18 septembre 2024 - 88 Palestiniens non identifiés sont enterrés dans une fosse commune à Khan Yunis, un jour après que les forces coloniales israéliennes aient rendu les corps, sévèrement décomposés et sans aucune identification. Aucune famille n'a pu les réclamer et il n'y a aucune information sur les circonstances de leur mort. A cette date, la campagne génocidaire israélienne a déjà tué plus de 41 500 Palestiniens à Gaza - principalement des femmes et des enfants - depuis le 7 octobre 2023. Plusieurs milliers de personnes sont encore ensevelies sous les décombres, et le nombre de morts risque d'être encore bien plus élevé - Photo : Doaa Albaz / Activestills
Par Kit Klarenberg
Dans sa dernière enquête, Kit Klarenberg révèle comment « Israël » se trouve au cœur d’un réseau mondial de trafic d’organes, reliant les arrestations récentes, les scandales qui durent depuis des décennies et le génocide de Gaza à un vaste commerce illicite à l’abri de toute responsabilité.
Début octobre, Boris Wolfman, Israélo-Ukrainien, a été arrêté en Russie. Il est accusé d’avoir orchestré un trafic criminel d’organes.
Son arrestation, totalement ignorée par les médias occidentaux, laisse entrevoir la possibilité que justice soit enfin rendue dans plusieurs scandales majeurs de trafic d’organes, qui remontent à de nombreuses années.
L’arrestation de Wolfman met également en évidence le rôle peu connu de Tel-Aviv en tant que centre mondial du prélèvement et du trafic illégal d’organes. Malheureusement, le génocide de Gaza a probablement grandement facilité ce commerce pervers.
Depuis le 7 octobre, des accusations crédibles circulent largement selon lesquelles les forces d’occupation sionistes prélèvent illégalement les organes des Palestiniens tués. En novembre 2023, l’Euro-Med Monitor a publié un rapport documentant la manière dont les soldats israéliens ont confisqué des dizaines de cadavres dans les principaux hôpitaux de Gaza, allant jusqu’à déterrer et piller les fosses communes construites dans leurs enceintes pour accueillir l’afflux incessant de civils massacrés.
Le vol et le trafic d’organes palestiniens par Israël a une longue histoire (video)
Si certains corps ont ensuite été remis à la Croix-Rouge, beaucoup ont été et restent retenus.
Euro-Med Monitor recense le nombre de cadavres présentant des signes évidents de prélèvement d’organes, notamment l’absence de cochlées et de cornées, ainsi que de cœurs, de reins et de foies.
Depuis lors, l’entité sioniste a remis à intervalles irréguliers un nombre symbolique de Palestiniens assassinés à leurs proches survivants. Souvent, les corps sont décomposés au point d’être méconnaissables, ce qui rend difficile, voire impossible, la réalisation d’autopsies professionnelles et l’identification d’un éventuel vol d’organes.
Parfois, les cadavres sont complètement congelés, ce qui complique encore davantage les examens médicaux et peut dissimuler le vol d’organes.
La quatrième Convention de Genève de 1949 impose le respect de la dignité des civils décédés et interdit explicitement le pillage ou la mutilation de leurs corps en temps de guerre. Cependant, l’entité sioniste a non seulement omis de ratifier le traité, mais rejette expressément son applicabilité à Gaza et à la Cisjordanie illégalement occupée.
De plus, des lois locales répugnantes et des précédents juridiques propres à Tel-Aviv accordent aux autorités le pouvoir de refuser de remettre les corps des Palestiniens décédés à leurs familles.
Leurs corps peuvent être utilisés comme de macabres monnaies d’échange, ou leurs organes pillés en toute impunité.
Depuis des décennies, l’entité sioniste est le centre international du commerce illicite d’organes. Alors que les Palestiniens dénoncent depuis longtemps le vol par Tel-Aviv des organes de leurs camarades tombés au combat, ce n’est qu’au début des années 2000 que cette pratique a été officiellement admise.
Yehuda Hiss, directeur de l’Institut Abu Kabir « israélien », s’est ouvertement vanté d’avoir prélevé de la peau, des os et d’autres tissus humains lors d’autopsies. Il n’a jamais été puni, ce qui suggère que ses activités macabres étaient avalisées par l’État.
Cette interprétation est largement renforcée par l’ouvrage publié en 2014 par Meira Weiss, ancienne employée de l’institut, intitulé Over Their Dead Bodies.
Elle révèle comment, pendant la première Intifada de 1987 à 1993, les responsables de la ZOF ont ordonné au centre « de prélever les organes des Palestiniens en invoquant une réglementation militaire stipulant que chaque Palestinien tué devait faire l’objet d’une autopsie ».
Cela leur a donné carte blanche pour prélever tout ce qu’ils voulaient sur les corps dont ils avaient la charge. Les apparatchiks de l’Institut ont qualifié avec nostalgie ces années de « bons jours », car ils pouvaient voler des organes « de manière régulière et libre ».
Il est inquiétant de constater que le bilan catastrophique du génocide de Gaza pourrait marquer le début d’une nouvelle ère de « bons jours » pour le commerce d’organes de l’entité sioniste.
L’arrestation de Wolfman et la révélation sur les combines qu’il supervisait ne devraient pas affecter les opérations de Tel-Aviv sur le terrain. Il n’était qu’un acteur parmi d’autres dans un réseau mondial de trafiquants israéliens.
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À l’instar d’une hydre, le retrait de Wolfman conduira simplement d’autres personnes à prendre sa place. Après tout, les profits sont élevés et les risques restent faibles.
« Courtier en organes »
En juillet 2015, le Parlement européen a publié un rapport historique sur le trafic d’organes.
Dans son introduction, il est indiqué qu’« avant 2000, le problème du trafic d’organes humains […] se limitait principalement au sous-continent indien et à l’Asie du Sud-Est ». Mais le rapport souligne qu’après le tournant du millénaire, « le trafic d’organes semble s’être étendu à l’échelle mondiale, en grande partie sous l’impulsion de médecins israéliens ».
Le document détaillait ensuite plusieurs cas très médiatisés de trafic d’organes.
Dans tous les cas sauf un, les preuves menaient directement à l’entité sioniste. Une carte des routes internationales du commerce d’organes jointe au rapport place Tel-Aviv au centre du réseau, ses citoyens étant à la fois les principaux clients et les chefs des gangs qui fournissent des organes aux acheteurs étrangers.
L’un des cas cités était la révélation en 2003 qu’un grand hôpital sud-africain avait effectué plus de 100 greffes illégales sur des patients étrangers, « la majorité » provenant d’« Israël ».
Les forces de l’ordre locales ont découvert comment un syndicat criminel dirigé par Ilan Perry, un Israélien avec un réseau très large, recrutait des personnes pauvres et désespérées au Brésil, en Roumanie et ailleurs, qui étaient prêtes à vendre leurs organes pour une somme symbolique, puis les transportait en Afrique du Sud.
Les clients payaient des sommes colossales pour les transplantations. Perry, le « courtier en organes », et ses associés empochaient la majeure partie de cette somme, le reste étant versé aux « donneurs » et au personnel hospitalier pour réaliser les opérations illégales, puis garder le silence sur cette connivence.
Un autre cas cité est le scandale de la clinique Medicus à Pristina, au Kosovo. Il a éclaté en octobre 2008, lorsqu’un jeune Turc s’est effondré à l’aéroport de la ville.
Après la découverte d’une cicatrice chirurgicale récente sur son abdomen, il a expliqué que son rein avait été prélevé à la clinique, ce qui a conduit à une descente de police.
Medicus était déjà dans le collimateur des forces de l’ordre locales en raison de l’afflux d’étrangers arrivant à Pristina avec des lettres d’invitation à la clinique pour un traitement cardiaque, que Medicus n’était pas réputée fournir.
Les enquêtes qui ont suivi ont révélé que l’Israélien Moshe Harel et le médecin turc Yusuf Sonmez – connu comme « le trafiquant d’organes le plus célèbre au monde » – étaient responsables du recrutement de la clientèle, qui payait plus de 100 000 dollars pour les transplantations.
Les opérations étaient principalement réalisées par des professionnels de santé albanais locaux du Kosovo. Les patients passaient une courte période en convalescence avant d’être autorisés à sortir, munis d’« informations sur leur traitement à présenter aux médecins de leur pays d’origine ».
Les donneurs ne bénéficiaient pas d’une telle mansuétude.
Comme le souligne le rapport de l’UE, les fournisseurs étaient contraints de signer des documents attestant qu’ils donnaient leurs organes « volontairement à un parent ou de manière altruiste à un étranger ». Ces documents étaient rédigés en albanais et n’étaient pas traduits.
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Dans certains cas, on leur avait promis des rémunérations pouvant atteindre 30 000 dollars, mais « nombre d’entre eux n’ont reçu qu’une partie de la somme, voire rien du tout ». Ceux qui ont reçu une partie de la somme se sont vu promettre le reste « à condition qu’ils recrutent eux-mêmes d’autres ‘donneurs’ ».
« Prix record »
Boris Wolfman était également au cœur de l’affaire Medicus. Bien que recherché dans plusieurs juridictions et faisant l’objet d’une notice rouge d’Interpol, il est resté en liberté en Turquie pendant des années jusqu’à son expulsion récente vers la Russie.
Incroyablement, il a lancé entre-temps une autre entreprise de trafic d’organes, exploitant des Kenyans vulnérables pour de petites sommes d’argent, vendant leurs reins et autres organes à de riches acheteurs allemands et « israéliens » pour un montant pouvant atteindre 200 000 dollars.
Comme au Kosovo, les donneurs n’ont pas reçu l’argent promis, ni bénéficié de soins médicaux appropriés après l’intervention.
Il reste à voir si son procès permettra de faire la lumière sur le vaste réseau criminel dans lequel il opérait, ou si l’entité sioniste pourrait être directement impliquée dans l’entreprise de Wolfman.
Il n’en reste pas moins que le fait qu’il soit jugé est déjà en soi un miracle. Ses complices dans l’horreur Medicus se sont révélés curieusement à l’abri des répercussions juridiques de leurs activités monstrueuses. Sonmez a également vécu librement et ouvertement en Turquie pendant plusieurs années après la découverte du réseau de trafic, malgré les poursuites pénales dont il faisait l’objet dans plusieurs pays.
Les procureurs turcs ont demandé une peine de 171 ans de prison, mais Sonmez n’a jamais purgé un seul jour de prison et semble avoir disparu sans laisser de traces.
Quant à Harel, il a été arrêté par la police israélienne en 2012, puis relâché.
Il a été appréhendé à nouveau à Chypre six ans plus tard sur mandat d’Interpol, mais les demandes d’extradition des autorités kosovares semblent inexplicablement n’avoir donné lieu à aucune suite.
La question de savoir si la liberté dont jouissent toujours ces deux hommes est le signe d’une protection de l’État reste ouverte et évidente.
L’Holocauste du XXIe siècle perpétré par l’entité sioniste à Gaza et les guerres catastrophiquement ratées contre le Hezbollah et l’Iran ont « coûté très cher » à ses finances, a enregistré Focus Economics.
Par exemple, le tourisme, qui était autrefois une composante essentielle des revenus d’« Israël », est passé de millions de visiteurs par an à presque zéro. « Une reprise complète pourrait prendre plusieurs années et dépendra probablement de la fin définitive des hostilités avec le Hamas, le Hezbollah et l’Iran », prévoit le média – ce qui est totalement utopique, étant donné que la Résistance ne peut coexister pacifiquement avec Tel-Aviv.
Pendant ce temps, l’entité sioniste continue de souffrir d’une fuite massive des cerveaux, de la fuite des investisseurs étrangers, de l’isolement diplomatique et d’une énorme baisse de confiance parmi ses plus grands partenaires commerciaux étrangers.
Il est particulièrement écoeurant de constater que le trafic d’organes pourrait représenter l’une des rares sources de profits fiables de Tel-Aviv à ce stade. Avec des milliers de Palestiniens morts et vivants sous sa garde, « Israël » dispose certainement de ressources suffisantes pour alimenter ce commerce.
Le silence des médias grand public sur l’arrestation tant attendue de Wolfman pourrait indiquer que les marionnettistes étrangers de l’entité sont sereins quant à cette perspective.
Auteur : Kit Klarenberg
* Kit Klarenberg est journaliste d'investigation qui soumet à enquête le rôle des services de renseignement dans le modelage de la politique et des campagnes de propagande associées. Collaborateur -entre autres médias - de la chaîne d’information anglophone iranienne Press TV, il vit en Serbie. Son compte Twitter.
15 novembre 2025 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine

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