Les Israéliens tuent les Gazaouis qui veulent retourner dans ce qui subsiste de leur «chez eux»

22 septembre 2025 - Des équipes de la défense civile et des habitants extraient un blessé dessous les décombres après que des frappes aériennes israéliennes ont visé une maison appartenant à la famille al-Shawa dans la ville de Gaza. La frappe a provoqué un incendie dans le bâtiment visé et détruit complètement une structure voisine - Photo : Yousef Zaanoun / ActiveStills

Par Tareq S. Hajjaj

Dans le cadre du prétendu « cessez-le-feu », Gaza a été divisée en deux par la « ligne jaune », où l’armée israélienne contrôle un peu plus de 50 % de la bande de Gaza. Des Palestiniens sont assassinés pour avoir tenté de franchir cette ligne ou même de s’en approcher.

Une ligne invisible divise Gaza, et tout Palestinien qui tente de la franchir, ou même de s’en approcher, est tué.

C’est ce qui est arrivé à Ibrahim et Mazen al-Najjar, deux hommes de la même famille, le 5 novembre.

Déplacés dans la région d’al-Mawasi à Khan Younis, ils ont tenté de se rendre à leur domicile dans la partie est de Khan Younis, afin de récupérer quelques effets personnels.

La tâche était assez simple. Le seul problème était que leur maison se trouvait derrière la « ligne jaune », zone de Gaza sous contrôle militaire total d’Israël depuis le « cessez-le-feu » du 10 octobre.

Ibrahim et Mazen ne sont jamais arrivés chez eux et sont retournés dans leur camp de déplacés dans des sacs mortuaires. Ils ont été abattus par des soldats israéliens alors qu’ils tentaient de franchir la ligne.

Les al-Najjar ne sont que quelques-uns des quelque 250 Palestiniens tués par Israël depuis le début du « cessez-le-feu ».

Pour les Israéliens, un cessez-le-feu signifie affamer et tuer

Beaucoup d’entre eux ont été tués dans des circonstances similaires, alors qu’ils tentaient de rentrer chez eux.

Bien que l’accord pour la trêve prévoie le retrait complet d’Israël de Gaza lors de la deuxième phase, celle-ci n’a pas encore commencé. La « ligne jaune » marque la zone qu’Israël contrôle actuellement à Gaza pendant cette période prétendument initiale de « cessez-le-feu ».

Cette ligne divise les quartiers intérieurs de la bande de Gaza en deux parties : l’une où les habitants sont autorisés à se trouver, et l’autre qui leur est interdite. Selon les Palestiniens, toute personne qui s’approche de ces zones est traitée avec une force menaçante.

La ligne jaune est une nouvelle réalité, car elle divise la bande de Gaza en deux parties, la partie orientale étant sous le contrôle de l’armée israélienne. Selon les estimations, il y aurait environ 37 postes et positions militaires israéliens dans ces zones, de Rafah à Beit Hanoun.

La ligne jaune traverse le centre de grands quartiers densément peuplés tels que Shuja’iyya à l’est de la ville de Gaza, Jabalia au nord, et Khan Younis et Rafah au sud, couvrant environ 50 % de la superficie totale de la bande de Gaza.

À l’intérieur des zones situées derrière la ligne jaune – la moitié orientale de Gaza, à la clôture avec Israël – la démolition, la destruction et le bombardement des infrastructures palestiniennes n’ont pas cessé.

Les habitants vivant à l’ouest de la ligne jaune, du côté où les Palestiniens sont autorisés à se trouver, entendent constamment des explosions et des tirs d’artillerie provenant de l’autre côté de la ligne invisible.

Pour les habitants qui attendaient depuis longtemps la fin des attaques israéliennes afin de pouvoir rentrer chez eux, la ligne jaune a été une douloureuse surprise.

Pour beaucoup, elle les sépare de leurs maisons de quelques mètres seulement. Ils restent sur place et contemplent leurs maisons – ou les décombres de leurs maisons dans certains cas – sans pouvoir y retourner.

Dans de nombreux endroits, il n’y a pas de marquage clair indiquant la limite de la ligne. Dans certaines zones, l’armée israélienne a placé des blocs de béton de couleur jaune pour délimiter la ligne jaune.

Certaines familles et certaines personnes, en raison de l’absence de marquage clair indiquant les limites de la ligne jaune – en particulier au cours des premières semaines du cessez-le-feu, lorsque la « ligne jaune » n’était qu’une expression répétée par les occupants et n’était pas physiquement visible –, ont pénétré dans ces zones sans le savoir.

Le massacre de la famille Abu Shaaban, qui a eu lieu le 18 octobre et a coûté la vie à 11 Palestiniens de la même famille qui tentaient de retourner chez eux dans le quartier de Zeitoun situé dans la zone jaune, s’est produit sans qu’ils sachent qu’ils se trouvaient dans une zone interdite.

Par la suite, d’autres tueries ont été commises contre des Palestiniens qui traversaient ou s’approchaient de la ligne jaune.

Ces derniers jours, plus de quatre personnes ont été tuées, les deux dernières étant deux jeunes hommes de la famille al-Najjar. Ils ont été tués dès qu’ils se sont approchés de la zone autour de la ligne jaune, et leurs corps sont restés sur place pendant cinq jours avant que les équipes de secours puissent les atteindre, selon les témoignages recueillis par Mondoweiss.

Des correspondants sur le terrain à Khan Younis ont également confirmé le meurtre d’une femme et de son enfant le 4 novembre alors qu’ils tentaient de franchir la ligne jaune.

Selon la défense civile de la bande de Gaza, entre 30 et 40 personnes ont été tuées alors qu’elles franchissaient cette ligne, et elles ont été abattues immédiatement sans avertissement.

Gaza : l’État génocidaire s’acharne sur un champ de ruines

Mahmoud Basal, porte-parole de la Défense civile, affirme que l’impact de la ligne jaune dans la bande de Gaza est extrêmement grave et dangereux.

« Il n’y a pas de ligne clairement visible qui indiquerait aux habitants qu’ils ont atteint la zone interdite. Après plusieurs meurtres, l’occupant a placé des blocs de béton peints en jaune le long de la ligne, mais la distance entre chaque bloc était si grande qu’une personne pouvait facilement passer entre eux sans se rendre compte qu’elle était entrée dans la zone jaune – et être abattue instantanément. »

« Toute tentative des habitants d’atteindre ou de franchir la ligne est accueillie par la force et le meurtre direct par l’armée israélienne. Rien d’autre que la mort », a déclaré M. Basal.

Il note qu’Israël pourrait traiter différemment ceux qui franchissent la ligne, d’autant plus que la plupart le font par ignorance, « mais il est déterminé à utiliser une force excessive et maximale comme seule réponse envers les Palestiniens ».

« Je peux voir ma maison, mais si je m’en approche, je vais me faire tirer dessus »

Mo’men Sami, âgé 26 ans, habitant du quartier de Shuja’iyya, a tenté à plusieurs reprises de se rendre chez lui, situé à seulement quelques dizaines de mètres à l’intérieur de la ligne jaune.

Il a réussi à y aller une fois, au péril de sa vie. À son arrivée, il a trouvé certains de ses voisins cachés sous les décombres, craignant d’être repérés par les drones. Il a déclaré avoir réussi à s’en sortir indemne, mais avoir dû courir pour sauver sa vie.

« Je suis allé voir ma maison, qui n’est plus qu’un tas de décombres, mais sous lesquels se trouvent encore des vestiges de notre enfance, nos affaires et les objets que nous avons pu conserver », a-t-il raconté.

« Les gens ont hâte de retourner chez eux après avoir attendu si longtemps, pensant que la guerre était finie et que leur exil était terminé, mais ils sont arrêtés dès qu’ils aperçoivent des soldats ou des chars israéliens dans certaines zones. Pourtant, ils continuent d’avancer vers leurs maisons sans hésiter. »

La ligne jaune divise le quartier de Shuja’iyya en deux parties : la partie ouest, qui est très petite, et la partie est, qui est densément peuplée et où les habitants n’ont toujours pas le droit de retourner.

Ceux qui tentent de le faire sont tués.

Il en va de même pour d’autres zones orientales de la bande de Gaza, où la ligne jaune traverse le milieu des quartiers résidentiels densément peuplés de Jabalia. Les habitants s’assoient et regardent leurs maisons de l’autre côté de la ligne, mais la barrière jaune se dresse entre eux.

Zuhdi al-Shouli vit dans une école partiellement détruite dans le camp de Jabalia, à seulement quelques dizaines de mètres de la ligne jaune. Il attend avec impatience qu’elle soit retirée, afin de pouvoir retourner chez lui, qui selon lui, est tout ce qu’il lui reste.

« Je n’ai jamais rien vu de plus douloureux que cela : voir ma maison là-bas, à quelques mètres seulement, mais si je m’en approche, on me tirera dessus », dit-il.

« Je suis assis ici, à l’endroit le plus proche de ma maison. Les soldats me voient, mais je n’ai nulle part où aller, sauf chez moi, ou plutôt dans ses ruines. »

« Je n’ai jamais vu une ligne qui divise le camp de Jabalia en deux de manière aussi douloureuse. Pour nous, la guerre n’est pas terminée. Nous entendons encore chaque nuit les bombardements et les destructions. Nous dormons dans l’obscurité totale, craignant d’être bombardés ou tués. La guerre n’est pas terminée pour nous tant que nous ne pouvons pas retourner chez nous. Nous sommes toujours déplacés, installés à la belle étoile. »

Zuhdi explique que dans la zone où il se trouve, près de la ligne jaune, si quelque chose arrivait à sa famille et aux quelques autres familles à côté de lui dans la même école, les équipes de secours à Gaza ne pourraient même pas traverser leur zone pour leur venir en aide.

« Lorsque nous appelons une organisation pour qu’elle nous fournisse de l’eau, elle nous répond que nous sommes près de la ligne jaune et que c’est une zone dangereuse, et elle ne vient pas », dit-il.

13 novembre 2025 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine

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