
25 avril 2025 - Les Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture dans une cuisine solidaire du camp de réfugiés de Jabalia, au nord de la ville de Gaza, alors qu'une crise alimentaire sévit en raison du génocide perpétré par Israël à Gaza. Selon l'ONU, plus de 1,8 million de Palestiniens sont confrontés à une situation alimentaire « extrêmement critique ». Israël bloque depuis huit semaines toute aide humanitaire et toute livraison de denrées alimentaires à Gaza. Le régime colonial israélien a été condamné par les organisations internationales de défense des droits humains pour avoir utilisé la famine comme arme de guerre - Photo : Yousef Al-Zanoun / Activestills
Par EuroMed Monitor
Le projet annoncé par Israël de distribuer de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza n’est rien d’autre qu’une nouvelle manœuvre visant à prolonger le blocus total et illégal imposé au territoire. Cette initiative réintroduit la famine, sous un couvert humanitaire cette fois-ci, légitimant son utilisation continue comme arme dans le contexte d’un génocide qui dure depuis plus de 19 mois.
Le plan est axé sur le contrôle total du système d’aide, depuis la définition du type et de la quantité de l’aide jusqu’à la réglementation de son entrée, de son stockage, de sa distribution et des personnes autorisées à la recevoir.
Ce plan reflète clairement l’intention d’Israël d’instrumentaliser la famine plutôt que d’y mettre fin, et de renforcer encore son contrôle sur les besoins les plus fondamentaux des Palestiniens de la bande de Gaza.
Selon des rapports israéliens, Israël, en coordination avec les États-Unis, s’efforce de mettre en place un nouveau mécanisme de livraison de l’aide humanitaire à la bande de Gaza par le biais d’un « fonds international » soutenu par des pays et des institutions donateurs.
Dans le cadre de ce mécanisme, l’armée israélienne construira des complexes de distribution de l’aide dans certaines parties de la bande de Gaza. Les familles palestiniennes seront autorisées à accéder à ces complexes une fois par semaine pour recevoir un seul colis d’aide par famille, destiné à durer sept jours.
Une société privée américaine gérera la logistique et assurera la sécurité à l’intérieur et autour des complexes, tandis que l’armée israélienne contrôlera les zones environnantes.
Alors qu’Israël prétend que ce nouveau mécanisme vise à empêcher l’aide d’atteindre le Hamas ou d’être utilisée pour soutenir ses activités, il renforce en réalité un système de contrôle total sur la population civile de l’enclave, transformant la nourriture, les médicaments et l’eau en outils d’extorsion collective gérés par un cadre militaire et sécuritaire plutôt qu’humanitaire et juridique.
Le mécanisme proposé s’inscrit dans le prolongement de la politique d’étranglement menée par Israël dans la bande de Gaza et sert à détourner l’attention de la nécessité urgente d’un accès humanitaire immédiat et inconditionnel. Il accorde en effet à Israël plus de temps pour affamer la population de la bande de Gaza et normaliser la destruction et la dévastation systématiques qui ont lieu pendant le génocide qu’il poursuit activement.
Les détails rapportés sur le nouveau mécanisme révèlent qu’il reposerait sur la mise en place de centres de distribution de l’aide dans des endroits spécifiques, loin des zones densément peuplées et à proximité des positions militaires israéliennes, ce qui constituerait un grave risque pour les civils, étant donné que l’aide serait utilisée comme un outil de transfert forcé de population sous couvert humanitaire.
Les familles affamées, soumises à une politique systématique de famine menée par Israël depuis octobre 2023, seront probablement contraintes de se réinstaller à proximité de ces sites pour survivre, ce qui permettra à Israël de dépeupler de vastes zones résidentielles et d’imposer une nouvelle réalité démographique empêchant le retour des populations.
Les antécédents d’Israël dans des contextes similaires donnent de bonnes raisons de penser que le mécanisme proposé ne sera pas neutre ou humanitaire, mais plutôt un nouvel outil dans sa stratégie de déplacement forcé en cours.
Lors de l’invasion et de la destruction par Israël du gouvernorat de Gaza Nord en octobre 2024, Euro-Med Monitor a documenté l’utilisation par l’armée israélienne de méthodes complexes et coordonnées pour pousser les habitants vers le sud afin d’accéder à la nourriture et à l’aide.
Cette campagne a combiné des bombardements intensifs et un siège total avec le largage de tracts de propagande et des appels téléphoniques exhortant les habitants à se rendre dans la « zone humanitaire » d’Al-Mawasi, tout en les menaçant de leur refuser l’aide s’ils restaient dans les zones désignées comme zones de combat.
Le mécanisme proposé constitue également une double violation du droit international.
Premièrement, il enfreint les obligations qui incombent à Israël en tant que puissance occupante en vertu de la quatrième Convention de Genève, qui lui impose de satisfaire les besoins fondamentaux de la population occupée et de faciliter l’aide humanitaire sans délai, sans discrimination et sans conditions politiques.
Deuxièmement, la proposition contrevient aux principes du droit international humanitaire et des droits de l’homme, qui interdisent l’utilisation de l’aide comme moyen de pression ou de contrôle politique. Ces lois exigent que l’aide soit fournie uniquement en fonction des besoins, de manière neutre, non discriminatoire, en temps opportun et de manière adéquate, principes qui sont totalement absents du mécanisme proposé par Israël.
En outre, le mécanisme proposé ouvre la voie à un contrôle permanent d’Israël sur certaines parties de la bande de Gaza, permettant une forme déguisée d’annexion progressive. En installant des « complexes humanitaires » dans des zones ouvertes à proximité de sites militaires, ces lieux sont transformés en ceintures de sécurité israéliennes inaccessibles aux civils palestiniens de la région, ce qui entraîne leur séparation géographique et démographique du reste de la bande de Gaza.
Ces zones pourraient ensuite être reclassées en zones militaires fermées ou en « couloirs logistiques » reliés à des infrastructures militaires et civiles, financés par des organismes internationaux sous prétexte humanitaire.
Cela conférerait une légitimité de facto à la présence israélienne dans la bande de Gaza, la rendant pratiquement irréversible.
Ainsi, le contrôle temporaire lié à la distribution de l’aide et à la satisfaction des « besoins humanitaires » pourrait devenir une porte d’entrée pour remodeler la réalité géographique de l’enclave.
La gestion directe ou indirecte de ce mécanisme par Israël pourrait également servir des objectifs non avoués, notamment la collecte de données actualisées sur la population civile – sa localisation, ses mouvements et ses schémas de déplacement – qui pourraient ensuite être utilisées pour la suivre, la surveiller, la cibler et exercer un chantage.
Israël collecte illégalement des données sur les civils palestiniens depuis des décennies.
Enfin, limiter chaque famille à un colis d’aide par semaine est loin de répondre aux normes minimales pour lutter contre la famine ou rétablir la sécurité alimentaire. Il s’agit plutôt d’un pansement ou d’une couverture superficielle de la crise actuelle.
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Au lieu de garantir un flux d’aide stable et suffisant, comme l’exige le droit international, l’aide est utilisée comme une forme de chantage, l’accès à la nourriture étant régi par les restrictions « sécuritaires » israéliennes.
Cela transforme la satisfaction des besoins fondamentaux de survie en un privilège, subordonné aux caprices de l’armée israélienne, et élimine toute capacité de la population ou des institutions palestiniennes à s’adapter en stockant et en conservant des denrées alimentaires.
Les preuves recueillies sur le terrain, en particulier depuis la reprise du génocide par Israël le 18 mars 2025, montrent que le mécanisme d’aide humanitaire proposé n’a pas pour but d’atténuer la crise, mais de renforcer le contrôle sur la population et de réorganiser le paysage humanitaire sous le couvert d’une soi-disant surveillance militaire et sécuritaire.
Au cours des deux derniers jours, Israël a pris pour cible des institutions caritatives et des installations alimentaires, tuant au moins huit travailleurs humanitaires dans le centre et le nord de la bande de Gaza.
Il a également mené des attaques systématiques contre le personnel de sécurité chargé de protéger les installations de stockage de denrées alimentaires, permettant ainsi leur pillage et l’épuisement de stocks déjà rares.
Sous prétexte de « neutralité politique », le mécanisme proposé vise également à écarter l’UNRWA et les organisations humanitaires palestiniennes et internationales. Cette exclusion délibérée vise les acteurs les plus expérimentés et les plus éprouvés sur le terrain, qui ont toujours fourni une aide efficace et équitable.
Si ce mécanisme est mis en œuvre, cette exclusion privera la population de la bande de Gaza de canaux d’aide fiables, capables de fournir une aide cohérente et transparente, et les remplacera par un nouveau système contrôlé par des intérêts politiques et sécuritaires, tout en démantelant les structures de longue date qui ont servi de bouée de sauvetage.
À un moment où l’urgence et l’efficacité sont cruciales, la mise en place d’un mécanisme élaboré destiné à servir des intérêts politiques et criminels au détriment de la vie des civils doit être stoppée par la communauté internationale.
L’implication des États-Unis dans la planification et la promotion du mécanisme proposé n’est pas fortuite, mais constitue le prolongement direct de leur soutien politique et militaire au génocide perpétré par Israël dans la bande de Gaza.
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L’administration américaine a fourni une couverture diplomatique cruciale, utilisant à plusieurs reprises son droit de veto au Conseil de sécurité pour bloquer les efforts internationaux visant à tenir Israël responsable. Dans le même temps, elle a fourni un flux constant d’armes et de munitions, directement utilisées pour tuer des dizaines de milliers de Palestiniens – selon une estimation prudente – et pour bombarder des abris, des maisons, des écoles et des hôpitaux.
Aujourd’hui, en soutenant un mécanisme d’aide dystopique, les États-Unis se rendent complices d’une politique de famine massive systématique, présentée comme une aide humanitaire mais conçue pour renforcer leur contrôle sur la bande de Gaza et réduire les chances de survie des Palestiniens qui y vivent. Cela fait des États-Unis un complice actif de ce qui est considéré comme l’un des crimes internationaux les plus graves.
La tentative d’Israël de feindre la neutralité en externalisant la distribution de l’aide à une entreprise privée américaine est un stratagème visant à se soustraire à ses responsabilités en tant que puissance occupante tout en conservant le contrôle sur tous les habitants de la bande de Gaza.
Malgré la présence d’un intermédiaire, Israël conserve une autorité effective sur le territoire et le système d’aide, et reste pleinement responsable de garantir un accès humanitaire sans entrave, conformément au droit international.
La communauté internationale doit s’abstenir de soutenir, de financer ou de s’engager dans le mécanisme proposé et doit faire pression sur Israël pour qu’il l’annule immédiatement. Sinon, elle se rendra complice de la présentation par Israël de son blocus illégal comme nécessaire sous prétexte de « raisons de sécurité » et de la poursuite du crime de famine massive des civils dans la bande de Gaza sous le couvert d’« efforts humanitaires ».
La communauté internationale doit prendre toutes les mesures juridiques, politiques et humanitaires nécessaires pour lever le blocus illégal de la bande de Gaza et garantir la circulation immédiate et sans restriction de l’aide par tous les points de passage terrestres, maritimes et aériens.
La distribution de l’aide doit être coordonnée de manière neutre, efficace et adaptée aux besoins réels de la population, mettant fin au contrôle criminel d’Israël sur les fournitures de secours.
Le blocus actuel constitue une violation grave du droit international humanitaire et sert d’instrument de génocide contre le peuple palestinien.
Les travailleurs humanitaires et les installations de distribution de nourriture doivent être protégés, et les attaques délibérées contre les banques alimentaires, les entrepôts et le personnel humanitaire doivent cesser.
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Ces agressions visent à saboter les efforts de lutte contre la famine et constituent une violation directe du droit international humanitaire, qui impose la protection des infrastructures civiles et accorde une protection spéciale aux opérations d’aide humanitaire.
Tous les États, individuellement et collectivement, doivent s’acquitter de leurs responsabilités juridiques en prenant des mesures urgentes pour mettre fin au génocide dans la bande de Gaza, en mettant en œuvre des mesures efficaces pour protéger les civils palestiniens, en veillant au respect par Israël du droit international et des décisions de la Cour internationale de justice, et en tenant Israël responsable de ses crimes contre les Palestiniens.
La Cour pénale internationale doit réémettre les mandats d’arrêt contre le Premier ministre et le ministre de la Défense israéliens dans les plus brefs délais, conformément au principe selon lequel il n’y a pas d’immunité pour les crimes internationaux.
La communauté internationale doit également imposer des sanctions économiques, diplomatiques et militaires à Israël pour ses violations systématiques et graves du droit international.
Ces sanctions devraient inclure un embargo sur les armes, la fin de tout soutien politique, financier et militaire, le gel des avoirs des responsables impliqués dans des crimes contre les Palestiniens, l’imposition d’interdictions de voyager et la suspension des privilèges commerciaux et des accords bilatéraux qui procurent à Israël des avantages économiques lui permettant de poursuivre ses crimes.
Tous les États doivent tenir pour responsables les pays complices des crimes d’Israël, notamment les États-Unis et les autres pays qui fournissent un soutien ou une assistance permettant les actes susmentionnés. Cette collaboration comprend l’aide et la coopération contractuelle dans les domaines militaire, du renseignement, politique, juridique, financier, médiatique et économique qui contribuent à la poursuite des crimes israéliens contre les Palestiniens dans la bande de Gaza.
Auteur : EuroMed Monitor
* L'Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l'Homme est une organisation indépendante à but non lucratif dirigée par des jeunes qui défend les droits humains de toutes les personnes à travers l'Europe et la région MENA, en particulier celles qui vivent sous occupation, en proie à la guerre ou à des troubles politiques et/ou ont été déplacés en raison de persécutions ou de conflits armés.
5 mai 2025 – EuroMed Monitor – Traduction : Chronique de Palestine
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