Les masques tombent : Israël vote pour l’apartheid

Dernière colonie européenne, imposée par la violence et le vol systématique des terres, l'état sioniste ne survit aujourd'hui que par une répression féroce, un racisme et un système ségrégationniste devenus institutionnels contre la population palestinienne autochtone - Image : al-Mayadeen

Par Robert Inlakesh

L’orientalisme, le colonialisme, le fascisme et l’expulsion sont toujours allés de pair avec le régime sioniste, sauf qu’« Israël » avait toujours réussi à blanchir son image et à offrir au monde une version enchantée de lui-même ; c’est devenu impossible.

Les résultats des dernières élections israéliennes représentent une victoire à la Pyrrhus pour les fascistes purs et durs du régime d’apartheid. Le nouveau régime israélien sera certainement encore plus dévastateur pour les Palestiniens, mais, sur le long terme, la toile d’araignée qui les emprisonne finira par se fragiliser.

Les cinquièmes élections israéliennes en trois ans ont atteint un objectif majeur du régime sioniste, puisque l’alliance autrefois marginale du « Sionisme religieux » est devenu le deuxième groupe le plus influent de la Knesset israélienne, derrière le parti Likoud.

Le plus ancien Premier ministre israélien en exercice, Benjamin Netanyahu, est de retour au pouvoir, et le déroulement de son procès pour corruption passe au second plan, comme si le risque qu’il aille en prison était de l’histoire ancienne.

Les Libéraux et les Sionistes libéraux occidentaux politiquement engagés ont accueilli avec horreur la victoire de l’alliance extrémiste du « sionisme religieux », dirigée par Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich.

Le Board of Deputies of British Jews (Conseil des députés des Juifs Britanniques), une importante organisation juive pro-« Israël » au Royaume-Uni, a ouvertement condamné Bezalel Smotrich pour promouvoir une idéologie incitant à la haine, et le Pouvoir juif, le Parti d’Itamar Ben-Gvir a été qualifié de « raciste et condamnable » par le groupe de pression AIPAC (comité américain des affaires publiques Israël).

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Il y a une certaine ligne qui, pour les Sionistes libéraux, ne peut être franchie et c’est pourtant ce que fait le Sionisme religieux, qui est ouvertement islamophobe, raciste et veut mettre en œuvre des politiques encore plus barbares que celles que le régime sioniste a jamais appliquées.

C’est le moment de vérité : les Sionistes libéraux sont obligés de se regarder dans le miroir et de se demander ce qu’ils soutiennent exactement.

Même les organisations les plus catégoriquement pro-« Israël » sont mal à l’aise. En effet, il n’y a plus aucun endroit où se cacher, il n’est plus possible de prétendre que le régime colonial de peuplement est un phare libéral de la démocratie, et le conte de fées, qui permettait aux Sionistes libéraux de bien dormir la nuit, se dissipe.

« Israël » est déjà qualifié de régime d’apartheid par les plus grandes organisations nationales et internationales de défense des droits de l’homme : Amnesty International, Human Rights Watch, B’Tselem (Israël) et les principaux groupes de défense des droits des Palestiniens, comme Al-Haq.

Un expert de premier plan des Nations unies a également qualifié « Israël » de régime d’apartheid, tandis que la Cour pénale internationale (CPI) enquête sur les crimes de guerre commis dans les territoires occupés.

Alors que les organismes internationaux les plus fiables en matière de droits de l’homme sont d’accord sur la nature criminelle du comportement d’ « Israël », les électeurs juifs israéliens viennent de voter pour une liste unifiée, le Sionisme religieux, qui préconise ce qui suit : La révision du système juridique israélien, la modification de la « loi du retour » juive, l’immunité totale des soldats israéliens pour les crimes de guerre perpétrés contre les Palestiniens, l’expulsion et la déchéance de la citoyenneté des citoyens palestiniens israéliens qui font preuve de « déloyauté » envers l’État juif, l’introduction de la peine de mort pour les Palestiniens qui tuent des juifs, l’annexion de la Cisjordanie, la reprise en main de l’Autorité palestinienne, la modification du statu quo dans la mosquée Al-Aqsa et bien d’autres choses encore.

Bien qu’aucune de ces dispositions politiques ne surprenne les Palestiniens et que certaines soient même déjà mises en œuvre lentement et discrètement, elles n’en sont pas moins monstrueuses, surtout pour un occidental.

« Israël » est un régime colonial de peuplement, fondé sur la nécessité de la suprématie nationaliste juive sur les Palestiniens en Palestine. Il ne pourrait pas exister sans le nettoyage ethnique et l’oppression, tous ses principaux dirigeants ont fait preuve de racisme envers les Arabes et même leurs citoyens juifs non-blancs dans la plupart des cas.

L’orientalisme, le colonialisme, le fascisme et l’expulsion sont toujours allés de pair avec le régime sioniste, sauf qu’« Israël » avait toujours réussi à blanchir son image et à offrir au monde une version enchantée de lui-même, ce qui est désormais impossible.

L’apparition des smartphones qui permettent de filmer tous les crimes à tout moment et le virage vers l’ultranationalisme de l’opinion publique israélienne, ont sonné le glas de l’image libérale utopique, que « Tel Aviv » parvenait à entretenir jusqu’ici en Occident. Elle a disparu pour toujours.

En ce qui concerne la position internationale d'”« Israël », le nouveau régime Netanyahu sera sans aucun doute plus isolé, car les personnalités politiques qui sont maintenant au premier plan sont indéfendables. Contrairement à Benjamin Netanyahu, la forme particulière d’oppression pratiquée par le Sionisme religieux ne bénéficie pas de la couverture d’une narrative adaptée aux Libéraux occidentaux.

Il était clair que dès le départ, l’administration américaine de Biden voulait la victoire de Yair Lapid et de Benny Gantz aux élections israéliennes et il est fort possible que l’offensive contre le Jihad islamique palestinien (JIP), en août dernier, ait été coordonnée avec Washington, afin de renforcer la position du régime de Lapid.

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Netanyahu s’est personnellement fait beaucoup d’ennemis au sein du Parti démocrate, l’histoire d’amour entre les Démocrates et Benjamin Netanyahu a commencé à battre de l’aile en 2015 et elle s’est terminée pendant les années de l’administration Trump. Pourtant, le « soutien inconditionnel » des États-Unis à « Israël » ne cessera absolument pas, au contraire, les efforts pour concrétiser un accord de normalisation entre Tel Aviv et Riyad redoubleront.

C’est en Cisjordanie que l’arrivée au pouvoir du Sionisme religieux aura le plus d’effet. Les fanatiques colons israéliens du Sionisme religieux méprisent l’Autorité palestinienne (AP), qu’ils considèrent comme un obstacle à leur conquête de la Cisjordanie.

À l’heure actuelle, l’AP est déjà en crise. L’économie s’effondre et elle perd le contrôle du peuple palestinien. Or l’AP n’a qu’un seul intérêt aux yeux de « Tel Aviv » : la coordination de la sécurité.

La coordination répressive est une façon élégante de dire que les forces de sécurité et de renseignement de l’AP sont utilisées pour arrêter et tuer des Palestiniens et prévenir les attaques de la Résistance contre l’occupation israélienne. C’est pourquoi les régimes israéliens précédents s’efforçaient de maintenir l’AP en vie et de l’aider à justifier sa dérive antidémocratique.

SI L’AP se retrouve isolée sous le nouveau régime israélien, elle aura le choix entre deux options : mettre fin à la coordination répressive et soutenir la résistance armée palestinienne ou s’effondrer complètement. Si l’AP disparait du paysage, l’armée israélienne n’aura plus de renseignements en Cisjordanie, et elle sera obligée de se déployer dans les principaux centres urbains palestiniens.

Cela entraînera probablement une forte recrudescence de la violence et mettra en grand danger à la fois les forces d’occupation israéliennes et les colons illégaux.

Il est également possible que si l’agitation se poursuit dans l’enceinte de la mosquée d’Al-Aqsa, ainsi que dans les lieux saints chrétiens d’Al-Quds, les Israéliens soient confrontés à un soulèvement palestinien de masse et à la résistance militaire de Gaza.

Les citoyens palestiniens des territoires occupés en 1948 pourraient aussi se révolter s’ils étaient dépouillés de leurs derniers droits.

Tout ce qui précède dépend du degré d’irrationalité du comportement de l’alliance du Sionisme religieux et de l’influence qu’elle peut exercer sur les politiques qui seront mises en œuvre par le Premier ministre Netanyahu. Plus un régime israélien est émotionnel et irrationnel, plus il est facile à la résistance palestinienne de le manœuvrer et de lui infliger des défaites stratégiques importantes.

Dans l’immédiat, les souffrances seront immenses si le pire scénario s’avère exact, mais le projet sioniste vient en fait de se tirer une balle dans le pied et on en aura bientôt la preuve.

12 novembre 2022 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet