Israël sabote l’agriculture palestinienne avec des produits bas de gamme

Agriculteur palestinien travaillant dans un des ses champs - Photo: archives felesteen.new

Par Amany Mahmoud

Israël submerge les marchés palestiniens de grandes quantités de produits agricoles bon marché afin de ruiner les saisons agricoles palestiniennes.

Les Palestiniens dénoncent les pratiques d’Israël visant à détruire l’agriculture palestinienne. Non content de brûler et de raser les récoltes, Israël sape l’activité agricole palestinienne en déversant sur le marché palestinien de grandes quantités de produits bon marché.

Deux récoltes sont particulièrement visées, celle des olives et celle des raisins. En ces saisons, le marché palestinien en Cisjordanie est inondé de produits israéliens pas chers qui ne laissent aucune chance aux produits palestiniens.

Ces attaques réduisent considérablement les possibilités de développement de l’agriculture palestinienne et accroissent la dépendance vis-à-vis d’Israël.

Les vendanges palestiniennes qui commencent en Août subissent chaque saison les attaques de la concurrence israélienne faite de milliers de tonnes de raisins israéliens produits en grande partie dans les colonies se trouvant à proximité des villes palestiniennes.

Israël utilise des fertilisants et autres produits chimiques afin d’accélérer la croissance et la maturation de ces fruits.

Les Palestiniens en Cisjordanie cultivent environ 64 millions de de mètres carrés (15.800 acres) de raisin, des cultures dans lesquelles sont engagés environ 10.000 fermiers.

D’après le Conseil Palestinien des Fruits et Raisins, les Palestiniens produisent annuellement environ 50 millions de kilogrammes de raisins comprenant environ 27 millions produits dans le gouvernorat de Hébron, 6 millions dans le gouvernorat de Bethléem et 6 autres millions dans le gouvernorat de Jénine.

La production de raisins en Cisjordanie constitue environ 12% de la production totale de la Palestine.

Les Palestiniens exportent de grandes quantités de récoltes diverses vers Israël dont la valeur annuelle atteint 300 millions de dollars. Les Palestiniens de Cisjordanie exportent quotidiennement vers Israël 280.000 kilogrammes de produits agricoles.

Les importations agricoles palestiniennes annuelles d’Israël par contre atteignent environ 1 milliard de dollars.

L’Autorité Palestinienne interdit l’importation de raisins produits dans les colonies et fait de toute transaction commerciale avec Israël un délit, cela afin de protéger les produits palestiniens.

En dépit de cette interdiction, le marché palestinien est submergé de produits israéliens interdits et portant marque israélienne. Ces produits sont importés illégalement par les plus gros marchands tard dans la nuit afin d’éviter les postes de contrôle palestiniens.

Mahmoud Abou Merhi, fermier palestinien et militant contre les colonies juives, possédant un vignoble de 5 acres, a parlé à Al-Monitor de l’importance des vendanges palestiniennes, une des saisons agricoles palestiniennes les plus célèbres que les familles palestiniennes fêtent par des chants traditionnels célébrant l’abondance et la prospérité.

Cependant aujourd’hui, la saison des vendanges nous apporte peur et anxiété à cause des colons juifs qui ruinent nos vignobles par toutes sortes de moyens, y compris en déversant des pesticides toxiques sur nos récoltes ou en chassant les fermiers de leurs terres.

Abou Merhi a peur que les vendanges de cette année soient perdues à cause des grandes quantités de raisin israélien bon marché déversées sur le marché local. « Des quantités importantes de raisin palestinien sont menacées de pourrir sur pied à cause des températures élevées et des surplus de produits israéliens déversées sur le marché palestinien. »

Le fermier palestinien Atef Abou Walid a déclaré à Al Monitor que le but d’Israël était de pousser les fermiers palestiniens hors de leurs terres en les forçant à abandonner les cultures héritées de leurs ancêtres, permettant ainsi à Israël et à ses colons d’installer des postes avancés leur permettant de pénétrer toujours plus loin dans les terres palestiniennes de la Cisjordanie.

Il note « quand les citoyens palestiniens vont au marché, ils voient de grandes quantités de fruits et légumes israéliens à des prix qui concurrencent les produits locaux. Très souvent, les fruits et légumes israéliens, de qualité souvent inférieure aux produits palestiniens sont préférés par les consommateurs palestiniens parce qu’ils sont moins chers.

Il ajoute « En dépit des grandes pertes que nous subissons, nous fermiers continuerons à cultiver nos terres afin d’empêcher Israël de réaliser son objectif de les confisquer. »

Abou Wadi accuse Israël d’imposer des restrictions supplémentaires sur les fermiers palestiniens, comme il l’a fait récemment en fermant les routes agricoles menant aux vignobles de Hébron, dans la partie Sud de la Cisjordanie, isolant ainsi 5000 acres de terres.

Favorisés par leur avance technologique faite d’équipement modernes, de produits chimiques, de fertilisants et de méthodes d’irrigation modernes, les fermiers israéliens peuvent offrir leurs produits agricoles, et particulièrement les raisins, près d’un mois avant les fermiers palestiniens.

Et Israël maintient cette avance en interdisant l’acquisition par les fermiers palestiniens de ces technologies, en particulier les pesticides et les fertilisants chimiques, qui auraient permis l’allongement de la durée de vie de leurs raisins ainsi que l’amélioration de leur goût.

Fathi Abou Ayashn, directeur du Conseil des Fruits et Raisins, a déclaré à Al Monitor que les marchés palestiniens étaient envahis par environ 27 000 tonnes de raisins dont la caractéristique principale est leur maturation constante, ce qui attire les consommateurs.

Il poursuit «  les marchés palestiniens ne sont pas protégés, ce qui fait que les produits israéliens les submergent. » La cause de cette situation est qu’il n’y a pas de contrôle efficace des produits israéliens dans le marché palestinien.

Les deux marchés, palestinien et israélien, sont étroitement interconnectés, ce qui permet à beaucoup de marchands d’importer illégalement les produits et biens israéliens.

Abou Ayyash explique que les autorités compétentes chargées de surveiller le marché manquent de ressources financières, ce qui affaiblit considérablement la capacité des Palestiniens à contrôler leur marché et ses diverses marchandises.

« Nous manquons aussi de normes techniques obligatoires qui nous permettraient de superviser les biens commercialisés en Palestine alors que par ailleurs, très peu d’actions judiciaires sont menées contre les contrevenants. »

3 août 2021 – Al-Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Traduction : Najib Aloui