L’industrie florissante du génocide

Des Palestiniens, transportant le peu d'effets personnels qui leur reste, tentent de fuir vers des zones plus sûres pour échapper aux attaques israéliennes contre le camp de réfugiés de Jabalia, à Jabalia, dans la bande de Gaza, le 30 mai 2025 - Photo : Ahmed Jihad Ibrahim Al-arini – Agence Anadolu

Par Jonathan Ofir

Un nouveau rapport de la rapporteuse spéciale de l’ONU Francesca Albanese dévoile le nom des entités qui tirent profit du génocide perpétré par Israël à Gaza.

La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, Francesca Albanese, a publié le 30 juin un rapport fondateur intitulé « De l’économie de l’occupation à l’économie du génocide ».

Ce rapport se concentre sur les entités économiques qui tirent profit du génocide actuel à Gaza.

Bien que le rapport lui-même cite de nombreux noms, allant des États aux entreprises, en passant par les banques et les universités, Mme Albanese conclut que « les entités mentionnées dans le présent rapport ne constituent qu’une fraction d’une structure beaucoup plus profonde d’implication des structures marchandes, qui facilitent les violations et les crimes commis dans les territoires palestiniens occupés parce qu’ils en tirent profit ».

Ce rapport fait suite à deux autres rapports importants publiés par Albanese l’année dernière : « Anatomie d’un génocide » en mars 2024 et « Le génocide comme méthode coloniale d’effacement » en octobre 2024. Dans ce dernier, Albanese a montré comment Israël étend son génocide de Gaza à la Cisjordanie.

Selon elle, il existe trois éléments principaux dans la prise de contrôle colonialiste d’Israël : le déplacement, le remplacement et l’effacement. Le génocide est la forme la plus extrême d’effacement, mais il répond à une logique d’élimination plus large qui s’inscrit dans le cadre d’un plan plus vaste d’« effacement colonial ».

Compte tenu de son mandat sur les territoires occupés depuis 1967, c’est là qu’Albanese concentre son analyse. L’occupation israélienne depuis 1967 a bénéficié d’un large soutien économique, en particulier de la part du monde des affaires, et ces acteurs ont pour la plupart continué à apporter leur soutien alors qu’Israël passait à la phase suivante de l’effacement colonial : le génocide.

Ce rapport vise à montrer comment des entreprises ont permis le déplacement, le remplacement et l’effacement de la vie palestinienne, en exposant « l’intégration des économies de l’occupation coloniale et du génocide ». Le rapport se termine par un appel à l’action émouvant. Selon les termes d’Albanese, « les activités commerciales qui permettent et tirent profit de l’anéantissement de la vie de personnes innocentes doivent cesser. Les entreprises doivent refuser de se faire complices de violations des droits humains et de crimes internationaux, faute de quoi elles auront à rendre des comptes ».

Déplacement forcé

Les acteurs économiques qui facilitent le déplacement sont principalement des entreprises impliquées dans les équipements lourds, les armes et la surveillance technologique. Il existe une multitude d’acteurs qui interviennent soit directement soit par l’intermédiaire de filiales.

Caterpillar, par exemple, est un cas bien connu en raison de sa collaboration étroite avec les fabricants d’armes et l’armée israéliens :

« Depuis des décennies, Caterpillar Inc. fournit à Israël des équipements utilisés pour démolir les maisons et les infrastructures palestiniennes, à la fois dans le cadre du programme américain de financement militaire étranger et d’une licence exclusive dont la réquisition par l’armée a été sanctionnée par la loi israélienne. En partenariat avec des entreprises telles qu’Israel Aerospace Industries, Elbit Systems et RADA Electronic Industries, propriété de Leonardo DRS, Inc., Israël a transformé le bulldozer D9 de Caterpillar en une arme militaire automatisée et télécommandée, déployée dans presque toutes les activités militaires depuis 2000, pour dégager les lignes d’incursion, « neutraliser » le territoire et tuer des Palestiniens. »

Cela a placé Caterpillar au centre du génocide à Gaza :

« Depuis octobre 2023, il est prouvé que les équipements Caterpillar ont été utilisés pour mener des démolitions massives, notamment de maisons, de mosquées et d’infrastructures vitales, pour attaquer des hôpitaux et pour enterrer vivants des Palestiniens blessés. En 2025, Caterpillar a obtenu un nouveau contrat de plusieurs millions de dollars avec Israël. »

Mais il existe de nombreux autres exemples dans ce secteur :

« La société coréenne HD Hyundai et sa filiale partielle Doosan, ainsi que le groupe suédois Volvo et d’autres grands fabricants de machines lourdes, sont depuis longtemps liés à la destruction de biens palestiniens, chacun fournissant des équipements par l’intermédiaire de concessionnaires israéliens sous licence exclusive. Le concessionnaire de Volvo est une société répertoriée dans la base de données du HCDH [la base de données des Nations unies répertorie les entreprises qui ont « directement et indirectement permis, facilité et tiré profit de la construction et de l’expansion des colonies »] et ensemble, ils possèdent Merkavim Transportation Technologies Ltd., qui produit les bus blindés qui desservent les colonies. Depuis au moins 2007, les machines Volvo sont utilisées pour raser des zones palestiniennes, notamment à Jérusalem-Est et à Masafer Yatta. Depuis plus d’une décennie, les machines HD Hyundai sont utilisées pour démolir des maisons palestiniennes et raser des terres agricoles, notamment des oliveraies. »

Et ces machines deviennent des outils de génocide

« Après octobre 2023, Israël a intensifié l’utilisation des équipements de ces entreprises dans la destruction urbaine de Gaza, notamment pour raser Rafah et Jabalia, après quoi l’armée a effacé leurs logos. »

La surveillance technologique militaire est un élément important du déplacement de populations auquel se livre le régime colonialiste israélien. Des entreprises israéliennes telles que NSO Group ont développé un marché mondial pour leurs technologies de surveillance, mais le rapport cite également plusieurs sociétés internationales bien connues et décrit leur rôle dans le soutien du déplacement des Palestiniens. Il s’agit notamment d’IBM, Hewlett-Packard, Microsoft, Google, Amazon et Palantir.

Une fois qu’Israël a déplacé les Palestiniens, un large éventail d’entreprises travaille à la consolidation de son contrôle par la création et le maintien de colonies israéliennes : construction, matières premières (souvent pillées dans les territoires occupés), agro-industrie, tourisme, etc. Ici aussi, de nombreux acteurs internationaux facilitent la normalisation du déplacement des populations et du vol des terres par Israël :

« Plus de 371 colonies et avant-postes illégaux ont été construits, alimentés et commercialisés par des entreprises facilitant le remplacement par Israël de la population autochtone dans les territoires palestiniens occupés. En 2024, ce phénomène s’est intensifié après que l’administration des colonies est passée du gouvernement militaire au gouvernement civil et que le budget du ministère de la Construction et du Logement a doublé, avec 200 millions de dollars alloués à la construction de colonies. De novembre 2023 à octobre 2024, Israël a établi 57 nouvelles colonies et avant-postes, avec des entreprises israéliennes et internationales fournissant des machines, des matières premières et un soutien logistique ».

Alors que les mêmes fournisseurs de machines lourdes réapparaissent (Caterpillar, HD Hyundai, Volvo), d’autres acteurs fournissent des matières premières :

« La société allemande Heidelberg Materials AG, par l’intermédiaire de sa filiale Hanson Israel, a contribué au pillage de millions de tonnes de roche dolomitique dans la carrière de Nahal Raba, sur des terres saisies à des villages palestiniens en Cisjordanie. En 2018, Hanson Israel a remporté un appel d’offres public pour fournir des matériaux provenant de cette carrière pour la construction de colonies, et a depuis presque épuisé la carrière, ce qui a donné lieu à des demandes d’extension continues. »

Transports

« Diverses entreprises ont contribué au développement des routes et des infrastructures de transport public indispensables à la création et à l’expansion des colonies, ainsi qu’à leur connexion avec Israël, tout en excluant et en ségréguant les Palestiniens. L’entreprise espagnole/basque Construcciones Auxiliar de Ferrocarriles s’est associée à un consortium comprenant une entreprise répertoriée dans la base de données du HCDH pour entretenir et étendre la Ligne rouge du tramway de Jérusalem et construire la nouvelle Ligne verte, à un moment où d’autres entreprises s’étaient retirées en raison de la pression internationale. Ces lignes comprennent 27 kilomètres de nouvelles voies et 50 nouvelles stations en Cisjordanie, reliant les colonies à Jérusalem-Ouest. Des excavatrices et des machines Doosan et Volvo ont été utilisées, et la filiale de Heidelberg a fourni des matériaux pour un pont pour le tramway. »

Immobilier

« Les sociétés immobilières vendent des propriétés dans les colonies à des acheteurs israéliens et internationaux. Le groupe immobilier mondial Keller Williams Realty LLC, par l’intermédiaire de sa franchise israélienne KW Israel, possède des succursales dans les colonies. En mars 2024, Keller Williams, par l’i’termédiaire d’u’e autre franchise, Home in Israel, a organisé une tournée de présentation immobilière au Canada et aux États-Unis, parrainée conjointement par plusieurs sociétés qui gèrent et commercialisent des milliers d’a’partements dans les colonies. »

Et puisqu’il y a le « tourisme d’occupation », qui fait intervenir les services en ligne Booking.com et Airbnb :

« Les grandes plateformes de voyage en ligne, utilisées par des millions de personnes pour réserver un hébergement, tirent profit de l’occupation en vendant un tourisme qui soutient les colonies, exclut les Palestiniens, promeut le discours des colons et légitime l’annexion. Booking Holdings Inc. et Airbnb, Inc. répertorient des propriétés et des chambres d’hôtel dans les colonies israéliennes. Booking.com a plus que doublé ses annonces en Cisjordanie – passant de 26 en 2018 à 70 en mai 2023 – et triplé ses annonces à Jérusalem-Est pour atteindre 39 au cours de l’année suivant octobre 2023. Airbnb a également amplifié son profit colonial, passant de 139 annonces en 2016 à 350 en 2025, et percevant jusqu’à’23 % de commission. Ces annonces sont liées à la restriction de l’accès des Palestiniens à la terre et mettent en danger les villages voisins. À Tekoa, Airbnb permet aux colons de promouvoir une « communauté chaleureuse et aimante », en blanchissant la violence des colons contre le village palestinien voisin de Tuqu‘ ».

Les facilitateurs

Il existe tout un réseau interconnecté d’entreprises, d’institutions et d’intérêts qui s’entremêlent pour soutenir l’occupation israélienne et en tirer profit. Ces entités facilitent toutes l’illégalité d’Israël, et Albanese les classe par secteur.

Banque et assurance

Les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité sont généralement une activité risquée. Investir dans un pays aussi controversé est contre-intuitif pour beaucoup, et de nombreux investisseurs se sont retirés de l’industrie high-tech, par exemple. C’est pourquoi les géants financiers sont importants pour garantir que les investissements continuent à affluer dans la machine de guerre.

Albanese explique comment les plus grandes banques du monde couvrent financièrement Israël pendant qu’il commet un génocide :

« Certaines des plus grandes banques mondiales, dont BNP Paribas et Barclays, sont intervenues pour renforcer la confiance des marchés en garantissant ces obligations d’État internationales et nationales, permettant ainsi à Israël de contenir le montant des intérêts, malgré une dégradation de sa note de crédit. Les sociétés de gestion d’actifs, notamment Blackrock (68 millions de dollars), Vanguard (546 millions de dollars) et la filiale de gestion d’actifs d’Allianz, PIMCO (960 millions de dollars), figuraient parmi les quelque 400 investisseurs de 36 pays qui les ont achetées. Par ailleurs, la Development Corporation for Israel (c’est-à-dire Israel Bonds) fournit un service de sollicitation d’obligations pour le gouvernement israélien auprès de particuliers étrangers et d’autres investisseurs. La Development Corporation for Israel a triplé ses ventes annuelles d’obligations pour injecter près de 5 milliards de dollars en Israël depuis octobre 2023, tout en offrant aux investisseurs la possibilité d’offrir le rendement de leurs investissements obligataires à des organisations caritatives soutenant l’armée israélienne et les colonies. »

Les compagnies d’assurance renforcent ensuite cette tendance :

« Les compagnies d’assurance mondiales, notamment [l’allemande] Allianz et AXA, investissent également des sommes importantes dans des actions et des obligations impliquées dans l’occupation et le génocide, en partie comme réserves de capital pour les sinistres des assurés et les exigences réglementaires, mais principalement pour générer des rendements. Allianz détient au moins 7,3 milliards de dollars et AXA, malgré certaines décisions de désinvestissement, investit toujours au moins 4,09 milliards de dollars dans les entreprises répertoriées dans le présent rapport. Leurs polices d’assurance couvrent également les risques que d’autres entreprises prennent nécessairement lorsqu’elles opèrent en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, ce qui leur permet de violer des droits humains en « limitant les risques » que ces violations leur font encourir ».

Les fonds de pension sont également impliqués dans ce processus, notamment les fonds norvégiens et canadiens :

« Les fonds souverains et les fonds de pension sont également des bailleurs de fonds importants. Le plus grand fonds souverain au monde, le Fonds de pension du gouvernement norvégien, affirme respecter les règles éthiques les plus exigeantes au monde. Après octobre 2023, le Fonds a augmenté ses investissements dans les entreprises israéliennes de 32 %, pour atteindre 1,9 milliard de dollars. À la fin de 2024, le fonds avait investi 121,5 milliards de dollars, soit 6,9 % de sa valeur totale, dans les entreprises mentionnées dans le présent rapport. La Caisse de dépôt et placement du Québec, qui gère 473,3 milliards de dollars canadiens (328,9 milliards de dollars américains) de fonds de pension pour six millions de Canadiens, a investi près de 9,6 milliards de dollars canadiens (6,67 milliards de dollars américains) dans les entreprises citées dans le présent rapport, malgré sa politique d’investissement durable et sa politique en matière de droits humains. De 2023 à 2024, elle a presque triplé ses investissements dans Lockheed Martin, quadruplé ses investissements dans Caterpillar et multiplié par dix ses investissements dans HD Hyundai. »

Le monde universitaire

Mais les facilitateurs ne sont pas seulement les institutions financières. Albanese montre comment le monde universitaire a également joué un rôle crucial.

Les institutions universitaires les plus prestigieuses sont liées à Israël. Comme le Massachusetts Institute of Technology (MIT) :

« Les grandes universités, en particulier celles du sud global, s’associent à des institutions israéliennes dans des domaines qui nuisent directement aux Palestiniens. Au Massachusetts Institute of Technology, des laboratoires mènent des recherches sur les armes et la surveillance financées par le ministère israélien de la Défense, le seul financement militaire étranger de la recherche à l’institut. Parmi les projets notables du ministère israélien de la Défense figurent le contrôle des essaims de drones – une caractéristique notable de l’assaut israélien sur Gaza depuis octobre 2023 –, les algorithmes de poursuite et la surveillance sous-marine. De 2019 à 2024, l’institut a géré un fonds d’amorçage de Lockheed Martin mettant en relation des étudiants avec des équipes en Israël. De 2017 à 2025, Elbit Systems a financé l’adhésion au programme de liaison industrielle de l’institut, permettant ainsi l’accès à la recherche et aux talents. »

D’énormes projets universitaires européens sont impliqués :

« Le programme Horizon Europe de la Commission européenne facilite activement la collaboration avec des institutions israéliennes, y compris celles qui sont complices d’apartheid et de génocide. Depuis 2014, la Commission européenne a accordé plus de 2,12 milliards d’euros (2,4 milliards de dollars) à des entités israéliennes, dont le ministère de la Défense, tandis que les institutions universitaires européennes profitent de cette implication et la renforcent. L’université technique de Munich reçoit 198,5 millions d’euros (218 millions de dollars) de financement Horizon de la CE, dont 11,47 millions d’euros (12,6 millions de dollars) pour 22 collaborations avec des partenaires israéliens, des entreprises militaires et technologiques. L’université et Israel Aerospace Industries reçoivent 792 795,75 euros (868 416 dollars) pour développer conjointement, avec d’autres participants, une technologie de ravitaillement en hydrogène vert applicable aux drones militaires d’Israel Aerospace Industries utilisés à Gaza. L’université s’associe à IBM Israël – qui gère le registre discriminatoire de la population israélienne – pour développer des systèmes de cloud computing et d’intelligence artificielle, dans le cadre du financement Horizon de 7,75 millions d’euros (8,52 millions de dollars) reçu par IBM Israël. L’université collabore également à un projet de 10,76 millions d’euros (11,71 millions de dollars) sur la « mobilité urbaine sans rupture », qui inclut la municipalité de Jérusalem, une ville qui renforce l’annexion par le biais des transports urbain ».

Agro-industrie

L’agro-industrie a souvent été considérée comme une marque de fabrique de l’innovation israélienne, mais elle est inextricablement liée à l’occupation israélienne. « L’agro-industrie s’est développée grâce à l’extractivisme et à l’accaparement des terres israéliens, produisant des biens et des technologies pour les colons israéliens, ce qui renforce sa domination sur le marché et attire des investissements mondiaux -tout en détruisant les systèmes alimentaires palestiniens et en accélérant leur déplacement », écrit Albanese.

Elle cite le géant alimentaire israélien Tnuva et le géant de l’irrigation Netafim :

« Tnuva, le plus grand conglomérat alimentaire d’Israël, désormais détenu majoritairement par la société chinoise Bright Food (Group) Co., Ltd., a alimenté et tiré profit du vol des terres. Le président de Tnuva a reconnu que « l’agriculture… en général et l’élevage laitier en particulier constituent une ressource stratégique et un pilier important de l’entreprise de colonisation ». Israël a utilisé les kibboutzim et les avant-postes agricoles pour s’emparer des terres palestiniennes et en chasser les Palestiniens. Des entreprises comme Tnuva contribuent à cette situation en s’approvisionnant auprès de ces colonies de peuplement, puis en exploitant le marché palestinien captif pour asseoir leur domination sur le marché… Netafim, leader mondial de la technologie d’irrigation goutte à goutte, désormais détenu à 80 % par la société mexicaine Orbia Advance Corporation, a conçu sa technologie agricole en accord avec les impératifs d’expansion d’Israël. Tout en conservant une image mondiale de durabilité, la technologie Netafim a permis une exploitation intensive de l’eau et des terres en Cisjordanie, épuisant davantage les ressources naturelles palestiniennes, tout en se perfectionnant grâce à la collaboration avec des entreprises israéliennes de technologie militaire. Dans la vallée du Jourdain, les systèmes d’irrigation soutenus par Netafim ont facilité l’expansion des cultures israéliennes, tandis que les agriculteurs palestiniens – privés d’eau et disposant de 93 % de terres non irriguées – sont évincés, incapables de rivaliser avec la production israélienne. De plus, ces techniques d’irrigation menacent d’épuiser le Jourdain et la mer Morte. »

Logistique

Les géants du transport maritime comme le danois Mærsk expédient ensuite les marchandises :

« Les géants mondiaux de la logistique comme A.P. Moller – Maersk A/S font partie intégrante de ce système ; depuis des années, ils expédient des marchandises provenant des colonies et des entreprises répertoriées dans la base de données du HCDH directement vers les États-Unis et d’autres marchés. »

Et Mærsk ne se contente pas de transporter des avocats :

« Des compagnies maritimes telles que la danoise A.P. Moller – Maersk A/S transportent des composants, des pièces détachées, des armes et des matières premières, assurant ainsi un flux constant d’équipements militaires fournis par les États-Unis après octobre 2023. »

Énergie

Ceux qui fournissent de l’énergie à Israël participent inévitablement à ce que fait Israël, non seulement sa colonisation, mais aussi son génocide. De nombreux acteurs mondiaux sont impliqués ici :

« Le charbon destiné à produire de l’électricité pour Israël provient principalement de Colombie (60 % des importations de charbon israéliennes en 2023-24) ; la société Drummond Company, Inc., dont le siège est aux États-Unis, et la société suisse Glencore PLC sont les principaux fournisseurs. Leurs filiales respectives possèdent les mines et les trois ports impliqués dans la livraison de 15 cargaisons de charbon à Israël depuis octobre 2023, dont six cargaisons après la suspension des exportations de charbon vers Israël par la Colombie en août 2024. Glencore a également participé à des expéditions depuis l’Afrique du Sud ; ces expéditions ont représenté 15 % des importations de charbon israéliennes en 2023 et 2024. »

Cela se produit alors qu’Israël pille les ressources naturelles palestiniennes :

« La société américaine Chevron Corporation, en consortium avec la société israélienne NewMed Energy (une filiale du groupe Delek, répertorié dans la base de données du HCDH), extrait du gaz naturel des gisements de Leviathan et de Tamar ; elle a versé au gouvernement israélien 453 millions de dollars en redevances et taxes en 2023. Le consortium de Chevron fournit plus de 70 % de la consommation énergétique israélienne. Chevron tire également profit de sa participation dans le gazoduc East Mediterranean Gas, qui traverse le territoire maritime palestinien, et des ventes d’exportation de gaz vers l’Égypte et la Jordanie. Le blocus naval de Gaza est lié à la sécurisation par Israël de l’approvisionnement en gaz de Tamar et du gazoduc East Mediterranean Gas. À une époque où la brutalité s’intensifie, la société britannique BP PLC renforce son implication dans l’économie israélienne, avec des licences d’exploration confirmées en mars 2025, qui permettent à BP d’explorer les étendues maritimes palestiniennes illégalement exploitées par Israël. »

Tout cela va bien au-delà de l’industrie militaire.

Si tous ces secteurs industriels contribuent et facilitent d’une manière ou d’une autre l’occupation israélienne, il ne faut pas oublier que l’industrie militaire et l’industrie de l’armement israéliennes sont les principaux vecteurs et bénéficiaires de l’agression militaire et du génocide perpétrés par Israël.

Albanese consacre naturellement une section au secteur militaire, intitulée « Secteur militaire – le commerce de l’élimination », qui montre comment l’industrie militaire sert des intérêts économiques nationaux et internationaux majeurs.

Albanese explique :

« Le complexe militaro-industriel est devenu le pilier économique de l’État. Entre 2020 et 2024, Israël était le huitième exportateur d’armes au monde. Les deux plus grandes entreprises d’armement israéliennes – Elbit Systems, créée sous forme de partenariat public-privé puis privatisée, et Israel Aerospace Industries, détenue par l’État – figurent parmi les 50 premiers fabricants d’armes au monde. »

Et il y a la coopération avec les États-Unis, qui a abouti au programme d’avions F-35, un effort international de grande envergure :

« Israël bénéficie du plus grand programme d’achat d’équipements de défense jamais mis en place – pour l’avion de combat F-35 – dirigé par la société américaine Lockheed Martin, aux côtés d’au moins 1 650 autres entreprises, dont le fabricant italien Leonardo S.p.A, et huit États… Après octobre 2023, les F-35 et les F-16 ont joué un rôle essentiel dans l’équipement d’Israël en lui donnant une puissance aérienne sans précédent, qui lui a permis de larguer environ 85 000 tonnes de bombes, dont la plupart non guidées, tuant et blessant plus de 179 411 Palestiniens et détruisant Gaza. »

Il y a aussi les drones Elbit, qui sont également le fruit d’une collaboration internationale :

« Des fournisseurs tels que la société japonaise FANUC Corporation fournissent des machines robotisées pour les chaînes de production d’armes, notamment à Israel Aerospace Industries, Elbit Systems et Lockheed Martin ».

Et le transport maritime, bien sûr, donc encore une fois Mærsk :

« Des compagnies maritimes telles que la danoise A.P. Moller – Maersk A/S transportent des composants, des pièces, des armes et des matières premières, assurant un flux constant d’équipements militaires fournis par les États-Unis après octobre 2023. »

Il y a donc l’industrie militaire brute, que les gens associent évidemment aux pires attaques contre les Palestiniens, mais l’appareil de contrôle d’Israël sur la Palestine et les Palestiniens ne s’arrête pas là. Il est si énorme et si interconnecté à l’échelle mondiale qu’il serait difficile de trouver une personne dans ce monde qui ne connaisse pas au moins une des entreprises impliquées.

Notre responsabilité

Albanese conclut avec des recommandations aux États, aux entreprises, à la CPI et à l’ONU. Pour les entreprises, il s’agit de « cesser toutes les activités commerciales et de mettre fin aux relations directement liées, contribuant et causant des violations des droits humains et des crimes internationaux contre le peuple palestinien » et de verser des réparations au peuple palestinien. Elle conseille par exemple de lever un impôt sur les entreprises privées qui ont profité de l’apartheid, pour contribuer aux réparations dues aux victimes comme cela a été fait en Afrique du Sud après l’apartheid.

Pour les États et les organismes internationaux, tels que la CPI et l’ONU, Albanese les appelle à mettre en œuvre les mécanismes à leur disposition pour obliger, non seulement Israël, mais aussi les entreprises qui permettent ses actions illégales, à rendre des comptes. En outre, elle a appelé les États à imposer des sanctions et un embargo total sur les armes à Israël.

Enfin, elle lance un appel à la société civile :

« La Rapporteuse spéciale exhorte les syndicats, les avocats, la société civile et les citoyens ordinaires à faire pression pour multiplier les boycotts, les désinvestissements, les sanctions, pour obtenir justice pour la Palestine et pour mener devant les tribunaux tous les responsables au niveau international et national ; ensemble, les peuples du monde peuvent mettre fin à ces crimes sans noms. »

Albanese décrit un réseau mondial de collaboration qui aide, d’une manière ou d’une autre, Israël à perpétrer un génocide. C’est une horreur dont l’ampleur peut en décourager certains mais ce n’est pas un système invincible. Il fonctionne grâce à des éléments tout à fait ordinaires : les ressources et l’argent. Il dépend d’un réseau économique et du consentement mondial. Et c’est là que réside la clé pour le démanteler.

Albanese conclut :

« La complicité que le rapport met à nu n’est que la partie émergée de l’iceberg ; il ne sera pas possible d’y mettre fin sans demander des comptes au secteur privé, y compris à ses dirigeants. Le droit international reconnaît différents degrés de responsabilité, chacun nécessitant un examen minutieux et une obligation de rendre des comptes, en particulier dans le cas où l’autodétermination et l’existence même d’un peuple sont en jeu. C’est une étape nécessaire pour mettre fin au génocide et démanteler le système mondial qui l’a rendu possible. »

6 juin 2025 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet

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