Alors que Gaza meurt de faim, les Israéliens bombardent un centre alimentaire de l’UNRWA

10 mai 2025 - Vue des destructions après que l'armée israélienne a pris pour cible un bâtiment de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNWRA) dans le camp de réfugiés de Jabaliya, dans la bande de Gaza - Photo de Mahmoud Issa / Anadolu

Par Hamza Salha, Sharif Abdel Kouddous

Israël cible les maigres moyens d’accès à la nourriture des Palestiniens, bombardant deux cuisines de fortune et le centre de distribution de l’UNRWA à Jabalia ces derniers jours.

CAMPS DE RÉFUGIÉS DE JABALIYA, GAZA — Vendredi, peu après le coucher du soleil, un missile israélien a frappé un bâtiment de l’UNRWA au milieu du camp de réfugiés de Jabaliya, dans le nord de Gaza, tuant quatre personnes, dont un enfant selon des témoins directs, et endommageant gravement un centre de distribution alimentaire, un entrepôt et un centre de santé gérés par l’agence des Nations unies pour les réfugiés.

« Toute la zone a été détruite et réduite en ruines », a déclaré à Drop Site Al Moatassem Shalayel, 20 ans, qui avait quitté les lieux quelques instants auparavant. L’oncle de Shalayel, Ehab Abu Hussein, âgé de 45 ans, a été tué dans le bombardement. « Nous rassemblons ses effets personnels, comme son chapelet et sa casquette. Son corps a été déchiqueté, mais nous voulons garder un souvenir de lui. »

Shalayel a perdu plusieurs membres de sa famille au cours de la guerre. « Je n’ai plus aucun oncle ni aucune tante, seulement ma grand-mère », a-t-il déclaré.

Peu après, le porte-parole de l’armée israélienne a déclaré avoir attaqué Jabaliya à l’aide de moyens de surveillance aérienne et de munitions de précision.

« Tout a été détruit et bombardé. Il ne reste plus rien, tout est complètement détruit », a ajouté Shalayel. « [L’objectif d’Israël] est d’affamer et d’étouffer la population. Leur but est de nous empêcher de manger et de boire. Ils veulent simplement nous faire mourir de faim. »

10 mai 2025 – Al Moatassem Shalayel, âgé de 20 ans, fouille les décombres après une frappe aérienne israélienne sur un bâtiment de l’UNRWA dans le camp de réfugiés de Jabaliya, qui a tué quatre personnes, dont son oncle – Photo : Hamza Salha

L’attaque du 9 mai contre le centre de distribution de l’ONU s’inscrit dans le cadre de la campagne de bombardements intensifs menée par Israël depuis la reprise des hostilités le 18 mars, après un bref « cessez-le-feu ».

Depuis lors, Israël a régulièrement pris pour cible des cuisines communautaires, des camps de déplacés, des écoles, des hôpitaux, des « zones humanitaires » et d’autres lieux de rassemblement civils.

Rien que samedi, les frappes aériennes israéliennes ont détruit deux tentes utilisées pour préparer des repas à Khan Younis et à Gaza.

Selon le ministère de la Santé de Gaza, plus de 2700 Palestiniens ont été tués au cours des sept dernières semaines, dont plus de 900 enfants. Le bilan officiel depuis le début de l’offensive génocidaire israélienne s’élève à près de 53 000 morts, et plusieurs milliers d’autres sont toujours portées disparues sous les décombres.

Depuis le 2 mars, Israël impose également un blocus total sur Gaza, interdisant l’entrée de toute nourriture, médicament, carburant et autres produits de première nécessité dans le cadre d’une politique d’affamement forcé et de punition collective qui en est maintenant à son troisième mois.

Des milliers de Palestiniens souffrent de malnutrition aiguë, dont des milliers d’enfants, alors que Gaza est plongée dans la pire crise humanitaire depuis le début de la guerre.

Les organisations humanitaires ont cessé de distribuer de la nourriture et les boulangeries ont fermé. Au cours des derniers jours, un tiers des cuisines communautaires soutenues par l’ONU, qui constituent le dernier recours pour une grande partie de la population, ont fermé leurs portes en raison de l’épuisement des réserves alimentaires et de l’accès limité au carburant.

« Nous vivons grâce aux cuisines caritatives. Chaque jour, ils nous apportent des lentilles, ils nous épuisent avec des lentilles », a déclaré à Drop Site Tala Ghassan Al-Masri, 13 ans, qui a survécu au bombardement de vendredi à Jabaliya.

« J’aimerais pouvoir manger du pain, des pommes de terre frites, des tomates et les plats que ma sœur et ma mère nous préparaient. »

10 mai 2025 – Tala Ghassan Al-Masri, 13 ans, assise sur les décombres d’un bâtiment de l’UNRWA dans le camp de réfugiés de Jabaliya, bombardé par l’armée israélienne – Photo : Hamza Salha

Les marchés sont presque vides et les prix des produits de première nécessité comme la farine ou les légumes ont explosé.

Hala al-Ghandour, 9 ans, se trouvait dans un marché voisin de Jabaliya vendredi lorsque l’attaque aérienne israélienne a frappé le bâtiment de l’UNRWA. « J’ai entendu un grand bruit, puis j’ai vu un éclair et une explosion », a-t-elle raconté. « Je venais acheter une tomate et un concombre. Tout est cher, et nous n’avons pas les moyens d’acheter grand-chose. »

La semaine dernière, le cabinet de sécurité israélien aurait approuvé un plan visant à intensifier encore son offensive militaire sur Gaza et proposé un plan pour acheminer des quantités limitées d’aide sous de sévères restrictions, en établissant des zones militarisées à l’intérieur de Gaza où des entrepreneurs privés, dont potentiellement ceux d’une entreprise américaine, distribueraient de la nourriture selon un processus comprenant des contrôles de sécurité très stricts et des quantités contrôlées en calories.

Quinze organismes des Nations unies et plus de 200 ONG ont dénoncé ce plan dans une déclaration commune.

« Ce plan semble conçu pour renforcer le contrôle israélien sur les fournitures vitales et il obligera les gens à se rendre dans des zones militaires, les mettant ainsi en danger pour pouvoir recevoir de l’aide », a déclaré Tamara Alrifai, porte-parole de l’UNRWA, à Drop Site.

Mme Alrifai a ajouté que ce plan était non seulement « contraire aux principes humanitaires », mais aussi « logistiquement irréalisable ».

Le plan propose d’autoriser l’entrée de soixante camions de fournitures par jour, ce qui est bien en deçà du minimum de 500 camions par jour jugé nécessaire par l’ONU.

« Il s’agit d’une tentative d’imposer une alternative au système humanitaire multilatéral internationalement reconnu, dirigé par l’ONU et auquel participent d’autres organisations humanitaires. Il existe tout un écosystème qui fonctionne pour la conduite et la fourniture de l’aide humanitaire dans les situations d’urgence, et ce plan vise à ignorer complètement ce système et à le remplacer », a-t-elle déclaré.

Ce plan mettra en danger la vie des civils, car ils seront « autorisés » – mais en réalité contraints – à se rendre dans les centres de distribution désignés par Israël dans le sud, alors que les bombardements et les hostilités se poursuivent. »

L’administration Trump semble également aller de l’avant avec son propre plan de distribution de l’aide, qui serait mené par une « fondation » non gouvernementale nouvellement créée et impliquerait des sociétés de sécurité privées, d’anciens officiers de l’armée américaine et des responsables de l’aide humanitaire.

Le président Trump doit se rendre dans la région cette semaine, avec des étapes en Arabie saoudite, au Qatar et aux Émirats arabes unis.

Le siège et les bombardements continus d’Israël ont également sévèrement limité l’accès des Palestiniens à l’eau à Gaza. Samedi, l’Autorité palestinienne de l’eau a publié une déclaration indiquant que la destruction des infrastructures et l’interdiction d’entrée du carburant ont entraîné un arrêt quasi total de l’approvisionnement en eau, décrivant Gaza comme « une région qui meurt de soif ».

Selon l’UNICEF, environ 75 % des ménages ont signalé une détérioration de leur accès à l’eau au cours du mois dernier, et les cas de diarrhée aiguë représentent désormais un quart des cas de maladie enregistrés à Gaza.

À Jabaliya, comme dans d’autres zones, les réseaux d’égouts ont été détruits ou manquent de carburant pour fonctionner, ce qui entraîne des inondations d’eaux usées dans les rues et une prolifération de rongeurs et d’insectes dans les abris surpeuplés, selon les responsables municipaux de Jabaliya.

« Mon message au monde est que nous voulons que cette guerre cesse, nous voulons que la vie reprenne son cours normal », a déclaré Shalayel. « Nous voulons voir des jours meilleurs dans ce qui reste de notre vie. C’est tout. »


11 mai 2025 – Drop Site News – Traduction : Chronique de Palestine

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