Ismaïl Haniyeh élu à la tête du mouvement Hamas

Ismaïl Haniyeh - Agence FARS
Ismaïl Haniyeh - Agence FARS

Par Adnan Abu Amer

Plusieurs défis attendent Ismail Haniyeh en tant que nouveau dirigeant du Hamas, surtout la réconciliation avec le Fatah et la stabilisation des liens avec les acteurs régionaux, l’Égypte et l’Iran.

L’ancien responsable du bureau politique du Hamas, Khaled Meshaal, a annoncé le 6 mai que Ismail Haniyeh avait remporté les élections internes du mouvement qui avaient lieu ce jour-là et qu’il était à présent le nouveau responsable du bureau politique du mouvement. Meshaal, qui réside au Qatar, demeurera membre du Conseil de la Shura du mouvement.

Un haut fonctionnaire du Hamas, basé au Qatar, a déclaré à Al-Monitor sous couvert de l’anonymat: “Le Conseil de la Shura du Hamas, à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine, a organisé un appel de vidéoconférence le 6 mai au cours duquel les participants ont élu Haniyeh, qui était en compétition sur ce poste avec deux autres dirigeants du Hamas – Mousa Abu Marzouk et Mohammed Nazzal”.

Il a ajouté : “Un certain nombre de dirigeants du Hamas étaient censés se rendre au Qatar, où est basé la direction politique du Hamas, afin de participer aux élections, mais la fermeture par l’Egypte du passage de Rafah les en a empêchés. Avec l’élection de Haniyeh, les élections internes du Hamas ont été achevées après quatre mois et se sont tenues dans quatre zones géographiques différentes : Gaza, Cisjordanie, les prisons israéliennes et en dehors de la Palestine”.

Le Hamas a publié une déclaration dans la soirée du 7 mai, annonçant le nom de certains de ses membres du bureau politique, tels que Abu Marzouk, Nazzal, Yahya Sinwar, Saleh al-Arouri, Khalil al-Hayya, Maher Obeid, Izzat al-Rishq et Fathi Hammad. Cependant, sans raison connue, les noms des autres membres et du responsable adjoint n’ont pas été rendus publics.

L’élection de Haniyeh en tant que premier dirigeant du Hamas était attendue, car il était le second de Meshaal depuis 2013. Il a dirigé le Hamas dans la bande de Gaza et s’est rendu, au cours des quatre derniers mois de 2016, en Égypte, en Arabie Saoudite et au Qatar et a rencontré un certain nombre de dirigeants du mouvement.

Haniyeh, qui vit à Gaza, est très populaire auprès des Palestiniens. En mars, une enquête du “Centre palestinien pour la recherche sur les politiques et les enquêtes” a estimé la popularité de Haniyeh et a prédit qu’en cas d’élections présidentielles palestiniennes, il recueillerait 47% des voix.

Abdel Sattar Qassem, professeur de science politique à l’Université nationale An-Najah à Naplouse, a déclaré à Al-Monitor: “Haniyeh a un certain nombre de qualités qui peuvent être équivalents ou supérieurs à ceux de Meshaal, comme sa capacité à s’adresser aux Palestiniens et à être géographiquement plus proches d’eux. Cependant, ce qui est le plus important dans l’élection de Haniyeh, c’est qu’il rapprochera le mouvement de l’Iran grâce aux efforts de hauts responsables du Hamas tels que Mahmoud al-Zahar et Yahya Sinwar. Haniyeh relancera également le rapprochement avec le Hezbollah et la Syrie et il travaillera à résoudre les difficultés qui ont nui aux relations du Hamas avec ces parties”.

L’élection de Haniyeh a été rendue possible grâce au soutien de l’ensemble du mouvement, y compris des membres en Palestine et à l’étranger, ainsi que parmi les dirigeants politiques et militaires. D’autres dirigeants du Hamas ont des désaccords avec certaines factions et auraient dû faire face à une polarisation interne qui aurait pu alors entraver leur capacité à diriger.

Pourtant, un certain nombre de défis difficiles attendent Haniyeh, comme la réconciliation avec Fatah, la restauration des relations du Hamas avec les pays de la région tels que L’Égypte et l’Iran, l’assouplissement du siège israélien sur la bande de Gaza et éloigner le spectre de la guerre de Gaza.

L’analyste palestinien des questions liées au Hamas, Hussam al-Dajani, a déclaré à Al-Monitor: “Haniyeh est celui qui compte le plus pour éliminer le Hamas des listes internationales de terrorisme. L’élection de Haniyeh a suivi la publication du nouveau document de politique du Hamas le 1er mai, qui est considéré comme l’aboutissement d’une nouvelle étape dans le développement de le réseau de relations locales, régionales et internationales du mouvement. Il serait donc préférable pour Haniyeh de rester à Gaza et de ne pas aller vivre à l’étranger et d’assigner des représentants du mouvement à l’étranger pour gérer les relations extérieures selon ses directives et ses instructions”.

De nombreux Palestiniens ont accueilli favorablement la désignation de Haniyeh. Le membre du Comité central du Fatah Azzam al-Ahmad a exprimé son optimisme en disant qu’il espère que Haniyeh réussira à réconcilier le Fatah et le Hamas. Le Front populaire pour la libération de la Palestine [FPLP] a salué le processus démocratique qui a mené à la victoire de Haniyeh et l’a appelé à aborder rapidement la situation interne palestinienne. Le Jihad islamique a également bien accueilli la victoire de Haniyeh et l’a exhorté à résoudre les divergences intra-palestiniennes, tandis que le Front démocratique pour la libération de la Palestine a considéré l’élection de Haniyeh comme une réussite pour la résistance et une cause de fierté pour tous les Palestiniens.

Abdullah Abdullah, membre du Conseil révolutionnaire de Fatah et président du comité politique du Conseil législatif palestinien, a déclaré à Al-Monitor: “Le Fatah accueille favorablement la victoire de Haniyeh, mais ce qui est plus important pour nous, c’est la réconciliation avec le Fatah et la fin de la division. Nous voulons qu’il avance concrètement, et pas seulement par le discours. Nous espérons le voir bientôt. Nous croyons que Meshaal ne sera pas à l’écart des centres de décision du Hamas à la lumière de son expérience de longue date à la direction du mouvement”.

Ahmed Yousef, un ancien conseiller politique de Haniyeh, a déclaré à Al-Monitor: “Dans les semaines à venir, les positions et fonctions de direction du Hamas seront distribuées, la situation interne du mouvement sera organisée, de nombreuses relations régionales et internationales seront rétablies, la réforme du Hamas sera achevée et le processus électoral sera fixé, afin d’empêcher la répétition des erreurs survenues au cours du récent processus électoral il y a quelques semaines”.

Yousef a ajouté: “Le Hamas doit maintenant choisir un secrétaire général parmi ses anciens combattants, avec la capacité de gérer les différentes sensibilités dans le mouvement, et comme celui-ci est devenu un mouvement de masse, Meshaal ou Abu Marzouk pourraient être les principaux candidats pour assumer une telle responsabilité.”

Alors que Meshaal a démissionné pour que Haniyeh prenne le relais, le Hamas tourne une nouvelle page au milieu de défis sérieux et de graves menaces qui exigent une attitude plus pondérée et plus prudente de la part de ses nouveaux dirigeants.

* Adnan Abu Amer est doyen de la Faculté des Arts et responsable de la Section Presse et Information à Al Oumma Open University Education, ainsi que Professeur spécialisé en Histoire de la question palestinienne, sécurité nationale, sciences politiques et civilisation islamique. Il a publié un certain nombre d’ouvrages et d’articles sur l’histoire contemporaine de la Palestine.

8 mai 2017 – Al-Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah