La « Marche des drapeaux » est la démonstration annuelle du suprématisme juif

Le déferlement raciste anti-arabe et suprématiste juif que connait aujourd'hui la Palestine occupée, crée une vértiable atmosphère de progrom - Photo : Oren Ziv/Activestills

Par Miko Peled

La démonstration annuelle de la suprématie juive en Palestine, connue sous le nom de Marche des drapeaux, ne se limite pas à la vieille ville de Jérusalem. Elle fait partie d’une campagne d’intimidation dans les villes du pays où la population palestinienne est importante. Cette année, cette démonstration de suprématie violente et raciste a eu lieu à Jérusalem, Yafa et El-Lyd.

Graine de Torah

Quoi de plus inoffensif qu’une graine ? Une graine de Torah est une graine qui permet à la Torah de croître et de se répandre. Construire des ponts, relier les gens à leurs anciennes traditions, aider ceux dans le besoin et, d’une manière générale, développer des communautés imprégnées des valeurs de la charité et de la bonne volonté.

C’est le voile derrière lequel la communauté des colons s’implante dans ce que l’on appelle les « villes mixtes ».

Le monde, et la plupart des Juifs israéliens, se focalisent sur les gangs fanatiques et racistes des communautés de colons en Cisjordanie. Cependant, depuis plusieurs décennies, le même mouvement politique et quasi-religieux qui a créé ces affreuses communautés s’installe dans des municipalités connues comme étant des « villes mixtes ».

Parmi celles-ci, Yafa, El-Lyd, Ramle et quelques autres villes à forte population palestinienne.

Leur objectif est double :

  • « Semer la graine de Torah dans les communautés juives, » ou en d’autres termes gagner le cœur et l’esprit des juifs israéliens pauvres, privés de leurs droits, résidant habituellement dans des « villes mixtes ».
  • Terroriser et en fin de compte faire partir les communautés palestiniennes de ces villes pour les rendre pures et juives.

Ceci n’a, bien sûr, rien à voir avec le judaïsme. C’est une autre déclinaison de l’idéologie raciste qui a créé l’État d’Israël et est connue sous le nom de sionisme.

C’est nous les propriétaires

Revendiquer la propriété de la Palestine a toujours été un important argument sioniste. Ce que font les groupes Graines de Torah, c’est défiler dans les quartiers palestiniens pour le faire savoir.

« C’est nous les propriétaires », a-t-on pu entendre Itmar Ben-Gvir proclamer en traversant le sanctuaire sacré d’Al-Aqsa, et c’est ce qu’ils hurlent dans des mégaphones partout dans les quartiers palestiniens, à Yafa, El-Lyd, Ramleh, Hébron, et, bien sûr, Jérusalem.

Ces colons – dont beaucoup de personnes pensent qu’ils sont cantonnés en Cisjordanie – s’approprient les lieux en chassant les Palestiniens. On ne voit plus de camions de soldats expulser les Palestiniens comme en 1948 ou 1967.

En revanche, on voit des gangs de colons armés protégés par la police terroriser les Palestiniens et leur rendre la vie impossible. Parce que ces villes se trouvent à l’intérieur des frontières de la Palestine de 1948, ce n’est pas l’armée qui protège ces criminels mais la police.

Nombres

Afin de revendiquer la propriété de la terre, les sionistes sont, depuis toujours, obsédés par la démographie. Il était clair dès le début que sur ce point ils sont perdants, aussi ils ont trouvé une formule qui donne l’impression qu’il y a une majorité juive et une minorité arabe en « Israël ».

Un autre signe de l’obsession sioniste pour la démographie c’est que l’état d’Israël fait un recensement presque tous les ans – et année après année aussi longtemps que je me souvienne, ils aboutissent au même résultat. Non pas que les chiffres n’augmentent pas, mais le pourcentage des Arabes reste plus ou moins à 20 pour cent de la population totale.

Nous savons que depuis des décennies les Palestiniens représentent bien plus de vingt pour cent, donc comment Israël s’y prend-il ? Eh bien, ce n’est pas de la magie ; ils mentent sur les chiffres, tout simplement. Israël ne compte pas tous les Palestiniens, seulement ceux qui vivent à l’intérieur des frontières d’avant 1967.

En d’autres termes, alors que tous les juifs israéliens, où qu’ils vivent dans le pays sont comptés, seuls les Palestiniens qui vivent en Palestine de 1948 sont pris en compte. Ce qui signifie que l’état d’Israël n’inclut pas dans ses chiffres plus de cinq millions de Palestiniens.

C’est logique si l’on considère que les gouvernements israéliens successifs et la société israélienne plus généralement ne voient aucun lien avec les Palestiniens qui vivent dans les territoires saisis par Israël en 1967.

Alors que les Palestiniens qui sont restés en 1948 sont répertoriés en tant que citoyens, ceux qui viennent s’ajouter par suite de l’occupation de 1967 n’ont aucun statut, et par conséquent, n’existent pas (officiellement).

Deux marches par an

Dans la ville de Yafa, qui fait officiellement partie de la municipalité de Tel Aviv, les colons organisent deux marches des drapeaux par an. L’une le jour de l’Independence d’Israël et l’autre le jour de Jérusalem.

La ville affirme que c’est l’expression de la diversité, tout comme lorsque les Palestiniens organisent une parade de Noël ou un marché du Ramadan. Mais il y a une différence ; aucun des deux évènements que ce soit celui de Noël ou du Ramadan ne donne lieu à un harcèlement de la part de la police militarisée en uniforme et de détectives en civil.

Pendant ces manifestations de racisme et de suprématie, les citoyens palestiniens de la ville ont pour instruction de ne pas se montrer. Ils sont soumis à des fouilles et des arrestations, et confinés dans des zones où ils ne seront pas sur le chemin des gangsters paradant avec des drapeaux de haine.

Dans la ville de El-Lyd, des milliers de colons ont défilé dans la vieille ville, traversé des quartiers et commerces palestiniens, harcelant et terrorisant quiconque se trouvant sur leur chemin.

Au cours des années, El-Lyd a vu certaines des pires violences de la part de gangs de colons, et cette parade de haine et de suprématie a pour objectif de faire savoir aux Palestiniens de la ville que El-Lyd ne leur appartient pas.

En 1948, cette zone a été soumise à des massacres brutaux et des 40 000 citoyens, il n’en est resté que 400. Aujourd’hui la population palestinienne représente entre 30 et 40 pour cent de la population totale.

La Palestine ne se limite pas à la Cisjordanie

Beaucoup de gens font encore référence à la Palestine de 1948 comme étant Israël et à la Cisjordanie comme étant la Palestine.

Toutefois, ces personnes feraient bien de se souvenir que jusqu’en mai 1948, tout ceci était connu sous le nom de Palestine et que les Palestiniens vivent partout dans le pays et subissent la même haine et la même violence indépendamment de leur lieu de résidence, de la carte d’identification qu’ils détiennent, ou du fait qu’ils soient ou non comptabilisés par l’État d’Apartheid.

À titre personnel, si vous lisez cet article, laissez-moi un petit mot ici. Il n’est pas nécessaire qu’il soit long ; un simple bonjour suffit. Si vous avez un commentaire n’hésitez pas à le faire, ou une question à la poser. Je vous remercie.

23 mai 2023 – Mint Press News – Traduction: Chronique de Palestine – MJB