
Des Palestiniens pleurent les corps de leurs proches tués lors d'une frappe aérienne israélienne dans le quartier d'Al-Saftawi à Jabalia. Le bilan de la guerre génocidaire menée par Israël contre Gaza s'élève désormais à plus de 53 000 morts depuis le 7 octobre 2023 - Photo : Yousef Al-Zanoun / Activestills
Par EuroMed Monitor
Trente-cinq ordres d’évacuation depuis janvier : Israël utilise le déplacement forcé et la famine comme moyens de pression et poursuivra le génocide jusqu’à ce que les Palestiniens qui auront survécu soient expulsés.
L’escalade des déplacements massifs de population à Gaza par Israël reflète la condition posée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu pour un cessez-le-feu : la mise en œuvre du plan du président américain Donald Trump visant à expulser les Palestiniens de la bande de Gaza.
Cela revient à reconnaître explicitement que l’agression américano-israélienne ne vise pas une faction militaire spécifique, mais l’ensemble de la population palestinienne.
Cette escalade confirme que les actions menées par Israël dans l’enclave depuis le 7 octobre 2023, notamment les meurtres, la famine et la destruction, ne sont pas des incidents isolés, mais s’inscrivent dans une politique systématique de génocide.
Ces actions, associées à des déplacements forcés à grande échelle, reflètent un plan politique et militaire délibéré et coordonné visant à dépeupler la bande de Gaza.
Les forces israéliennes ont émis au moins 35 ordres d’évacuation dans la bande de Gaza depuis janvier de cette année, touchant plus d’un million de personnes.
Ces ordres aggravent les dommages causés par ceux émis avant janvier, qui avaient déjà entraîné le déplacement d’une grande partie de la population.
Israël intensifie désormais ses efforts pour confiner les habitants dans une zone étroite le long de la côte sud, ce qui semble être un prélude à leur expulsion de la bande de Gaza, conformément au « plan Trump » récemment adopté par Netanyahou comme condition à la fin des opérations militaires dans l’enclave.
La dernière ordonnance, émise jeudi après-midi, ordonne à tous les habitants de Ghabin, Al-Shimaa, Fadous, Al-Manshiyya, Sheikh Zayed, Al-Salateen, al-Karama, du projet Beit Lahia, Al-Zohour, Tel al-Zaatar, Al-Nour, Abdel Rahman, Al-Nahda et du camp de réfugiés de Jabalia, dans le nord de Gaza, d’évacuer et de se diriger vers le sud.
Cette mesure fait suite à un ordre d’évacuation généralisé touchant la plupart des quartiers de la province de Khan Yunis, qui ordonne aux habitants de se diriger vers l’ouest, vers la région d’Al-Mawasi.
D’autres ordres ont également été émis pour des villes et des quartiers du nord de Gaza et de la ville de Gaza, enjoignant aux habitants de se diriger vers le sud.
Chacun de ces ordres a été émis sans aucune nécessité militaire ni même les prétextes habituels, tels que des tirs de roquettes depuis la zone.
Cela indique qu’Israël ne cherche plus à justifier ses actions auprès de la communauté internationale et que le déplacement lui-même est devenu un objectif déclaré, s’inscrivant dans une politique délibérée de déracinement systématique et constituant un acte de génocide à part entière.
La campagne de déplacement actuelle menée par Israël est la plus grave depuis le début du génocide dans la bande de Gaza, compte tenu notamment de l’ampleur des destructions et des traumatismes accumulés au cours des 19 derniers mois.
Elle coïncide avec une intensification de la politique de famine, la destruction généralisée des maisons et des infrastructures restantes et les déclarations explicites d’Israël quant à son intention de dépeupler des zones entières.
Euro-Med Monitor note qu’Israël utilise la famine comme un moyen de contraindre les civils à se rendre dans des zones désignées pour y recevoir une aide conditionnelle.
La déclaration de Netanyahu énonçant les conditions de la fin de la « guerre », qui approuve explicitement le déplacement des Palestiniens, conformément au plan de Trump, révèle publiquement l’intention d’exterminer tout un peuple et d’expulser les survivants.
Tout cela se déroule dans un silence international quasi total, créant un environnement sûr pour la poursuite des crimes commis par Israël et permettant une impunité choquante.
Des centaines de milliers de civils ont été contraints de fuir leurs maisons sous les bombardements et les tirs israéliens, marchant pendant des kilomètres à pied avec le peu d’affaires qu’ils pouvaient emporter.
Ces civils ont cherché refuge dans des zones telles que Al-Mawasi, dans les gouvernorats de Khan Yunis et de Rafah, qui étaient déjà surpeuplées et ont également fait l’objet d’attaques intensifiées ces derniers mois.
Les récentes incursions dans ces deux zones ont fait des centaines de morts et de blessés, dont beaucoup se réfugiaient dans des tentes.
Dans des conditions humanitaires désastreuses, des milliers de familles ont été contraintes de fuir leurs maisons ou leurs abris sans nourriture, sans eau, sans moyen de transport et sans destination sûre.
En l’absence de couloirs humanitaires et d’abris adéquats, beaucoup ont cherché refuge dans des zones surpeuplées et très exposées, régulièrement prises pour cible par les bombardements israéliens.
Le déplacement lui-même est devenu une menace existentielle constante et une atteinte incessante à la dignité des Palestiniens, car aucun endroit dans la bande de Gaza n’offre une véritable sécurité
Alors qu’Israël a récemment ordonné aux civils de fuir vers Al-Mawasi, affirmant que cette zone était « sûre », l’aviation israélienne a continué à bombarder la région.
Jeudi matin (22 mai), un tir direct sur une tente a tué toute une famille palestinienne : Ashraf Khreish et Sahar Muhammad Khreish, mari et femme, ainsi que leurs deux enfants, Basil et Ahmed. Cette atrocité révèle que les soi-disant zones de sécurité sont en réalité des lieux d’extermination prémédités.
Les ordres d’évacuation, la famine délibérée et la distribution très restrictive de l’aide font partie d’un plan israélien qui avance clairement vers son objectif ultime : le massacre et l’expulsion des Palestiniens restants de la bande de Gaza.
Au cours des 19 derniers mois et deux semaines de génocide, au moins 175 000 civils ont été tués ou blessés, des villes entières ont été détruites, les infrastructures ont été presque entièrement détruites et des déplacements internes systématiques ont été organisés, dans le but d’effacer l’existence du peuple palestinien dans son ensemble.
Le déplacement forcé des Palestiniens est le prolongement direct du projet colonial israélien mené depuis des décennies, qui vise à effacer l’existence des Palestiniens et à s’emparer de leurs terres.
Ce qui distingue cette phase, c’est son ampleur et sa gravité sans précédent, illustrées par le ciblage systématique des 2,3 millions d’habitants de la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023, par le biais d’un génocide et du déni des droits humains les plus fondamentaux.
Les conditions d’extrême coercition et de privation imposées au peuple palestinien constituent une tentative délibérée de le chasser de sa patrie, non par choix, mais comme condition de sa survie même. Il s’agit là d’un des cas les plus flagrants de déplacement massif planifié de l’histoire moderne
Tous les États, individuellement et collectivement, doivent s’acquitter de leurs responsabilités juridiques en prenant des mesures urgentes pour mettre fin au génocide dans la bande de Gaza, en mettant en œuvre des mesures efficaces pour protéger les civils palestiniens, en veillant au respect par Israël du droit international et des décisions de la Cour internationale de justice, en empêchant la mise en œuvre du plan de déplacement forcé américain-israélien et en tenant Israël et ses alliés les plus puissants responsables de tous les crimes commis contre les Palestiniens dans la bande de Gaza.
La Cour pénale internationale doit exécuter les mandats d’arrêt contre le Premier ministre et le ministre de la Défense israéliens dans les plus brefs délais, conformément au principe selon lequel il n’y a pas d’immunité pour les crimes internationaux.
La communauté internationale doit également imposer des sanctions économiques, diplomatiques et militaires à Israël pour ses violations systématiques et graves du droit international.
Ces sanctions devraient inclure un embargo sur les armes, la fin de tout soutien politique, financier et militaire, le gel des avoirs des responsables impliqués dans des crimes contre les Palestiniens, l’interdiction de voyager pour ces responsables, la suspension des activités des entreprises militaires et de sécurité israéliennes sur les marchés internationaux, l’interdiction d’accès au système SWIFT pour les entreprises impliquées et la suspension des privilèges commerciaux et des accords bilatéraux qui procurent à Israël des avantages économiques lui permettant de poursuivre ses crimes.
Les pays dotés de tribunaux à compétence universelle doivent délivrer des mandats d’arrêt à l’encontre des dirigeants politiques et militaires israéliens impliqués dans le génocide en cours et engager des poursuites judiciaires, même en l’absence des accusés, afin de remplir leur obligation juridique internationale de poursuivre les crimes graves et de lutter contre l’impunité.
Auteur : EuroMed Monitor
* L'Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l'Homme est une organisation indépendante à but non lucratif dirigée par des jeunes qui défend les droits humains de toutes les personnes à travers l'Europe et la région MENA, en particulier celles qui vivent sous occupation, en proie à la guerre ou à des troubles politiques et/ou ont été déplacés en raison de persécutions ou de conflits armés.
24 mai 2025 – EuroMed Monitor – Traduction : Chronique de Palestine
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