
Rassemblement des partisans du mouvement Hezbollah à Aita Chaab, le 16 août 2013, pour commémorer le septième anniversaire de la fin de la libération du Sud-Liban et de la défaite israélienne - Photo : Ali Hashisho
Par Robert Inlakesh
L’objectif d’Israël est de faire s’effondrer le Liban en déclenchant une guerre civile, et toute initiative visant à normaliser les relations avec Tel-Aviv ne manquerait pas de provoquer le chaos.
La pression exercée par l’administration Trump pour forcer le gouvernement pro-américain de Beyrouth à normaliser ses relations avec Israël et contraindre le Hezbollah à désarmer conduira à une guerre civile.
Au lieu d’un accord de « paix », ils signeraient l’arrêt de mort de leur propre nation, surtout compte tenu des dangers que représente la Syrie pour la stabilité du Liban dans un tel contexte.
Le nouveau gouvernement libanais, dirigé par le président Joseph Aoun et le Premier ministre Nawaf Salam, s’est révélé être sous la coupe de Washington. Malgré les innombrables allégations d’influence iranienne dans ce pays de la Méditerranée orientale, c’est clairement les États-Unis qui tirent les ficelles.
Lundi, Thomas Barrack, ambassadeur de Trump en Turquie et envoyé spécial en Syrie, s’est déclaré « incroyablement satisfait » des réponses du Liban aux demandes américaines visant à faire entrer Beyrouth dans le giron des « accords d’Abraham » et à désarmer le Hezbollah.
En mai dernier, le Premier ministre libanais a déclaré lors d’une interview accordée à CNN que « la normalisation fait partie intégrante de la paix que nous souhaitons voir s’instaurer demain, et pas après-demain ».
Cheikh Naïm Qassem : « Les armes de la résistance ne sont pas négociables ! »
Ses propos étaient tellement déconnectés de la volonté populaire que le journaliste qui l’interviewait en est resté bouche bée, puis a relevé plusieurs failles dans son raisonnement.
Cependant, ces positions exprimées à l’égard de l’administration Trump sont profondément impopulaires auprès de la grande majorité du peuple libanais. Sans parler de la population chiite qui soutient le Hezbollah et le mouvement Amal.
À maintes reprises, le secrétaire général du Hezbollah, Cheikh Naim Qassem, a exprimé la position de son parti concernant la remise des armes à l’État.
Il a clairement indiqué qu’une telle mesure était hors de question et que « la résistance ne déposerait pas les armes », en particulier face aux violations continues de l’intégrité territoriale du Liban par Israël.
Alors que les think tanks américains, les politiciens et les médias américains parlent tous du Liban comme d’un pays mûr pour un accord de normalisation en raison de la destruction supposée du Hezbollah – beaucoup allant jusqu’à affirmer que le parti est fini – la réalité sur le terrain est tout autre.
Contrairement à ce que les médias veulent faire croire à l’opinion publique, le Hezbollah est loin d’être hors-jeu et mobilise ses bases depuis la conclusion de l’accord de cessez-le-feu en novembre dernier.
Depuis lors, Israël a commis près de 4000 violations du cessez-le-feu, tandis que le Hezbollah a évacué de nombreuses positions dans le sud du Liban et n’a pas répondu aux attaques quotidiennes commises par les Israéliens.
Bien que certains y voient une capitulation, il est clair que le parti cherche à éliminer les collaborateurs, les espions et à repositionner certains atouts militaires qui ont été révélés précédemment ou exposés à des frappes.
Dans le même temps, alors que le gouvernement libanais envisage une normalisation et que le Hezbollah se prépare à de futures confrontations avec ses 100 000 combattants, le gouvernement syrien à Damas se coordonne étroitement avec les Israéliens sur les soi-disant « questions de sécurité ».
Les médias hébreux israéliens rapportent que Damas s’apprête à signer une sorte d’accord provisoire avec Tel-Aviv, dans le but de limiter l’influence iranienne dans la région et de lutter contre le Hezbollah, ainsi que les groupes palestiniens.
Depuis l’arrivée au pouvoir du nouveau gouvernement Hayat Tahrir al-Sham en Syrie, ses milices ont déjà lancé une douzaine d’attaques contre le territoire libanais.
De nombreuses factions salafistes radicales ont pris part à ces combats. En outre, une campagne active est menée pour réprimer les transferts d’armes au marché noir vers le Hezbollah, qui sont fréquents en raison de l’effondrement de l’État syrien.
En Syrie, les takfiristes d’HTS sont « les petites mains » du projet israélo/US
Le nouveau gouvernement de Damas a dissous l’armée arabe syrienne et les forces de sécurité, les remplaçant par des membres de ses différentes milices alliées. Le pays est en proie à l’instabilité, où les factions locales, les gangs et les milices contrôlent une grande partie du territoire plus que le gouvernement officiel.
Tout cela est important, car compte tenu des liens croissants entre le nouveau gouvernement d’Ahmed al-Shara’a et Israël, cela pourrait à terme se traduire par une menace directe pour la souveraineté territoriale du Liban.
L’objectif d’Israël est de faire s’effondrer le Liban en déclenchant une guerre civile, et toute initiative visant à normaliser les relations avec Tel-Aviv déclencherait inévitablement le chaos. Il est même possible qu’une alliance se forme entre le parti d’extrême droite des Forces libanaises, Israël et des milices salafistes pour lutter contre le Hezbollah, une situation sans précédent que l’armée libanaise ne serait pas en mesure de contenir.
La principale raison pour laquelle la propagande prétend que le Hezbollah a été vaincu est destinée à l’opinion publique israélienne, tout en donnant aux États-Unis l’apparence d’une victoire régionale contre l’Iran.
En réalité, la base du Hezbollah a été fortement touchée par la guerre, tout comme le grand public qui s’est rangé du côté de la résistance de son pays contre l’attaque israélienne.
Les Libanais chiites sont également traumatisés par l’attaque aveugle contre les pagers et la mort de Seyyed Hassan Nasrallah, pour laquelle ils estiment que justice n’a pas été rendue.
Israël dispose de toutes ces informations et comprend probablement que le Hezbollah finira par tenter de lancer une attaque dévastatrice contre lui. C’est pourquoi la perspective d’une nouvelle attaque contre le Liban est très probable dans les mois à venir.
La surveillance américaine et israélienne sur le pays s’est considérablement intensifiée depuis la fin des 12 jours de combats entre l’Iran et Israël, ce qui indique qu’ils tentent de recueillir davantage de renseignements pour reconstituer leurs bases de données sur les cibles.
Des informations ont récemment été publiées, provenant d’al-Akhbar News, selon lesquelles le gouvernement libanais aurait discuté du désarmement avec le Hezbollah.
Une source bien informée au Liban a déclaré au Palestine Chronicle que ces informations étaient vraies, mais qu’il s’agissait simplement d’une formalité et que « cela n’aboutirait à rien ».
Cela correspond à la position officielle du parti. Bien qu’il entretienne des relations très amicales avec l’administration actuelle à Beyrouth, le Hezbollah est catégorique : il conservera ses armes.
Si des pourparlers de normalisation sont même à l’ordre du jour à ce stade, c’est parce qu’une grande partie des hauts dirigeants libanais sont à la solde des États-Unis et que Washington cherche à semer la division au sein du Liban.
L’objectif est de détruire le Liban pour permettre une désintégration de l’État similaire à celle qui s’est produite en Syrie.
Auteur : Robert Inlakesh
* Robert Inlakesh est un analyste politique, journaliste et réalisateur de documentaires actuellement basé à Londres, au Royaume-Uni. Il a rapporté et vécu dans les territoires palestiniens occupés et travaille actuellement avec Quds News et Press TV. Il est le réalisateur de Steal of the Century: Trump's Palestine-Israel Catastrophe. Suivez-le sur Twitter.
9 juillet 2025 – The Palestine Chronicle – Traduction : Chronique de Palestine
Soyez le premier à commenter