13 octobre 2025 - Un Palestinien qui était détenu dans une prison israélienne est accueilli par les membres de sa famille après sa libération, à Khan Yunis, dans la bande de Gaza. Des milliers de personnes se sont rassemblées dans la ville pour accueillir les prisonniers libérés, qui avaient été kidnappés par l'armée israélienne pendant le génocide et ont été libérés dans le cadre d'un échange de prisonniers entre le Hamas et Israël. Environ 2000 prisonniers palestiniens ont été libérés, dont beaucoup dans la bande de Gaza - Photo : Doaa Albaz / Activestills
Par Marie Schwab
Combien de temps encore les enfants de notre terre seront-ils assassinés jour après jour en Palestine ? Combien de temps encore des petits corps démembrés, couverts de sang et de poussière, s’entasseront-ils dans les morgues de Gaza ?
Le 17 novembre au Conseil de sécurité de l’ONU, l’impérialisme est apparu sous son jour le plus laid, revêtu de son costume de processus de paix et de légalité.
Quelle insulte envers les Palestiniens et quiconque place encore ses espoirs dans le droit. Honte à la France, pays des droits de l’Homme, qui plébiscite un droit perverti à des fins de normalisation du génocide et du nettoyage ethnique.
Cette résolution impose aux Palestiniens le pire scénario de dystopie devenue réalité : la récompense du terrorisme d’État, la légalisation de l’état de fait colonial, du blocus militaire, du déni de justice.
Après deux ans de passivité coupable, le Conseil de sécurité saborde le droit en bafouant les principes les plus élémentaires consignés dans sa propre Charte et mandate ceux qui fournissent les bombes d’une tonne qui assassinent les enfants à Gaza pour former une armée de mercenaires à la solde de l’occupant.
Cette résolution, outre qu’elle blâme les victimes et tente de donner une caution internationale et légale à la violation perpétuelle du droit par Israël, va à l’encontre de la décision de la CIJ du 19.7.2024 imposant la fin de l’occupation et de celle du 22.10.2025 exigeant un accès à l’aide humanitaire sans restriction pour les Palestiniens de Gaza. Elle ignore aussi sept décennies de résolutions rappelant Israël au droit.
Deux mois après qu’une commission d’enquête des Nations Unies – dans le sillage de tous les organismes des droits de l’homme de premier plan – concluait qu’Israël commettait un génocide à Gaza, le Conseil de sécurité gratifie l’État qui viole heure par heure tous les principes de l’ONU ; l’État qui a déclaré le secrétaire général des Nations Unies non grata, tout comme la Rapporteuse spéciale pour les Territoires occupés, ainsi que l’UNRWA ; l’État qui a ciblé, kidnappé et torturé le personnel de l’ONU à Gaza, bombardé ses écoles, ses centres de soins, ses entrepôts. L’État qui n’a ratifié ni le Statut de Rome, ni la Convention sur les armes chimiques, ni le Traité de non-prolifération des armes nucléaires. L’État dont les services secrets se vantent d’avoir piégé des appareils électroniques dans tous les pays du monde. L’État qui a légalisé la torture et le viol des prisonniers.
Comment peut-on pervertir le droit au point de récompenser ceux qui jour après jour ciblent les enfants à la tête, mutilent et torturent de sang froid, forcent les jeunes mères, les enfants et les vieillards à servir de boucliers humains avant de les exécuter ?
Selon Diana Buttu, « ils font payer aux Palestiniens le prix du sionisme, plutôt que de regarder en face le problème, qui est le sionisme. (…) La question fondamentale, c’est qu’on a laissé un Etat appelé Israël commettre un nettoyage ethnique, nous chasser de nos maisons et de notre pays, et qu’on lui a donné des milliards, en dollars et en armes, pour qu’il commette un nettoyage ethnique et un génocide. »
Deux millions de Palestiniens aux vies broyées vivent dans la poussière de leurs villes disparues. Dans les gravats de maisons d’où émerge parfois un jouet ou un lit d’enfant, dans les avenues et les jardins qui ne sont plus, le désespoir et l’absence de perspectives s’ajoutent aux traumatismes, à la perte, à la peine.
Cependant dans les ruines d’universités et d’hôpitaux réduits à néant, les Palestiniens soignent et enseignent, peignent et sculptent, chantent et dansent.
Personne à Gaza ne sait si le pire est passé ou s’il est à venir.
Mais les Palestiniens savent, dans leur chair, que le droit à l’autodétermination et le droit de résister à l’occupation sont des droits sacrés. Ils lisent, dans les yeux de leurs enfants, que le droit de se nourrir et de se soigner ne sont pas négociables.
La résistance est leur héritage – depuis les vergers de Ya’bad dans les années trente et les paysans constitués en groupes de fedayins dans les années quarante, dont la cause était simple: retourner chez eux, moissonner les champs, récolter les fruits, faire paître leurs troupeaux sur leurs terres.
La force de contrôle et de sujétion internationale est vouée à l’échec. Elle ne va pas réussir là où l’occupant a échoué en dépit d’une Nakba systémique depuis 77 ans et de deux ans de génocide, soutenu par plus de 60 pays.
« Les Palestiniens ne se rendront pas », assure Ramzy Baroud. « Ils n’accepteront pas ce nouvel état de fait imposé par les Etats-Unis, et ils ne se trouveront pas non plus dans une situation où ils n’auront pas le choix. Car il y a toujours un choix, et ce choix, c’est le peuple palestinien, le sumud et la résistance. (…) Que voulez-vous désarmer ? La résistance des Palestiniens est sumud. (…) Vous ne pouvez pas la désarmer. Il s’agit de la volonté collective du peuple. »
Ceux qui se porteront volontaires pour aller tirer sur des adolescents dans un vaste cimetière d’enfants ne forceront pas à la reddition les victimes du génocide. Car les Palestiniens ne luttent pas seulement contre leur propre extermination. Ils sont engagés dans une guerre de libération.
Leur lutte nous dépasse, elle a pour nom justice et liberté. Elle puise dans le sang et les larmes, la terre et l’amour. Dans le serment intime que leurs enfants ne subiront pas ce que leurs parents et leurs grands-parents ont subi avant eux.
En résistant, les Palestiniens préservent leur humanité face à une idéologie de la domination et de la destruction. Et affirment ce qui fait défaut à l’oppresseur : grandeur d’âme et dignité.
« La vision d’Israël pour la région est l’hégémonie », analyse Muhammad Shehada. « Les Etats doivent être dépendants d’eux. (…) Chaque Etat de la région doit être un Etat failli ou vassal, mais en aucun cas un Etat pleinement souverain doté d’un gouvernement représentant son peuple. (…) Les Israéliens sont ivres d’invincibilité et d’impunité, une combinaison qui draine ce qu’il y a de pire dans l’humain : un récit de monopole victimaire doublé d’un récit de supériorité. A cela s’ajoute une impunité totale : vous êtes les victimes, vous êtes supérieurs, vos actes sont justifiés moralement, légalement, politiquement. »
Les Palestiniens devraient être un exemple pour l’humanité. Une leçon de constance, de courage, de lutte à corps perdu pour la justice.
Le monde devrait s’incliner devant leur lutte pour préserver l’humanité et le droit. Devant la beauté d’une société bâtie sur l’entraide et la générosité, que l’occupant n’a pas réussi à briser.
Je voudrais terminer par une pensée pour Hala, 9 ans, dont toute la famille repose sur les dalles de l’hôpital.
Pour les familles de Mourad, 15 ans, Abdallah, 16 ans, Muhammad, 16 ans, Bilal, 15 ans, Mohammad, 15 ans, Jadallah, 15 ans, tous assassinés de sang froid, sous le regard du monde, en Cisjordanie occupée, depuis début novembre.
Le monde a vu chacun de ces garçons, à Tubas, à Beit Ummar, à Halhul, à Tulkarem, à El-Bireh, à Ein Sultan, agoniser aux pieds des soldats avant d’être enlevé par l’armée d’occupation.
Auteur : Marie Schwab
* Marie Schwab milite au Collectif Palestine 12 (Aveyron). Ses textes, lus à l'occasion des rassemblements hebdomadaires dans la ville de Millau, sont « des cris du coeur ! »
25 novembre 2025 – Transmis par l’auteure.

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