de réfugiés de Balata à Naplouse, en Cisjordanie. Deux autres Palestiniens ont été assassinés dans le camp de réfugiés de Qalandiya près de Jérusalem et de la ville de Rahat (Palestine de 1948) au cours de différentes opérations des forces occupantes. Au moins 17 Palestiniens ont été kidnappés pendant les mêmes opérations - Photo : Ahmad Al Bazz / Activestills

Par Yara Hawari

Israël, envahisseur en série, ne peut pas être une force de paix entre la Russie et l’Ukraine, et la perspective de tenir des pourparlers dans Jérusalem occupée est une insulte faite aux Palestiniens, écrit Yara Hawari.

Le président ukrainien, Volodomyr Zelensky, a déclaré que le régime israélien a la capacité de jouer un rôle important pour terminer la guerre. Il a ajouté que Jérusalem serait un endroit idéal pour accueillir des pourparlers de paix entre son pays et la Russie.

Cela survient avec l’approbation du Premier ministre israélien, Naftali Bennett, qui veut agir en tant que médiateur entre les deux États, notamment en allant à Moscou afin de parler directement avec Poutine.

En effet, le régime israélien a adopté une position quasi neutre sur l’invasion russe de l’Ukraine. Lors d’une session d’urgence de l’Assemblée générale de l’ONU début mars, le régime israélien a voté une résolution condamnant l’invasion et appelant au retrait immédiat des troupes russes, mais il a refusé de s’aligner sur les sanctions américaines et européennes contre la Russie, malgré le fait que les États-Unis le lui aient directement demandé.

Le régime israélien a également ignoré la demande d’armes supplémentaires et défensives de Zelensky et a préféré envoyer des fournitures médicales.

Cette quasi-neutralité reflète les relations de longue date du régime israélien avec les deux pays ainsi qu’avec un nombre important d’Ukrainiens et de Russes israéliens.

Pourtant, sa relation avec la Russie est plus compliquée et pour cette raison, elle avance ses pions avec précaution. La Russie est une force militaire importante au Moyen-Orient, en particulier en Syrie où elle est très présente.

Certains analystes ont même prétendu que le régime israélien craignait la Russie.

Ensuite, il y a les oligarques juifs russes, dont certains se sont réfugiés en Israël depuis l’invasion et l’instauration des sanctions. Le plus tristement célèbre d’entre eux est Roman Abramovich, propriétaire du club de football de Chelsea, grand financier des groupes de colons israéliens et qui aurait été un membre du cercle rapproché de Poutine.

En raison de ses relations étroites avec Poutine, Abramovich est l’objet de sanctions de l’UE et du Royaume-Uni, notamment le gel de ses avoirs et une interdiction de voyager. Immédiatement après ces décisions, son jet privé aurait atterri à Tel-Aviv.

Tout le monde n’a pas été impressionné par les prétentions israéliennes de « faire la paix ». L’ambassadeur d’Ukraine en Israël a déclaré qu’il ne devrait pas y avoir de rôle spécial pour Israël dans la guerre et que sa neutralité est davantage une question de combine.

Il devient de plus en plus clair que la navette diplomatique de Bennett est une farce pour tenter de répondre aux propres intérêts (alambiqués) du régime israélien. Il reste cependant à voir combien de temps il sera capable de maintenir cette position « neutre » face aux pressions américaines et européennes pour prendre position sans équivoque au profit de l’Ukraine.

Dans le même temps, les Palestiniens contemplent avec une totale incrédulité le nouveau rôle autoproclamé du régime israélien en tant que potentiel médiateur et pacificateur. Si ce n’était pas si tragique, ce serait une comédie.

Après avoir établi un État d’apartheid en 1948, littéralement sur les cendres de la Palestine historique, le régime israélien n’a cessé depuis d’envahir la terre palestinienne et de se l’approprier pour un usage exclusif juif israélien.

Ce faisant, il a expulsé de force des Palestiniens de leurs foyers et, dans de nombreux cas, les a contraints à un exil permanent. Le régime israélien assiège également Gaza depuis de nombreuses années et soumet fréquemment le territoire assiégé à des bombardements dévastateurs.

La ville de Jérusalem, dans laquelle Zelensky souhaite organiser des pourparlers de paix, est elle-même une ville sous une intense invasion. Après avoir conquis l’ouest de la ville en 1948, le régime israélien a conquis l’est en 1967.

En mai 2021, un quartier palestinien de Jérusalem, Sheikh Jarrah, s’est soulevé contre son imminent nettoyage ethnique. Cela a déclenché ce que beaucoup ont surnommé l’Intifada de l’unité, au cours de laquelle les Palestiniens de toute la Palestine colonisée ont résisté dans une lutte commune.

Ils ont été confrontés à une répression brutale de la part du régime israélien et depuis lors, les Palestiniens de Sheikh Jarrah et d’ailleurs à Jérusalem ont été soit expulsés de leurs maisons, [soit restent sous la menace d’une expulsion].

Israël a été condamné à plusieurs reprises pendant des décennies par des résolutions de l’ONU pour ses violations des droits des Palestiniens, même si ses actions sont restées totalement impunies. Plus récemment, diverses organisations de défense des droits de l’homme, dont Human Rights Watch et Amnesty International, se faisant l’écho d’universitaires et de militants palestiniens, ont accusé le régime israélien d’avoir commis le crime d’apartheid.

Selon toutes les normes de la moralité, cela devrait condamner le régime israélien à être un État paria et certainement pas celui qui prétend jouer le rôle de faiseur de paix. Les personnes subissant les conséquences de l’invasion russe de l’Ukraine méritent mieux que cela.

Pourtant, la réalité totalement anormale dans laquelle nous vivons prétend le contraire.

17 mars 2022 – The New Arab – Traduction : Chronique de Palestine