Les Israéliens font la guerre aux hôpitaux et aux médecins

Ce qu'il susbiste de l'hôpital al-Shifa après deux semaines d'attaques et de siège israéliens - Photo : Twitter/X

Par Imad HatbeImad Hatbe

On ne peut s’empêcher de se demander pourquoi l’armée la plus « morale » du monde a tué de sang-froid le docteur Muhammad Zaher al-Nono pour avoir refusé d’évacuer un patient gravement blessé.

L’article 8 de la Convention de Genève définit les crimes de guerre. Deux d’entre eux sont définis ainsi : « le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades et des blessés sont rassemblés, à condition qu’ils ne soient pas des objectifs militaires » et « le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments, du matériel, des unités et des moyens de transport sanitaires, ainsi que du personnel utilisant les signes distinctifs des Conventions de Genève, conformément au droit international ».

La première attaque contre les hôpitaux palestiniens qui a marqué le début de l’assaut contre les établissements médicaux a été le bombardement de l’hôpital baptiste Al-Ahli le 17 octobre 2023, qui a tué 473 Palestiniens réfugiés dans l’hôpital, dont des enfants, des femmes, des personnes âgées et des membres du personnel médical.

Personne n’oubliera jamais la conférence de presse qui s’est tenue au milieu des corps.

À l’époque, le monde « libre » s’est indigné et a prétendu qu’ « Israël » ne bombarderait jamais un hôpital, qu’ « Israël » ne commet pas de crimes de guerre. Selon la plupart des gens, une roquette palestinienne était tombée sur l’hôpital par erreur.

Six mois après l’assaut d’ « Israël » sur Gaza, le monde « libre » sait désormais qu’il ne s’agissait pas d’une roquette palestinienne, mais a encore du mal à l’admettre car cela l’obligerait à reconnaître qu’ « Israël » commet des crimes de guerre.

La deuxième fois qu’il a attaqué un hôpital, « Israël » s’est dit qu’il devrait peut-être fournir une excuse plus crédible.

« Déluge d’Al-Aqsa » Jour 174 : les Israéliens se vantent d’avoir assassiné 200 personnes à l’hôpital al-Shifa

Lorsqu’il a lancé l’assaut contre l’hôpital Al-Shifa le 14 novembre 2023, il a affirmé que des combattants du Hamas se cachaient dans des tunnels sous l’hôpital et que des captifs y étaient retenus aussi.

Dix jours après un long siège militaire de l’hôpital qui a fait des centaines de morts, aucun captif ni combattant du Hamas n’a été trouvé. Le plus remarquable est que le président israélien, après avoir convaincu le monde de la nécessité d’attaquer Al-Shifa en raison des tunnels construits par le Hamas, a fini par admettre que c’était « Israël » qui avait construit les tunnels sous l’hôpital il y a de nombreuses années.

Pourtant, le monde « libre » est resté silencieux.

Le mois dernier, le complexe médical Nasser de Khan Younis a été attaqué par des chars israéliens et des centaines de soldats. Les 300 000 Palestiniens vivant à Khan Younis se sont retrouvés avec un seul hôpital d’une capacité de 20 lits.

Le directeur de l’hôpital a été arrêté, rejoignant ainsi la liste des directeurs d’hôpitaux kidnappés par Israël, qui comprend le Dr Muhammad Abu Salmiya, directeur de l’hôpital Al-Shifa, le Dr Ahmad Kahlout, directeur de l’hôpital Kamal Adwan, et le Dr Ahmad Muhana, directeur de l’hôpital Al-Awdah.

Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a écrit sur son compte X : « L’hôpital Nasser de #Gaza ne fonctionne plus, après un siège d’une semaine suivi du raid en cours. Hier et avant-hier, l’équipe de l’@WHO n’a pas été autorisée à entrer dans l’hôpital pour évaluer l’état des patients et les besoins médicaux critiques, bien qu’elle ait atteint l’enceinte de l’hôpital pour livrer du carburant avec l’aide d’autres organisations. Il y a encore environ 200 patients à l’hôpital. Au moins 20 d’entre eux ont besoin d’être envoyés d’urgence dans d’autres hôpitaux. Recevoir des soins fait partie des droits humains. Les patients paieront ces retards de leur vie ».

Le 18 mars, le complexe médical Al-Shifa a été violé pour la troisième fois depuis le 7 octobre. 170 patients et Palestiniens déplacés ont été tués et 800 personnes ont été enlevées, dont plus de 100 membres du personnel médical.

« Je suis un médecin qui s’est rendu à Gaza. Ce que j’ai vu est bouleversant ! »

Les autorités d’occupation ont affirmé qu’une opération de grande envergure était en cours pour capturer à nouveau les combattants du Hamas dans les tunnels.

Cependant, on ne peut s’empêcher de se demander pourquoi l’armée la plus « morale » du monde, qui agit en vertu de son « droit de se défendre », a tué de sang-froid le docteur Muhammad Zaher al-Nono pour avoir refusé d’évacuer un patient gravement blessé.

Pourquoi cette « armée morale » a-t-elle maintenant détruit plus de 26 hôpitaux, tué 283 membres du personnel médical et bombardé 100 ambulances ? Prenons quelques minutes pour fermer les yeux et imaginer la réaction du monde « libre » si cela se produisait en Ukraine.

Malgré l’absence de toute preuve corroborant les affirmations d’ « Israël », et l’absence de confirmation d’activité militaire à l’intérieur des hôpitaux que l’armée d’occupation a perquisitionnés, le monde « libre » continue de nier qu’ « Israël » commet des crimes de guerre.

Même si des organismes internationaux tels que l’UNRWA, le PAM et l’OMS dénoncent des attaques contre des installations et du personnel médicaux, « Israël » ne sera pas condamné.

Quelles preuves faudrait-il au monde « libre » pour reconnaître l’existence de crimes de guerre ? Personne ne le sait et ne sait même s’il y a une réponse à cette question.

« Israël » gagne la guerre contre les hôpitaux, pendant que l’humanité perd la guerre pour les droits humains. Le massacre de civils innocents se poursuit.

Un ami médecin de Gaza m’a écrit : « N’écris plus rien sur nous, prie seulement pour que nous mourions avant ceux que nous aimons ».

27 mars 2024 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet