Pourquoi la CPI donne aux Israéliens « un permis pour tuer »

17 novembre 2023 - Une frappe aérienne israélienne sur le siège même du mouvement Fatah dans le camp de réfugiés de Balata, a causé de graves dommages, tuant cinq personnes et en blessant plusieurs autres. Selon les chiffres de l'ONU, au moins 205 Palestiniens, dont plus de 50 enfants, ont été assassinés par les forces coloniales israéliennes en Cisjordanie depuis l'attaque du Hamas du 7 octobre - Photo : Activestills

Par Rachel Hamdoun

Laisser faire le meurtre de bébés à Gaza est une chose, mais contribuer à le commettre, c’est prêter la main à la catastrophe qui va exploser et emporter l’Occident avec elle, en mettant en lumière la faillite des normes du droit international censées protéger la population de Gaza.

« Si « Israël » n’existait, les États-Unis devraient l’inventer. » – une vieille citation, aussi vieille que celui qui l’a prononcée – « Genocide Joe », alias le président américain Joe Biden.

Les États-Unis ont modelé et formaté l’ « Israël » d’aujourd’hui, et ils jouent avec l’Etat hébreu comme avec une marionnette. On peut aussi dire que les États-Unis jouent avec les principes du droit international comme on joue du violon.

Par conséquent, pour comprendre l’échec de la Cour pénale internationale aujourd’hui, il faut remonter aux racines corrompues de la Cour pénale internationale (CPI).

La CPI a été créée par l’Assemblée générale des Nations unies, à l’initiative des États-Unis, de la Chine, de la France, de l’Union soviétique et du Royaume-Uni. Elle compte des États membres qui respectent le statut de Rome, lequel définit les crimes en droit international.

Les États-Unis ne sont pas membres de la CPI, pas plus qu’ « Israël » – et ils refusent de l’être – puisqu’ils ont voté contre le statut de Rome de 1998, le traité qui définit et décrit le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et le crime d’agression, et qui a conduit plus tard à la création de la CPI.

Sans les forces d’occupation d’ « Israël » – commandées, supervisées et manipulées par les États-Unis – les États-Unis n’auraient pas de porte d’entrée au Moyen-Orient. Les États-Unis sont ouvertement complices du génocide à Gaza, par l’intermédiaire de Joe le génocidaire et d’Antony l’antagoniste (Blinken).

Admettre le meurtre de bébés à Gaza est une chose, mais contribuer à le commettre, c’est prêter la main à la catastrophe qui va exploser et emporter l’Occident avec elle, en mettant en lumière la faillite des principes du droit international censés protéger la population de Gaza.

Le monde doit faire cesser la guerre

Se plonger dans la liste interminable des violations du droit international dont est coupable « Israël » ne nous mènera nulle part, car elle est parfaitement connue et étalée au grand jour sur tous les écrans numériques du monde, malgré les efforts déployés par l’Occident pour la dissimuler.

Étant donné que la CPI poursuit des individus et non des pays, elle peut traduire Netanyahu en justice, même si « Israël » n’a pas signé le Statut de Rome.

Les personnes soupçonnées d’avoir commis des crimes énumérés dans le Statut de Rome peuvent, en effet, être poursuivies même si l’État auquel elles appartiennent n’a pas signé le Statut de Rome.

Si la CPI juge les plaintes recevables et accepte d’ouvrir une enquête, Netanyahu peut faire appel de la décision de le poursuivre et les États-Unis peuvent éventuellement soutenir cet appel, ce qui rallongera encore le procès et empêchera le plus longtemps possible que justice soit faite (comme c’est toujours le cas avec les États-Unis).

La Turquie a déjà déposé, auprès de la CPI, une demande de poursuivre Netanyahu pour crimes de guerre, tout comme la Colombie, l’Algérie, l’Afrique du Sud, le Bangladesh, Djibouti, les Comores et la Bolivie.

Même si tous les pays du monde demandaient à la CPI de poursuivre Netanyahu, les États-Unis les en empêcheraient s’ils le voulaient, ils feraient tout leur possible, ils retourneraient toutes les pierres pour s’assurer qu’ « Israël » ne soit jamais convoqué devant la Cour pénale pour répondre du génocide qu’il commet en Palestine occupée.

Malgré tout, une, deux ou 200 demandes peuvent constituer un test décisif de la sincérité des principes et des valeurs incontournables des droits de l’homme qui fondent la CPI, valeurs trop souvent ébranlées et manipulées par les États-Unis et l’Europe qui, menés par leur cupidité, abusent de leur situation hégémonique.

Il est donc important de commencer par rappeler la définition juridique du « génocide » donnée par l’article 6 du Statut de Rome. C’est « un des actes ci-après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux » :

  • Tuer des membres du groupe ;
  • causer des dommages corporels ou psychologiques graves à des membres du groupe ;
  • Soumettre délibérément le groupe à des conditions d’existence entraînant sa destruction physique totale ou partielle ;
  • Imposer des mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
  • Transférer de force les enfants du groupe à un autre groupe”.

L’article 7 définit les « crimes contre l’humanité x comme faisant partie d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et menée en toute connaissance de cause :

  • Le meurtre ;
  • l’extermination ;
  • la réduction en esclavage ;
  • la déportation ou le transfert forcé de population ;
  • l’emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des règles fondamentales du droit international ;
  • la torture ;
  • le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
  • la persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des raisons politiques, raciales, nationales, ethniques, culturelles, religieuses, de genre…
  • La disparition forcée de personnes ;
  • Le crime d’apartheid ;
  • d’autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

Même si l’on croit qu’ « Israël » ou Netanyahu n’ont pas commis tous les crimes susmentionnés, la guerre contre Gaza après le 7 octobre met en lumière tout un ensemble de preuves flagrantes, et seules les personnes aveuglées par l’ignorance (ou la mauvaise foi, ndt) peuvent prétendre le contraire.

Netanyahu et son cabinet de guerre ont ordonné le meurtre d’hommes, de femmes et d’enfants palestiniens, ont causé de graves lésions corporelles au moyen d’armes chimiques et de phosphore blanc (qui brûle et calcine la peau) et ont délibérément créé des conditions qui provoquent la mort des Palestiniens et leur déportation forcée (comme c’est le cas actuellement à Gaza quand on leur dit de se déplacer vers le sud où ils sont bombardés), sans compter la torture et les violences sexuelles (comme on l’a vu dans leurs prisons de l’occupation), les persécutions, le crime d’apartheid et autres actes inhumains qui causent intentionnellement de graves souffrances et de sérieuses blessures mentales et physiques.

Si les mots ne suffisent pas, alors les images des enfants de Gaza amputés, qui, à leur réveil, ne voient que du sang, des enfants non identifiés mis en morceaux dans des sacs mortuaires pour être jetés dans des fosses communes, devrait suffire à forcer le monde à se rendre à l’évidence et à admettre l’échec de la justice internationale dans la protection d’un peuple qui n’a jamais vu la lumière au bout du tunnel, qui n’a jamais connu un seul jour de paix.

Le duo diabolique et business as usual

Le Statut de Rome mis à part, le droit international coutumier est devenu une simple option tant pour « Israël » que pour son bienveillant protecteur, les Etats-Unis. A quoi servent les droits de l’homme s’ils ne bénéficient pas à l’économie, à la position, aux accords politiques ? Pour le duo diabolique, les droits de l’homme sont devenus une transaction de « business-as-usual ».

« Israël » a pris pour cible non seulement le personnel médical et les journalistes, mais aussi les hôpitaux qui accueillent des centaines, voire des milliers de blessés. Tous les trois sont protégés par le droit international et le protocole additionnel I de la Convention de Genève.

« Israël » a coupé la nourriture, le carburant, l’eau et l’électricité à Gaza, ce qui constitue clairement un nettoyage ethnique du peuple palestinien (voir ci-dessus les conditions délibérément infligées pour contribuer à la destruction de la vie palestinienne), sans compter qu’utiliser la famine comme méthode de guerre, viole aussi le protocole additionnel I.

Pourtant, aucun président ou chef de gouvernement européen ne s’est levé pour qualifier ouvertement de « massacre » l’effusion de sang à Gaza, parce que business as usual pourrait se transformer en pas de business du tout et que serait la vie humaine sans business ?

Lorsque les États-Unis menacent la CPI de représailles en cas d’action en justice contre l’un de leurs ressortissants ou l’un de ses alliés, et que la CPI reste silencieuse alors que les cris des enfants sont étouffés par le fracas des bombes, on peut se demander à quoi sert cette institution dont la justice rendue aux victimes de crimes de guerre est à géométrie variable ?

En mars 2021, lorsque la procureure de la CPI Fatou Bensouda a ouvert une enquête sur Gaza et la Cisjordanie, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré : « Les États-Unis s’opposent fermement à cette décision et sont profondément déçus ».

Netanyahu a également condamné l’enquête, déclarant : « La décision de la Cour internationale d’ouvrir aujourd’hui une enquête contre Israël pour crimes de guerre est absurde. C’est de l’antisémitisme pur et simple et le comble de l’hypocrisie ».

Le visa de Mme Bensouda pour les États-Unis lui a été retiré suite à l’intervention du président américain de l’époque, Donald Trump.

Droits de l’homme ET démocratie à géométrie variable, Mesdames et Messieurs !

Les enfants de Gaza finissent par faire les frais des accords conclus entre « Israël » et les États-Unis, ou entre « Israël » et ses partenaires commerciaux habituels qui étaient autrefois des colonisateurs (la pomme ne tombe pas loin de l’arbre, n’est-ce pas ?).

Le nombre de martyrs et d’enfants assassinés continue d’augmenter comme augmente la complicité des États-Unis et de l’Europe, sous l’emprise de gouvernements qui prêchent la démocratie sans la pratiquer et qui nourrissent un monstre créé pour poursuivre l’héritage du colonialisme, un montre muni de l’arc du sionisme et de flèches fabriquées spécialement pour percer le cœur des enfants de Gaza et chasser les Palestiniens de leurs terres, un arc et des flèches payés par le vol des terres des peuples autochtones de l’Amérique.

19 novembre 2023 – Al-Mayadeen – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet