Palestine occupée : deux attaques de la résistance en deux jours

4 juillet 2023 - L'opération militaire israélienne dans le camp de réfugiés de Jénine se poursuit pour tenter de réprimer la résistance armée palestinienne. Au moins 11 Palestiniens ont été tués et des dizaines d'autres blessés par des frappes aériennes de drones et des tirs à balles réelles. Les réfugiés du camp de Jénine ont été expulsés principalement de Haïfa et de ses villages, une région qui a été nettoyée ethniquement par le colonialisme israélien lors de la Nakba de 1948. Israël continue d'empêcher les réfugiés de retourner sur leurs terres tout en les soumettant à un régime militaire en Cisjordanie. Photo : @wahaj_bani_moufleh /Activestills

Par Mondoweiss

Les villes de Huwwara et d’Hébron ont été bouclées par l’armée israélienne à la suite d’une chasse à l’homme menée après deux fusillades conduites par des « loups solitaires », tandis que des colons israéliens se livrent à des pogroms de vengeance contre les Palestiniens.

Du 19 au 21 août

  • Des colons israéliens ont repris leurs attaques contre la ville de Huwwara, dans la région de Naplouse, après que deux Israéliens ont été tués par un tireur palestinien présumé dans la ville le samedi 19 août.

    L’incident s’est produit dans l’après-midi dans une station de lavage de voitures sur la route principale de la ville, qui sert de voie de communication principale entre la ville de Naplouse au nord et les villages environnants au sud.

    Cette route est également empruntée par les colons israéliens qui, en plus de participer aux pogroms meurtriers dans la ville, passent par là et fréquentent certains commerces.

    Selon les médias israéliens et les responsables de l’armée, deux Israéliens originaires de la ville d’Ashdod, sur la côte sud de la Méditerranée, se trouvaient à Huwwara pour faire laver leur voiture lorsqu’un jeune homme s’est approché d’eux à pied et leur a tiré dessus avec une arme de poing avant de s’enfuir.

    Dans les heures qui ont suivi la fusillade, les forces israéliennes se sont lancées dans une vaste chasse à l’homme, procédant à des bouclages généralisés dans la région de Naplouse et à des raids massifs dans les villages environnants, notamment Beita, Awarta et Aqraba.

    Selon le Croissant-Rouge palestinien, plus de 100 Palestiniens ont été blessés par les forces israéliennes lors d’un raid à Beita. Au moins deux Palestiniens ont été arrêtés au cours de ces raids.

    Pendant ce temps, les colons israéliens se sont déchaînés, attaquant à coups de pierres des véhicules palestiniens sur les routes principales, ainsi que des maisons dans la ville de Burin.

    Des groupes de colons auraient également publié des appels à « brûler Huwwara », selon Middle East Eye. Au cours de l’année écoulée, Huwwara est devenue la cible de colons fascistes qui, avec le soutien de ministres du gouvernement, ont commis un certain nombre de pogroms dans la ville, attaquant des personnes et leurs biens, et incendiant des véhicules et des maisons.

  • Un Palestinien de 19 ans qui avait été grièvement blessé par des tirs israéliens mercredi dernier a succombé à ses blessures samedi 19 août.

    Selon le ministère palestinien de la santé, Muhammad Abu Asab a reçu une balle dans la tête tirée par les forces israéliennes lors d’un raid dans le camp de réfugiés de Balata, à Naplouse, la semaine dernière, et se trouvait depuis dans un état critique à l’hôpital.

    Dans le même temps, à Jérusalem-Est occupée, un Palestinien de 30 ans, père de deux enfants, a succombé aux blessures qu’il avait subies sous les tirs israéliens il y a deux ans.

    L’agence de presse Wafa, propriété de l’Autorité palestinienne, a rapporté que Hamza Abu Sneineh, un résident de la vieille ville de Jérusalem, avait été touché à l’œil par une balle en caoutchouc lors d’une attaque israélienne contre l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa pendant le mois de Ramadan en mai 2021.

    Abu Sneineh aurait reçu plusieurs traitements au cours des deux dernières années en raison de complications liées à sa blessure. Il a succombé à ses blessures le vendredi 18 août. Toujours à Jérusalem-Est, deux Palestiniens, dont un garçon de 15 ans, ont été grièvement blessés par des tirs israéliens.

  • Neuf détenus administratifs palestiniens ont entamé une grève de la faim pour une durée illimitée, pour protester contre leur détention illégale par les forces israéliennes.

    Les prisonniers ont entamé un certain nombre de grèves individuelles, allant de 11 à 18 jours.

    Parmi eux se trouvent d’anciens prisonniers et grévistes de la faim comme Kayed al-Fasfous qui, en 2021, à l’âge de 32 ans, a entamé une grève de la faim de 131 jours qui l’a amené à frôler la mort pour protester contre la campagne de harcèlement menée par Israël à son encontre depuis des années, qui comprenait plus de cinq ans de condamnations à la détention administrative.

    La détention administrative est une politique par laquelle Israël arrête des Palestiniens et les maintient en détention pendant des mois, voire des années, sans jamais les inculper ni les juger.

    Cette politique est généralement utilisée pour cibler et punir les Palestiniens en raison de leurs activités ou affiliations politiques, même si aucun « crime » officiel n’a été commis en vertu de la loi militaire israélienne, qui régit la vie des Palestiniens en Cisjordanie occupée.

  • Un colon israélien a été tué et un autre blessé lors d’une opération de tir sur une autoroute dans le district d’Hébron, dans le sud de la Cisjordanie.

    Selon les médias israéliens, le colon tué a été identifié comme une femme d’une quarantaine d’années qui résidait dans la colonie illégale de Beit Hagai, proche du lieu de l’opération.

    Un second passager, un homme également âgé d’une quarantaine d’années, a été grièvement blessé lors de l’incident, mais son état est stable après avoir été transporté à l’hôpital.

    Les forces israéliennes se sont lancées dans une vaste chasse à l’homme pour retrouver le tireur, en mettant en place un certain nombre de points de contrôle volants et de fermetures de routes dans le district d’Hébron.

Le contexte

Les actes de résistance contre les forces israéliennes ont nettement diminué au cours des derniers mois. Depuis la bataille de deux jours à Jénine en juin dernier, ces chiffres relativement bas sont restés constants, qu’il s’agisse de fusillades, de jets de pierres, d’utilisation de cocktails Molotov, d’utilisation d’engins explosifs improvisés, de tirs sur des drones ou d’utilisation de feux d’artifice contre l’armée israélienne.

En comparaison, les mois précédant l’opération de Jénine ont été marqués par une prolifération des actes de résistance : plus de cent fusillades par mois de janvier à mars, avant de redescendre à la moitié de ce chiffre ; l’explosion de 30 à 40 engins explosifs improvisés au cours de la même période, avant de redescendre également, et ainsi de suite.

On serait tenté de conclure de ces informations que l’opération israélienne dà Jénine a réussi à supprimer la résistance armée dans le camp de réfugiés. Mais ces chiffres n’ont qu’une portée limitée.

Ils n’indiquent pas grand-chose sur l’état des organisations de résistance ou de leurs activités clandestines, ni sur l’état de leur coordination et de leur mobilisation au sein de leurs communautés, et ils révèlent encore moins si les organisations de résistance comme la Brigade de Jénine fonctionnent selon une stratégie intentionnelle ou même quelle pourrait être cette stratégie.

Bien sûr, les tentatives de limiter les activités de la brigade de Jénine n’ont pas manqué, y compris la deuxième phase non officielle de l’opération qui a vu l’affirmation de la présence militaire des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne dans la région de Jénine, afin de servir de « tampon » palestinien entre la résistance et d’éventuelles cibles israéliennes.

Quoi qu’il en soit, cela n’a pas eu beaucoup d’influence sur l’activité interne des groupes armés eux-mêmes, et cette période de calme s’apparente davantage à une pause temporaire.

Les analystes israéliens ont prédit la même chose, estimant que les efforts de contre-insurrection ne provoqueraient qu’un arrêt temporaire de la résistance, mais qu’ils ne changeraient pas grand-chose à la situation en Cisjordanie.

Les opérations de ces deux derniers jours sont peut-être venues confirmer ces prévisions.

Si les circonstances et l’identité des responsables des attaques restent inconnues, les détails des attaques indiquent qu’il s’agit d’opérations de « loups solitaires » – en d’autres termes, Israël est impuissant à les anticiper et à les arrêter, et elles continuent de poser un problème de sécurité pour les forces israéliennes.

Huwwara est désormais devenu un point de confrontation régulier et facile avec les colons qui traversent souvent la ville en voiture pour rejoindre les colonies voisines, et il n’est pas surprenant qu’un itinéraire alternatif ait été prévu pour eux.

Hébron, en revanche, est restée largement en sommeil, ce qui fait de l’opération de lundi une surprise.

Ces événements ne signalent pas nécessairement une tendance à la hausse ou une résurgence – et en tout état de cause, il y a de fortes chances qu’ils ne soient liés à aucun groupe organisé – mais ils indiquent qu’après deux ans d’une campagne contre-insurrectionnelle implacable, et huit ans depuis la prolifération du modèle de résistance du « loup solitaire » depuis l’ « Intifada des couteaux » de 2015, les Palestiniens peuvent encore trouver en eux la force de résister par tous les moyens nécessaires.

Chiffres importants

  • On estime à 229 le nombre de Palestiniens assassinés par des tirs israéliens, notamment de soldats et de colons, depuis le début de l’année.
  • Israël emprisonne actuellement 5100 prisonniers politiques palestiniens dans ses prisons, selon l’association de défense des droits des prisonniers Addameer.
  • 1200 prisonniers politiques palestiniens sont actuellement placés en détention administrative, une pratique qui consiste à emprisonner des Palestiniens sans inculpation ni jugement.

21 août 2023 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine