Israël exige des Palestiniens de Jérusalem un devoir d’allégeance

Photo : ActiveStills/Faiz Abu Rmeleh

Jérusalem, juillet 2017 - Kidnapping avec tabassage d'un manifestant palestinien par les troupes israéliennes d'occupation - Photo : ActiveStills/Faiz Abu Rmeleh

Tamara Nassar Israël a adopté le 7 mars une loi qui permettrait de révoquer le statut de résident des Palestiniens de Jérusalem-Est occupée pour « violation du devoir d’allégeance » à Israël.

La loi, soumise par le gouvernement israélien et ratifiée par la Knesset, permet la révocation du titre de résident pour trois motifs : avoir trahi la « confiance » d’Israël, avoir obtenu le statut de résident sur la base de fausses informations, ou représenter un danger pour la sécurité publique aux yeux du ministère de l’intérieur.

Il est clair que cette loi vise les Palestiniens, puisque les résidents juifs de Jérusalem jouissent de la citoyenneté israélienne. En vertu du droit international, cependant, il est illégal d’imposer aux Palestiniens « une obligation de loyauté envers la puissance occupante, sans parler de leur refuser le statut de résident permanent sur cette base, » d’après Adalah, groupe de défense juridique des Palestiniens en Israël.

Israël a occupé la partie orientale de Jérusalem en 1967, mais de fait détient toute la ville illégalement, puisque cette dernière fut placée à l’origine par un plan de partition de l’ONU en 1947 sous juridiction internationale en tant que corpus separatum.

La loi « vise à entraîner l’expulsion illégale des Palestiniens de Jérusalem » et constitue une « grave violation » de leurs droits fondamentaux, ont déclaré les groupes de défense des droits de l’homme HaMoked, Adalah, et l’Association for Civil Rights in Israel dans une déclaration commune.

Depuis 1967, Israël a révoqué le statut de résident de plus de 14 000 Palestiniens de Jérusalem-Est – généralement parce qu’ils s’étaient absentés temporairement pour étudier, travailler, se rapprocher de leur famille ou se marier, mais aussi parfois comme mesure punitive d’actes présumés de leurs proches.

C’est un fait sans précédent, les Palestiniens peuvent maintenant légalement perdre leur droit de résidence pour cause de déloyauté, quelle que soit la définition qu’en donne le ministère de l’intérieur.

La loi s’appliquerait également aux Palestiniens qui attaquent des soldats israéliens, selon le journal israélien Times of Israel.

Attaquer des soldats, y compris lancer des pierres, est qualifié de « crime terroriste » en droit israélien, mais en droit humanitaire international il est tout à fait légal pour un peuple occupé de résister à l’occupation militaire, même par la violence.

Résident permanent

Israël a occupé Jérusalem-Est en juin 1967, et l’a officiellement annexée en 1980. Environ 420 000 Palestiniens y vivent.

Israël a donné aux Palestiniens qui y vivaient déjà une carte d’identité de « résident permanent » et commença à les traiter comme des immigrants étrangers, plutôt que comme un peuple occupé auquel Israël s’est imposé par la violence.

Les titulaires du statut de résident permanent ne sont pas citoyens d’Israël, et n’ont souvent pas d’autre citoyenneté ou passeport. Ce sont fondamentalement des apatrides.

Cette nouvelle loi permet à Israël de révoquer leur statut de résident et de les déporter.

Punition collective

La nouvelle législation fait suite à l’acceptation par la Cour Suprême d’une pétition contre la révocation du statut de résident de quatre jeunes Palestiniens accusés de « manquement à l’allégeance à l’état d’Israël » en septembre 2017.

Les quatre jeunes hommes étaient accusés de jets de pierres et d’attaques à main armée.

La demande de révocation de leur statut de résident fut déposée par le ministre de l’intérieur Silvan Shalom, mais fut ensuite rejetée au motif qu’il n’existait pas de loi habilitant le ministère de l’intérieur à révoquer le statut de résident pour défaut de loyauté.

Voilà longtemps que les ministres de l’intérieur révoquent le statut de résident de Palestiniens de Jérusalem-Est pour d’autres raisons, notamment de ceux que l’on soupçonne d’attentats, ainsi que de leurs proches en guise de punition collective.

C’est ce qui est arrivé, par exemple, aux proches de Fadi al-Qunbar, 28 ans, qui a été tué après avoir lancé un camion bélier sur un groupe de soldats israéliens dans la colonie de East Talpiot près de Jérusalem en janvier 2017, faisant quatre morts et 13 blessés.

Israël a révoqué le statut de résident de Jérusalem de 12 membres de sa famille, dont sa mère. Sa maison a aussi été remplie de béton, une poursuite en dommages et intérêts de deux millions de dollars a été intentée contre sa famille, certains de ses proches ont été détenus, et sa dépouille est toujours retenue en otage.

Cette politique de révocation du statut de résident des Palestiniens de Jérusalem est manifestement discriminatoire, et n’est jamais appliquée à des suspects juifs ou leurs proches, quel que soit le crime commis. Les résidents juifs de la ville sont citoyens israéliens, et non titulaires d’un titre de « résident permanent, » par conséquent la loi ne peut leur être appliquée.

16 Mars 2018 – The Electronic Intifada – Traduction: Chronique de Palestine – MJB