
20 juillet 2025 - Un adieu à Fadi Al-Najjar, âgé de 3 mois, décédé des suites de la malnutrition. Le ministère de la Santé à Gaza confirme le décès de 72 enfants depuis le début de la guerre à Gaza, en raison de la malnutrition causée par le manque de lait et la fermeture continue des points de passage vers le territoire assiégé et bombardé - Photo : Doaa Albaz / Activestills
Le chef des services secrets israéliens, le Mossad, s’est récemment rendu à Washington afin de coordonner avec la Maison Blanche un plan visant à expulser les Palestiniens de Gaza. Ce plan, qui prévoit également la famine et le massacre des habitants de Gaza, rappelle les pires atrocités commises par les nazis pendant l’Holocauste.
Alors que le génocide indescriptible à Gaza atteint sa phase la plus cauchemardesque à ce jour, les dirigeants israéliens pensent avoir trouvé une solution qui leur permettra de réaliser leur ambition de vider la bande de Gaza de toute vie palestinienne.
Il s’agit d’un plan qui, comme le note avec justesse Gideon Levy, aurait été digne d’Adolf Eichmann.
La semaine dernière, le chef de l’agence d’espionnage israélienne Mossad, David Barnea, s’est rendu à Washington pour s’entretenir avec Steve Witkoff, l’émissaire principal de Donald Trump au Moyen-Orient, au sujet de plans visant à transférer un grand nombre de personnes de Gaza vers des pays tiers.
Selon des sources proches des négociations, Israël serait en pourparlers avec l’Éthiopie, la Libye et l’Indonésie dans l’espoir que ces pays acceptent d’accueillir les personnes fuyant le carnage à Gaza.
L’Éthiopie, la Libye et l’Indonésie vont-elles prêter la main à cette horreur ?
Le simple fait que cette idée existe montre clairement à quel point il est imprudent pour les principaux dirigeants mondiaux de lancer des idées en public sans réfléchir ni anticiper les conséquences.
Peu après avoir repris possession de la Maison Blanche, Donald Trump a fait exactement cela, envisageant de transformer Gaza en station balnéaire pour riches, après avoir envoyé ses habitants ailleurs.
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Il l’a fait malgré le fait que son prédécesseur, Joe Biden, avait lancé l’idée que l’Égypte et la Jordanie puissent accueillir une partie de la population assiégée de Gaza et s’était heurté à un mur de résistance infranchissable de la part de ces alliés.
Après avoir rencontré une résistance similaire non seulement de la part de l’Égypte et de la Jordanie, mais aussi de l’ensemble du monde arabe, Trump a abandonné cette idée. Mais le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu n’y a jamais renoncé.
Lorsque Netanyahu était à la Maison Blanche au début du mois, un journaliste a interrogé Trump sur Gaza. Trump, de manière révélatrice, a renvoyé la question à Netanyahu, qui a répondu en citant le « plan » de Trump visant à déplacer les Gazaouis, affirmant qu’il s’agirait d’un libre choix, que ceux qui voudraient rester pourraient rester et ceux qui voudraient partir pourraient partir.
Cette rhétorique n’a trompé personne. Il est évident que l’idée de « libre choix » de Netanyahu revient à prétendre que l’on pointe une arme sur la tête de quelqu’un et que l’on lui donne le « libre choix » de signer un contrat qu’il n’acceptera jamais ou d’être abattu.
Israël a rendu Gaza inhabitable à tous les niveaux et s’efforce désormais progressivement de regrouper les Palestiniens survivants dans un camp de concentration situé à l’emplacement de l’ancienne ville de Rafah.
Mais la réaction à ce camp de concentration a été si vive – même l’ancien Premier ministre israélien du Likoud Ehud Olmert l’a qualifié de tel – qu’Israël ne peut pas considérer cela comme une solution définitive.
Netanyahu espère désormais que le camp de concentration, ou peut-être plusieurs camps (Israël a évoqué la construction de plusieurs), sera le pistolet qui forcera les Palestiniens à se « porter volontaires » pour partir. Mais cela ne résout pas le problème de leur destination.
Bien qu’Israël affirme à Washington que ces trois pays – l’Éthiopie, la Libye et l’Indonésie – sont prêts à accueillir un grand nombre de Gazaouis, cela semble peu probable.
Parmi ces trois pays, seule l’Indonésie dispose d’une économie et d’un système politique suffisamment stables pour envisager d’accueillir un grand nombre de réfugiés.
Dans le cas de l’Éthiopie et de la Libye, il s’agit simplement d’explorer les pots-de-vin que les États-Unis pourraient offrir en échange de leur coopération dans le nettoyage ethnique de Gaza.
La Libye reste un pays divisé, où une trêve fragile a été conclue après de récents affrontements. Le cessez-le-feu entre les gouvernements rivaux en Libye tient en grande partie depuis près de cinq ans, mais les tensions montent, tout comme la frustration de la population, face à l’incapacité des deux parties à s’entendre sur les règles des élections et la transition vers un État unifié.
Ce n’est pas un environnement capable d’absorber des centaines de milliers de réfugiés désespérés. En effet, la Libye elle-même ne compte qu’environ 7,3 millions d’habitants, de sorte que l’arrivée soudaine d’un nombre important de personnes dans le pays constituerait un énorme bouleversement.
L’Éthiopie, bien sûr, est beaucoup plus grande, avec une population d’environ 150,5 millions d’habitants, mais c’est aussi l’un des pays les plus pauvres du monde. Les hostilités ethniques entre les territoires fédérés de l’Éthiopie et au sein de ceux-ci contribuent fortement à l’instabilité politique, comme l’a récemment montré la guerre du Tigré, dont le pays, en particulier la région du Tigré, doit encore se remettre.
Il est évident que l’Éthiopie n’a pas les moyens d’accueillir des centaines de milliers de réfugiés qui, même selon les normes applicables aux réfugiés de guerre, ont été horriblement traumatisés.
Il reste donc l’Indonésie, qui a déjà certaines raisons de coopérer avec Israël. Le pays tente depuis des années d’adhérer à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), mais il ne peut le faire tant qu’il n’entretient pas de relations officielles avec tous les membres de l’OCDE.
Bien que l’Indonésie n’entretienne aucune relation diplomatique officielle avec Israël, les deux pays entretiennent depuis longtemps des relations secrètes dans les domaines du commerce et desoutils répressifs.
Avant le génocide de Gaza, il existait une possibilité de relations plus officielles, mais l’Indonésie s’est retirée de cette option, tout en déclarant qu’elle établirait immédiatement des relations avec Israël si celui-ci reconnaissait l’État palestinien.
Le président indonésien Prabowo Subianto a d’ailleurs réaffirmé cet engagement il y a deux mois à peine.
Parmi les trois pays mentionnés, l’Indonésie est le seul capable d’accueillir un nombre important de réfugiés palestiniens. Son économie est suffisamment stable pour qu’elle puisse, avec le soutien des États-Unis, absorber les nouveaux arrivants.
Bien que le pays soit ethniquement diversifié, les violences sectaires ne constituent qu’un problème mineur et son système politique est relativement stable.
Mais l’Indonésie serait confrontée au même problème que tout pays musulman : elle ne pourrait pas se permettre d’être considérée comme complice d’Israël dans son nettoyage ethnique de la population de Gaza.
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En effet, le faible niveau de troubles internes dans le pays pourrait rapidement s’intensifier, certaines factions pouvant exprimer violemment leur opposition. Cela pourrait en fait entraver la capacité de Jakarta à rejoindre l’OCDE, car cela rendrait la reconnaissance de l’état sioniste encore plus délicate sur le plan politique.
L’Indonésie est le seul pays qui ait actuellement intérêt à coopérer et qui pourrait être davantage incité par les cadeaux économiques et commerciaux américains. Pourtant, même dans ce cas, il reste très improbable qu’elle accepte une mesure qui serait universellement dénoncée dans le monde musulman et extrêmement impopulaire au niveau national.
Une cruauté qui dépasse l’entendement
Telle est la situation actuelle. Netanyahu, et certainement Barnea, savent très bien qu’ils n’ont nulle part où chasser la population de Gaza. Mais, selon eux, cela peut changer.
Alors qu’Israël intensifie ses attaques contre Deir al Balah et maintient son blocus pour empêcher toute aide alimentaire d’atteindre les bébés affamés de Gaza, il pousse progressivement la population vers le sud et vers les sites où il prévoit d’installer ses camps de concentration.
Ses forces rasent systématiquement ce qui reste des villes du nord et du centre de Gaza.
Pendant ce temps, la stratégie de la famine s’intensifie. Mardi, les hôpitaux de Gaza ont signalé que quinze personnes supplémentaires étaient mortes de faim au cours des dernières 24 heures, portant à 101 le nombre total de décès par famine, dont 80 enfants.
Ce chiffre est certainement sous-estimé, car les hôpitaux ne peuvent signaler que les décès dont ils ont directement connaissance. De plus, de nombreux autres décès de personnes âgées, de nouveau-nés ou de malades chroniques ne seront pas directement attribués à la faim, mais simplement précipités par celle-ci.
Le massacre des Palestiniens qui font la queue pour obtenir le maigre aide humanitaire qu’ils peuvent obtenir à travers les galeries de tir mises en place par la meurtrière « Fondation humanitaire de Gaza » n’est pas seulement un sport pour les soldats sadiques israéliens et les mercenaires américains, même si cela peut le sembler.
Ces morts, qui ont désormais dépassé le millier, ont un objectif supplémentaire : accroître le désespoir des Palestiniens et faire en sorte que s’ils survivent, ils saisissent la moindre occasion de quitter Gaza, quel que soit leur attachement à la Palestine.
La stratégie ne consiste pas seulement à accroître les souffrances de la population de Gaza au point qu’elle veuille partir. Certains tiendront bon jusqu’à la mort, mais combien de parents peuvent regarder leurs enfants, leurs bébés, mourir de faim ?
Bien sûr, ils partiront s’ils le peuvent, avec le pistolet israélien de la famine pointé sur la tête de leurs enfants ou d’autres êtres chers.
Et lorsque ce cri sera suffisamment fort, Israël s’attend à ce que certains pays accueillent les réfugiés. C’est une stratégie dont la cruauté dépasse l’entendement.
C’est pour cela que Barnea est venu à Washington, afin de préparer le terrain. David Barnea, fils et petit-fils de survivants de l’Holocauste, est venu à Washington pour vendre ce plan.
Comme l’a dit le journaliste israélien Gideon Levy, Barnea « est un haut fonctionnaire obéissant, qui n’a jamais causé de friction avec ses supérieurs. Cela vous semble familier ? C’est le héros de la campagne d’amputations massives à l’aide de talkies-walkies. Si vous l’envoyez sauver des otages, il y va. Si vous l’envoyez préparer la déportation de millions de personnes ? Pas de problème pour lui. Après tout, il ne fait qu’obéir aux ordres. »
L’ironie est indéniable, mais elle est catégoriquement niée en Israël et en Occident.
Auteur : Mitchell Plitnick
* Mitchell Plitnick est le président de ReThinking Foreign Policy. Il est le co-auteur, avec Marc Lamont Hill, de Except for Palestine : The Limits of Progressive Politics. Mitchell a notamment été vice-président de la Fondation pour la paix au Moyen-Orient, directeur du bureau américain de B'Tselem et codirecteur de Jewish Voice for Peace.Son compte Twitter.
23 juillet 2025 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine
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