Dans l’attaque de l’Inde contre le Pakistan, on retrouve le savoir-faire israélien

7 mai 2025 - Après une frappe indienne en territoire pakistanais - Photo : Réseaux sociaux

Par Maah-Noor Ali

L’attaque indienne du 6 mai contre le Pakistan montre que l’inaction du monde face au génocide de Gaza a incité Narendra Modi à l’escalade au Cachemire. De New Delhi à Tel Aviv, l’affinité idéologique entre le sionisme et l’hindutva n’a jamais été aussi claire.

Le monde regarde ailleurs pendant que les bombes pleuvent sur Gaza mais un autre projet colonial de peuplement prend des notes. De New Delhi à Tel Aviv, l’affinité idéologique entre le sionisme israélien et le mouvement hindutva indien n’a jamais été aussi évidente qu’en ce moment où l’Inde frappe le Pakistan.

Et comme quasiment personne dans le monde ne demande des comptes aux responsables israéliens du génocide en cours à Gaza, le Premier ministre indien Narendra Modi a toutes les raisons de croire qu’il peut lui aussi intensifier son projet ethno-nationaliste en toute impunité.

Lorsqu’Israël bombarde un hôpital, le monde se demande si le Hamas se cachait en dessous. Lorsque l’Inde bombarde une mosquée, il hausse les épaules – n’était-ce pas probablement une « cachette de terroristes » ?

Le fait que la communauté internationale ait toléré qu’Israël largue des bombes fabriquées aux États-Unis sur des camps de réfugiés a créé un précédent effrayant pour d’autres gouvernements qui pourraient commettre des atrocités en bénéficiant du même blanc-seing.

L’Inde a compris cela.

Cette semaine, cette prise de conscience s’est concrétisée par des actes de violences. Le 6 mai, l’Inde a lancé des frappes de missiles sur le Pakistan sous la bannière de l’Opération Sindoor, un nom qui a de profondes connotations culturelles hindoues.

Importer le modèle israélien au Cachemire

Le gouvernement indien a affirmé qu’il s’agissait d’attaques de précision contre des « infrastructures terroristes », en réponse à l’attentat perpétré le 22 avril dans la ville de Pahalgam, dans la partie du Cachemire administrée par l’Inde, qui a coûté la vie à 26 touristes hindous.

Pourtant, aucune preuve concrète n’a permis d’établir un lien entre cette attaque et le Pakistan. Mais cela n’a pas d’importance. Les faits n’ont pas besoin d’être vérifiés lorsque l’objectif est de montrer sa puissance et d’imposer sa domination.

Neuf cibles ont été frappées au Pakistan et dans le Cachemire administré par le Pakistan. À Bahawalpur, un missile a touché une mosquée. Un enfant et sept autres personnes ont été tués. Trente et un hommes et femmes ont été blessés jusqu’à présent. Des civils sont morts, des familles endeuillées n’ont plus de toit et le gouvernement indien s’est hâté de qualifier l’opération de « mesurée ».

Mais nous avons déjà entendu ce mot. C’est le même langage aseptisé utilisé chaque fois qu’Israël détruit une école à Rafah ou bombarde un hôpital à Khan Younis. Chirurgical, précis, justifié. Le langage soigneusement construit de la guerre coloniale.

La solidarité entre le sionisme et l’hindutva n’est pas symbolique. Elle est concrète. L’Inde est aujourd’hui l’un des plus gros acheteurs d’armes d’Israël.

Les systèmes de surveillance perfectionnés en Cisjordanie surveillent désormais les quartiers du Cachemire. Les drones israéliens qui terrorisent le ciel de Gaza sont vendus à l’Inde pour surveiller les régions à majorité musulmane.

Les échanges ne portent pas seulement sur les armes, mais aussi sur l’idéologie, la stratégie et l’impunité.

En 2019, lorsque Modi a révoqué l’article 370 et privé le Jammu-et-Cachemire de son autonomie limitée, il s’agissait d’une affirmation claire de ses intentions coloniales.

Des dizaines de milliers de soldats supplémentaires ont été déployés. Les communications ont été coupées. Les journalistes ont été bâillonnés. La région a été verrouillée pendant que l’Inde commençait à jeter les bases juridiques et infrastructurelles d’un changement démographique. Le modèle ? La colonisation continue de la Cisjordanie par Israël.

Aujourd’hui, alors que Gaza est réduite en ruines et en cendres, le Cachemire est sur ses gardes. Tout comme le reste du sous-continent.

Car il ne s’agit pas seulement du Cachemire. Il s’agit d’un projet plus large d’expansion de la suprématie hindoue dans toute l’Inde – un projet dans lequel les chrétiens, les dalits, les sikhs et en particulier les musulmans sont considérés comme des obstacles à une identité nationaliste pure.

Et tout comme le sionisme, l’Hindutva se présente comme ancien, sacré et fondamentalement pacifique, de sorte que toute résistance peut être qualifiée d’extrémisme.

Nous l’avons encore vu cette semaine. L’attaque de Pahalgam, bien que tragique, a été immédiatement utilisée pour justifier la violence transfrontalière. Pas d’enquête approfondie. Pas de place pour le doute. Pas d’obligation de répondre de ses actes.

C’est la version de Modi du manuel de la Hasbara : inonder les médias de déclarations vertueuses et laisser les bombes faire le reste.

Les victimes, qu’elles soient à Gaza, à Bahawalpur ou à Srinagar, sont toujours considérées comme des menaces pour la pacification forcée. Leur deuil est considéré comme radical. Leur survie, gênante. Et leur mort, souvent méritée.

Israël est comme « cul et chemise » avec le régime ultra-nationaliste hindou

Mais les gouvernements ne sont pas les seuls en cause. Sans le soutien passif du monde, ils ne pourraient pas faire ce qu’ils font.

Ce qui a enhardi Netanyahu a également enhardi Modi : le silence des soi-disant démocraties libérales, l’inquiétude verbale des Nations unies et le refus des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Europe d’imposer des sanctions ou de réduire les aides financières et autres.

Les dirigeants autoritaires ont appris la leçon : si vous nous êtes utiles, si vous prononcez les mots qu’il faut sur le terrorisme, vous pouvez vous en sortir avec n’importe quoi.

Modi regarde Gaza brûler. Et il ne se contente pas de regarder : il apprend, teste et s’entraîne.

Aujourd’hui, c’était Bahawalpur. Demain, ce sera peut-être Lahore. Ou peut-être ailleurs. Mais le message a été bien reçu : le monde n’interviendra pas.

Alors que les Palestiniens résistent à un siège génocidaire et que les Cachemiriens luttent contre une occupation militarisée, notre solidarité doit être éclatante, intersectorielle et inconditionnelle. Nous devons mettre en lumière la vraie nature de ces idéologies.

Il s’agit de colonialisme de peuplement, de fascisme et d’apartheid. Nous devons cesser de prétendre qu’il s’agit de luttes différentes. Ce n’est pas le cas.

Ce sont des chapitres d’une même histoire mondiale. Et Modi est en train d’écrire son prochain chapitre à l’encre israélienne.

7 mai 2025 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine

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