Au lieu de nourriture, les Israéliens distribuent la mort

12 août 2025 - les Palestiniens de Gaza ont fait leurs adieux à plus de 15, dont 10 bénéficiaires de l'aide d'une entreprise soutenue par les États-Unis et Israël, qui ont été tués dans la région de Morag à Rafah. Cinq autres ont été tués lors d'une frappe séparée sur une tente dans la « zone sûre » d'Al-Mawasi à Khan Younis, dans la bande de Gaza. L'ONU et d'autres organisations ont critiqué les centres de distribution de l'aide humanitaire gérés par les États-Unis et Israël pour avoir mis en danger les Palestiniens à la recherche d'aide et pour leur incompatibilité avec les principes humanitaires, entraînant une augmentation des meurtres - Photo : Doaa Albaz / Activestills

Par Sumaya Mohammed

La dernière chose qu’Osama Al-Absi a vue, c’est un sac de farine au centre d’aide situé au point de passage de  Zikim.

Au milieu de la foule, il espérait obtenir ne serait-ce qu’un peu pour nourrir sa famille affamée. Mais sans avertissement, un obus a été tiré vers lui depuis une direction inconnue, et tout ce qu’il a ressenti, c’est l’obscurité qui s’est abattue sur lui. Ses yeux ont été arrachés en un clin d’œil.  

Al-Absi, un jeune homme dans la fleur de l’âge originaire du nord de Gaza, a été poussé par l’instinct de survie à se diriger vers le centre d’aide de Zikim. Mais il a été touché aux yeux, comme d’autres, après que les Israéliens ont tiré plusieurs obus sur eux.

Aujourd’hui, Oussama et sa famille demandent qu’il soit autorisé à recevoir un traitement en dehors de Gaza dans l’espoir d’obtenir une prothèse oculaire. Cependant, en raison du blocus et de la fermeture des points de passage, il risque de perdre la vue à jamais.

Son frère déclare : « Personne n’entend notre voix. Les gens meurent de faim, les malades meurent dans la douleur et les Arabes dorment ».

Sa mère ajoute : « Il n’y a pas de traitement. Amputer un membre est devenu aussi courant que de dire bonjour à Gaza ».

Dans un autre cas, un homme de 35 ans, qui a préféré garder l’anonymat, s’est rendu dans l’un des centres d’aide à la recherche de nourriture pour son fils de quatre ans. Avant la guerre, il menait une vie confortable – il avait une boulangerie à Dayr al-Balah et était très généreux, nourrissant souvent les pauvres.

Sa boulangerie et sa maison ont été détruites et il a perdu tout ce qu’il possédait. La seule chose qui lui restait était son enfant, qu’il avait tenté de sauver de la faim.

C’est là qu’il a été touché par une balle qui lui a brisé la colonne vertébrale et par une autre balle qui lui a déchiré le bras. Il est devenu complètement paralysé.

Sa famille a contacté des médecins pour tenter de le soigner, mais le personnel médical de Gaza est épuisé et incapable de pratiquer une opération aussi précise et délicate de la colonne vertébrale en raison du manque d’équipement et de ressources.

Sa parente, Dohaa Hassan, raconte : « Il m’était très cher, c’était un homme gentil qui aimait faire du bien à tout le monde. Je ne peux pas croire qu’il en soit arrivé là, qu’il soit blessé et que sa vie soit détruite à jamais ».

Le docteur Atef Al-Hout, qui l’a soigné, déclare : « Nous ne sommes pas en mesure de fournir des soins médicaux appropriés parce que nous manquons d’équipement, de médicaments et de personnel. »

Hossam Al-Wafi, 37 ans et père de six enfants, est parti tôt le matin en direction d’un point de distribution de nourriture à Khan Yunis, dans l’espoir d’obtenir une boîte de haricots ou de houmous ou quoi que ce soit pour nourrir ses enfants. Mais il n’est jamais revenu, il a été abattu.

Les soldats israéliens prétendent avertir les gens et les empêcher de s’approcher des convois d’aide à l’avance, mais les témoins oculaires affirment le contraire, à savoir que les gens sont délibérément et aléatoirement la cible de tirs. L’occupation prétend agir en légitime défense, craignant l’approche des foules.

Mais les affamés n’ont rien d’autre que leurs mains vides et ne cherchent qu’à échapper à la famine qui ravage leur corps et les tue à petit feu. Pourtant, l’espoir de trouver de la nourriture est devenu un danger de mort. La mort est devenue une certitude : soit ils meurent de faim, ce qui est déjà le cas de beaucoup d’entre eux, soit ils risquent leur corps et finissent mutilés.

Le samedi 19 juillet au matin, au moins 32 personnes ont été tuées et plus de 100 blessées lorsque les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des foules de Palestiniens qui se précipitaient pour obtenir de la nourriture dans deux centres de distribution d’aide dans le sud de la bande de Gaza.

La population a qualifié ce qui s’est passé de « massacre x et a affirmé que les forces israéliennes avaient tiré « sans discrimination » sur des groupes de jeunes Palestiniens qui se rendaient dans les centres gérés par la Fondation humanitaire de Gaza, qui bénéficie du soutien des États-Unis et d’Israël.

Abdel Aziz Abed, un témoin âgé de 37 ans, a déclaré qu’il était parti avec cinq de ses proches avant le lever du soleil pour obtenir de l’aide, mais que les soldats israéliens avaient ouvert le feu sur les gens, tuant et blessant de nombreuses personnes. Il a ajouté : « Mes proches et moi-même n’avons rien pu obtenir. Chaque jour, je vais là-bas et tout ce que nous recevons, ce sont des balles et de l’épuisement au lieu de la nourriture ».

Le Programme alimentaire mondial des Nations unies a déclaré dimanche 20 juillet qu’un de ses convois, composé de 25 camions transportant de l’aide alimentaire, avait franchi le point de contrôle de Zikim, dans le nord de la bande de Gaza, où l’insécurité alimentaire est la plus forte.

Le convoi a été accueilli par des foules massives de civils affamés qui ont été la cible de tirs, faisant des victimes et des blessés.

La défense civile de Gaza a annoncé qu’au moins 93 Palestiniens ont été tués lorsque les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des personnes qui attendaient de recevoir de l’aide, la plupart d’entre elles dans la partie nord de la bande de Gaza, où la faim s’aggrave en raison des restrictions imposées à l’entrée de l’aide et de la guerre qui dure depuis 21 mois.

« Des milliers de citoyens sont rassemblés pour essayer d’obtenir de la farine. Il y a des bousculades mortelles entre les femmes, les hommes et les enfants », a déclaré Qasem Abu Khater, 36 ans, du camp de réfugiés de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, en décrivant la scène.

Il poursuit : « Nous avons atteint un stade où nous nous sentons comme des morts-vivants. Les chars tirent des obus au hasard et les soldats israéliens ouvrent le feu. Des dizaines de personnes ont été martyrisées sous mes yeux, et personne ne peut sauver qui que ce soit ».

Il ne s’agit pas d’incidents isolés. Ils s’inscrivent dans un schéma récurrent qui prend pour cible des civils sans défense, tués simplement parce qu’ils veulent manger.

Lorsque les gens entendent parler d’un convoi d’aide, ils y vont avec espoir – mais à chaque fois, ce chemin devient un piège, une embuscade mortelle. Et tant que le mécanisme de distribution de l’aide – géré par les États-Unis et Israël – se poursuivra de cette manière humiliante, les massacres ne s’arrêteront pas.

Les rapports des Nations unies indiquent qu’au 21 juillet, au moins 1057 Palestiniens ont été tués alors qu’ils attendaient de recevoir de l’aide, depuis la fin du mois de mai.

L’OMS a recensé 74 décès dus à la malnutrition en 2025 à la date du 27 juillet, tandis que le Ministère de la Santé a déclaré le 30 juillet que le nombre de décès dus à la famine atteignait 154, dont 89 enfants.

La mort par la faim est la forme de mort la plus humiliante. Elle ne survient pas soudainement comme un missile, mais lentement et cruellement, jusqu’à ce que la vie s’éteigne sans bruit.

Israël s’est habitué à tuer des centaines de personnes chaque jour avec des bombes et des obus, mais la faim semble être son arme la plus laide et la plus dégradante.

Pourtant, l’humiliation ne tombe pas sur les morts, mais sur les vivants. L’humiliation est pour ceux qui sont bien nourris, pour les spectateurs, pour le silence des régimes arabes et des organisations internationales.

Chaque victime de la faim ou des balles à Gaza emporte avec elle la valeur de l’humanité.

8 août 2025 – The Palestine Studies – Traduction : Chronique de Palestine – YG

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