La Haye, 17 septembre 2019 : faire rendre des comptes pour les crimes de guerre à Gaza

Saad Ziada debout sur les ruines de sa maison où 6 membres de sa famille de 3 générations ont été tués dans une attaque israélienne - Photo : Réseaux sociaux

Par Eddie Whyte

Le 20 juillet 2014 la maison de la famille Ziada dans le camp de réfugiés Bureij à Gaza a été bombardée par les forces militaires israéliennes.

C’était une attaque ciblée qui a instantanément réduit le bâtiment de trois étages en un amas de décombres et mortellement blessé tous ceux qui s’y trouvaient. Parmi les morts se trouvaient la mère d’Ismail Ziada, trois frères, sa belle sœur, un neveu de 12 ans et un ami qui rendait visite à la famille.

Plus de 2000 Palestiniens ont été tués par l’IDF (Forces de Défense Israéliennes) lors de l’ « Opération Bordure Protectrice ». L’immense majorité était des non combattants et plus d’un quart de toutes les personnes tuées au cours de l’opération étaient des enfants de moins de 18 ans.

A l’automne de la même année Ismail Ziada, citoyen néerlandais résidant aux Pays Bas, a contacté Liesbeth Zegveld, éminente avocate, spécialisée dans le soutien aux victimes de crimes de guerre et de violations des droits de l’homme. M. Ziada était déterminé à faire rendre des comptes à ceux qui sont responsables du meurtre de sa famille.

L’idée de départ d’engager une action pénale fut rapidement écartée, les expériences précédentes ayant montré qu’il était fortement improbable que le ministère public engage une procédure pénale. Cependant, Me Zegveld a fait remarquer que les Pays-Bas maintiennent l’exercice de la compétence universelle dans les procédures civiles pour les citoyens néerlandais qui ne peuvent avoir accès à la justice ailleurs.

Dimanche après-midi 20 juillet, l’armée israélienne a largué une bombe sur la maison de notre famille dans le camp de réfugiés de Bureij à Gaza.

Avis de décès paru dans le journal Volksrant, du 26 juillet 2014

À la suite de ce crime insensé, nous pleurons la perte des membres suivants de notre famille :

Muftia Ziada, notre mère, belle-mère et grand-mère
Jamil et Bayan Ziada, nos frère et belle-sœur, oncle et tante
Shaban Ziada, le fils âgé de 12 ans de Jamil et Bayan, notre neveu et cousin
Yousef Ziada, notre frère, beau-frère et oncle.

Nos pensées vont à la famille qui nous reste à Gaza qu’il nous est interdit de rejoindre. Nous pensons en particulier à nos neveux et nièces qui sont orphelins.

Ismail Ziada et Angélique Eijpe
Iyas, Siraj et Firas

Adresse de correspondance : Locatie 411/ZMA Muscat,
PO Box 12200, 2500DD, Den Haag
N’hésitez pas à nous écrire en néerlandais, arabe ou anglais

M. Ziada avait des réserves quant à l’opportunité d’engager une procédure civile car un dédommagement financier ne pourrait jamais être une consolation pour la perte de membres de sa famille. Toutefois, après mûre réflexion, il fut convenu d’aller au civil dans le but de pouvoir établir une certaine forme de responsabilité et de créer un précédent qui pourrait aussi profiter à d’autres et, espérons-le, empêcher de nouveaux crimes de guerre israéliens.

Des documents ont été soumis à la justice à la fois sur le chef d’état-major général de l’IDF au moment du bombardement, Benny Gantz, et le commandant des forces aériennes de l’IDF, Amir Eshel. Les deux officiers ont depuis pris leur retraite et M. Gantz a formé un nouveau parti politique “Hosen Yisrael” (Parti de la résilience israélienne) qui rivalise actuellement avec le parti du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le Likoud, pour le titre de parti le plus populaire en Israël.

L’hypothèse de travail initiale était que ni l’un ni l’autre des officiers ne répondrait à l’ordonnance et que les audiences judiciaires auraient lieu en leur absence. Toutefois, juste avant l’expiration du délai de trois mois pour la présentation d’une réponse, les deux officiers militaires israéliens ont désigné un avocat pour les représenter. En novembre 2018, ils ont finalement soumis une réponse.

Le chef d’état-major de l’armée israélienne, Benny Gantz [psychopathe et criminel] photographié le 20 juillet 2014, est poursuivi par Ismail Ziada pour le bombardement du domicile de sa famille à Gaza le même jour, faisant sept morts, dont la mère de Ziada – Photo : via The Electronic Intifada

Alors que l’ordonnance Ziada était axée sur le fait que le bombardement du domicile familial était illégal et constituait un crime de guerre au regard du droit international, la réponse des accusés portait exclusivement sur leur prétendu droit à l’immunité et sur l’incompétence alléguée du tribunal néerlandais, fondée sur l’argument que Ismail Ziada aurait accès à la justice en Israël.

La décision du tribunal israélien contre le Dr Izzeldin Abuelaish, qui a intenté une action en réparation contre l’État israélien pour le meurtre de trois de ses filles lors du bombardement de l’IDF en 2009, prouve, s’il en était besoin, que ce n’est certainement pas le cas.

Une audience est prévue pour le 17 septembre 2019, ce qui sera la première fois que le tribunal examinera effectivement les questions en litige. Si le résultat est positif pour Ismail Ziada, on s’attend maintenant à ce que les défendeurs de l’armée israélienne portent l’affaire devant la Cour suprême néerlandaise, ce qui peut prendre plusieurs années et nécessiter des ressources financières importantes.

La famille Ziada a utilisé ses propres fonds et de généreuses contributions d’amis et de sympathisants pour poursuivre sa cause au nom de toutes les victimes des crimes de guerre israéliens. L’an dernier, Roger Waters a donné un coup de pouce majeur à notre levée de fonds dans un magnifique geste de solidarité. Si l’on veut que justice soit rendue aux victimes palestiniennes, l’affaire a besoin de notre soutien moral et financier.

L’action en justice des Ziada a de réelles chances de constituer une avancée décisive et d’établir un précédent juridique qui profitera à d’autres Palestiniens et, espérons-le, empêchera de nouveaux crimes de guerre israéliens.

Il est important pour la famille d’insister sur le fait que cette action en justice n’est pas intentée à des fins personnelles. En cas de succès, toute indemnisation reçue sera affectée à un fonds spécialement créé pour les victimes palestiniennes de crimes de guerre en général et les enfants en particulier.

Chaque don, petit ou grand, aide la famille Ziada à mener la bataille pour que justice soit rendue au peuple palestinien .Merci de donner ce que vous pouvez et d’encourager les autres à faire de même.

Tous les fonds recueillis seront directement transmis au cabinet d’avocats chargé de l’affaire, Prakken d’Oliveira Human Rights avocats à Amsterdam.

14 décembre 2018 – Palestine Justice Campaign – Traduction: Chronique de Palestine – MJB