L’étudiante Mays Abu Ghosh victime de persécution par l’occupant israélien

Mays Abu Ghosh - Photo : courtoisie Mays Abu Ghosh

Par Amjad Ayman Yaghi

En août 2019, Mays Abu Ghosh était en pleine révision pour un examen universitaire lorsque des soldats israéliens sont entrés par effraction chez elle tard dans la nuit.

Accompagnés de chiens, les troupes ont intimé à son père l’ordre de réveiller la famille et de rassembler tout le monde dans la même pièce.

Puis ils sont entrés dans la chambre de Mays et lui ont ordonné d’allumer son téléphone portable ainsi que son ordinateur. Ce qu’elle a refusé.

Après avoir refusé d’obtempérer à l’ordre, Mays a dû s’habiller en présence de femmes soldats. Sa chambre et celle de ses parents ont ensuite été saccagées par les soudards.

Menottée, Mays a été entraînée hors de la maison familiale dans le camp de réfugiés de Qalandiya, jusqu’au au poste de contrôle militaire également à Qalandiya – une zone séparant Jérusalem-Est occupée du reste de la Cisjordanie.

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De là, elle a été transportée au “complexe russe”, un centre de détention israélien à Jérusalem. Mays a été détenue dans ce centre pendant plus d’un mois, période où elle a été torturée à plusieurs reprises.

Moments de souffrances

université de Birzeit en Cisjordanie, a été persécutée parce qu’elle refuse d’accepter l’occupation de sa patrie par Israël .

Elle a été accusée de faire partie de Qutub, un groupe étudiant de gauche jugé “illégal” par Israël.

Parmi les autres accusations portées contre elle figuraient “un contact avec l’ennemi”. Cela concernait sa participation à une conférence tenue au Liban sur le Droit au retour des réfugiés palestiniens.

Une cinquantaine de personnes – principalement des étudiants – ont été kidnappés en Cisjordanie à peu près au même moment que Mays.

Certains journalistes israéliens se sont empressés de traiter les personnes enlevées de “terroristes”. Des articles de presse ont lié les arrestations à un crime à proximité d’une colonie israélienne.

Pourtant, comme l’écrivait Gideon Levy, journaliste bien connu du quotidien Haaretz de Tel Aviv, “presque aucune” des personnes arrêtées n’était soupçonnée d’avoir quoi que ce soit à voir avec ce meurtre, “même indirectement”.

“Le sentiment d’une grande perte”

Après avoir passé 33 jours dans le “complexe russe”, Mays a été conduite à Damon, une prison située dans une forêt à côté de la ville de Haïfa en Israël [Palestine de 1948].

Elle a été placée dans une cellule avec six autres femmes.

Quand c’était l’été, la chaleur y était insupportable. Pendant l’hiver, Mays a essayé de supporter le froid glacial en usant de trois couvertures.

Elle était déterminée à ce que son emprisonnement ne brise pas son mental. Elle a gardé son esprit actif en lisant des romans et des livres sur la sociologie et la culture. Certains des livres lus par les prisonniers – en particulier ceux considérés comme politiques – ont été confisqués par les gardes israéliens de Damon.

Mays est restée derrière les barreaux pendant 15 mois. Elle a finalement été libérée à la fin de l’année dernière. Sa libération est intervenue un mois avant l’expiration de sa peine de 16 mois de prison. Mais elle a dû payer une amende de 600 dollars pour pouvoir quitter la prison.

La famille Abu Ghosh a eu beaucoup à souffrir de l’occupation militaire israélienne.

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Début 2016, le frère de Mays, Hussein, a été abattu par un garde de sécurité israélien. Il a été affirmé que lui et un autre jeune homme – qui avait aussi été tué – avaient mené une attaque au couteau, blessant mortellement une Israélienne.

Quelques mois plus tard, l’appartement où vivait la famille à Qalandiya a été démoli par Israël, un cas typique de punition collective. Ils ont donc dû déménager dans un appartement situé à un autre étage du même immeuble.

Un autre de ses frères, Suleiman, a été arrêté peu de temps après le raid de 2019 à la suite duquel Mays a été emprisonnée. Il a été placé en détention administrative – un emprisonnement sans inculpation ni jugement.

“Ma famille ressent un énorme sentiment de perte et de grande instabilité”, a expliqué Mays. “Même ma petite sœur – une petite fille de 5 ans qui se nomme Iliya – fait pipi au lit parce qu’elle se souvient du moment où l’armée israélienne est venue ravager notre maison et m’arrêter.”

Mays est pleinement consciente qu’il n’y a rien d’unique dans la façon dont elle a été traitée. En prison, elle en a rencontré beaucoup d’autres femmes qui sont enfermées depuis bien plus longtemps qu’elle ne l’était.

Environ 10 000 Palestiniennes ont été arrêtées ou détenues sur ordre militaire israélien au cours des cinq dernières décennies.

Trente-sept Palestiniennes étaient détenues dans les prisons ou centres de détention israéliens à la fin du mois de janvier.

Mays a maintenant repris ses études – bien qu’elle doive suivre ses cours en ligne à cause de la pandémie. Elle espère obtenir son diplôme de Birzeit d’ici la fin de l’année.

“La prison était un obstacle à mon éducation et à ma carrière”, dit-elle. “Mais je veux toujours travailler comme journaliste. Je ne permettrai pas que mon emprisonnement reste un sombre chapitre dans ma vie.”

* Amjad Ayman Yagh est journaliste, basé à Gaza.

5 février 2021 – The Electronic Intifada – Traduction : Chronique de Palestine